Cela fait désormais de nombreuses années que je m'intéresse au milieu carcéral que ce soit en organisant des visites, en ayant été assesseur en commission de discipline à la maison d'Amiens ou encore en animant la journée consacrée au travail en prison dans le cadre du cycle de conférences du certificat universitaire "Droits Debout" le 9 février 2018 http://www.ucly.fr/institut-des-sciences-de-la-famille-isf/formations/certificat-universitaire-droits-debout-les-droits-fondamentaux-des-personnes-privees-de-liberte-208970.kjsp !
J'ai donc dévoré avec intérêt l'ouvrage d'Isabelle Lonvis-Rome préfacé par Robert Badinter. Il est riche, poignant et percutant. La juge y relate ses entretiens avec des prisonnières mais également des surveillantes pénitentiaires de la maison d'arrêt de femmes de Versailles.
La prison transforme les relations sociales qui s'y nouent et rapidement est relatée la nécessité d'instaurer entre les détenues et le personnel pénitentiaire une "juste distance" (p. 38). Tout au long de l'ouvrage, on suit le parcours des différentes détenues. On y perçoit la violence du choc carcéral et de la séparation avec le reste de la famille. La question de la maternité est omniprésente. Comment peut-on continuer à être mère en prison ? De même, les incertitudes autour de l'effectivité des droits en prison, notamment le droit au travail, le droit de vote ou les droits de la défense sont relatées avec minutie.
Au fur et à mesure, la juge tire des conclusions de son constat, non sans rappeler la situation privilégiée de la maison d'arrêt de Versailles. Elle y évoque ses réflexions sur les courtes peines. Par ailleurs, de façon topique, elle rappelle le surnom initial de la maison d'arrêt de Fresnes "Fresnes Palace" alors même qu'après de nombreux recours devant le Conseil d'Etat, c'est désormais la Cour européenne des droits de l'homme qui va apprécier la situation des détenus dans cette prison surpeuplée, vétuste et insalubre http://www.leparisien.fr/creteil-94000/la-prison-de-fresnes-c-est-la-pire-des-choses-en-termes-de-detention-30-11-2017-7425129.php
L'auteure poursuit son analyse minutieuse en estimant que la lutte contre le surpeuplement passe à la fois par la construction de nouvelles prisons et par le développement des alternatives à la privation de liberté (p. 157). Enfin, l'ouvrage se termine par des réflexions plus globales sur des perspectives de réforme. Ainsi, l'enfermement est davantage compris lorsqu'il est l'oeuvre d'une juridiction collégiale et n'a de sens que s'il est exécuté dans un délai raisonnable.
Bref, il va de soi que je recommande vivement cet ouvrage et salue le travail de son auteur ! Il ne manquera pas d'intéresser tout citoyen et d'interpeller sur la particularité de la situation des détenuEs !