Le spectaculaire procès Balkany a donc abouti à une sanction exemplaire, à savoir des peines d'emprisonnement de 4 ans et de 3 ans à l'encontre de Patrick et d'Isabelle Balkany ainsi qu'à une peine d'inéligibilité de 10 ans.
Le tribunal correctionnel de Paris a donc globalement suivi les réquisitions du Parquet national financier.
Beaucoup déjà ont commenté - et le plus souvent salué - cette décision et ce, malgré la sévérité des peines prononcées.
Il est vrai que la peine ne dépasse pas le quantum légal et qu'il appartenait à la juridiction de déterminer si, compte tenu de la personnalité des prévenus ainsi que de la gravité des agissements, il convenait de sanctionner par une peine d'emprisonnement.
Sur cet aspect, je n'ai pas de commentaires spécifiques à faire. Durant l'été, j'en ai beaucoup discuté avec mes étudiants de Sup Barreau et j'ai constaté que les futurs pénalistes étaient parfois fascinés et souvent agacés par la personnalité de Patrick Balkany... Pour rappel, le portable du prévenu a sonné durant l'audience avec la musique des tontons flingueurs et ses accrocs avec son avocat l'ultra médiatique Me Dupont-Moretti ont suscité de nombreuses réactions dans l'opinion publique.
En revanche, un aspect de la décision me semble problématique, à savoir le mandat de dépôt qui a conduit à l'incarcération. En effet, la décision ayant été prononcée par le tribunal correctionnel, elle est susceptible d'appel. La condamnation n'est donc pas définitive et donc Patrick Balkany demeure présumé innocent.
Selon les dispositions de l'article 465 du Code de procédure pénale, le tribunal peut décerner un mandat de dépôt s'il condamne à une peine d'emprisonnement d'un an ou plus avec sursis par décision spécialement motivée, lorsque les circonstances de l'espèce justifient une mesure particulière de sûreté.
Tout d'abord, il convient d'indiquer que ses dispositions ont été respectées et que l'article laisse une grande marge de manoeuvre aux juges.
Ensuite, il est possible de s'interroger : quelles sont les circonstances particulières ? Les juristes de ma génération gardent en souvenir un certain nombre d'affaires qui - longtemps enlisées - n'ont jamais abouti, qu'elles concernent un ancien président de la République aujourd'hui trop malade pour répondre de ses agissements ou un ancien ministre de l'intérieur aujourd'hui décédé. Dès lors, il convient de constater que les époux Balkany sont des septuagénaires et qu'un appel, puis qu'un éventuel pourvoi en cassation aboutiraient à les voir répondre de leurs agissements que dans de (trop) nombreuses années. Dès lors, ceux-ci auraient pu continuer à exercer leurs fonctions électives. Un sentiment d'impunité aurait donc pu continuer à souffler sur Levallois-Perret. De telles considérations ne sont nullement convaincantes. Il n'existe aucun risque de fuite des époux Balkany et un nouveau procès va s'ouvrir le 18 octobre, pour blanchiment et corruption. Si la justice est trop lente, il n'appartient pas aux prévenus d'en souffrir. Rien ne justifie véritablement ce mandat de dépôt si ce n'est de faire un exemple, d'incarcérer pour humilier...
Enfin, que penser de ceux qui se réjouissent d'une incarcération ? Sur ce point, rappelons tout simplement les dispositions de l'article 137 du Code de procédure pénale selon lesquelles le principe est celui de la liberté du présumé innocent et l'exception ultime la détention ! Cette exécution de la sanction, sans attendre la condamnation définitive, semble davantage reposer sur la volonté de faire un exemple, de répondre à une certaine vindicte populaire. Finalement, il ne s'agit ni plus, ni moins que d'une véritable exécution en place publique.
Pour finir, formulons une proposition : il serait loisible au législateur de préciser les critères du mandat de dépôt, de les rendre plus objectifs et donc indiscutables...