Concernant l'odieux assassinat, je vais essayer à mon petit niveau de faire ce que je sais faire pour lui rendre hommage, du droit.
La liberté d'expression constitue l'un des fondements essentiels d’une société démocratique et même selon la Cour européenne des droits de l’homme « l'une des conditions primordiales de son progrès et de l'épanouissement de chacun. Sous réserve du paragraphe 2 de l'article 10 (art. 10-2), elle vaut non seulement pour les "informations" ou "idées" accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l'État ou une fraction quelconque de la population. Ainsi le veulent le pluralisme, la tolérance et l'esprit d'ouverture sans lesquels il n'est pas de "société démocratique". » (CEDH, Handyside c. Royaume-Uni, 7 décembre 1976, Requête n° 5493/72, § 49).
Dans le même temps, l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen proclame la liberté d’opinion.
La liberté de la presse est réglementée par la loi du 29 juillet 1881. Si elle incrimine l'injure et la diffamation des personnes et des groupes notamment en raison de leur appartenance à une religion (articles 32 alinéa 3 et 33 alinéa 3 de la loi), elle ne punit pas le blasphème. Pourtant, le délit de blasphème est longtemps demeuré en Alsace-Moselle (article 166 du code pénal local) et n’a été abrogé que par l'article 172 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté.
Plus encore, la laïcité de notre République est affirmée dès l’article 1er de notre Constitution. Dans le même temps, l’article 1er de la loi du 9 décembre 1905 énonce :
« La République assure la liberté de conscience. »
Ainsi, on peut critiquer une religion, même la caricaturer, mais non diffamer ou insulter ses croyants. Prenons un exemple, à savoir l'affirmation « les juifs, c'est une secte, une escroquerie. C'est une des plus graves parce que c'est la première ». Selon l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation, cela « ne relève pas de la libre critique du fait religieux, participant d'un débat d'intérêt général mais constitue une injure visant un groupe de personnes en raison de son origine, dont la répression est une restriction nécessaire à la liberté d'expression dans une société démocratique » (Ass. Plén., 16 février 2007, Bulletin criminel 2007, n° 1).
Si l’auteur s’était contenté de critiquer la religion, il ne commettait pas d’infraction.
Pour ma part, j’aime bien le sarcasme et les critiques, mais les propos blasphématoires me heurtent parfois. C’est mon opinion. Elle existe et est donc protégée. Je ne l’impose à personne. En effet, je comprends que l’on puisse critiquer, discuter et échanger sur l’existence de Dieu ou sur ses croyances. Lorsque je donne un cours à mes étudiants qui préparent leur Grand Oral de Libertés et Droits Fondamentaux, dans le cadre du CRFPA, je leur parle bien évidemment de l'affaire des caricatures. Je ne me censure pas. Il y a souvent un débat, un échange, parfois vif, mais cela reste une interaction sociale normale.
J’ai été croyant et je crois parfois le redevenir parfois un petit peu et on ne massacre pas au nom de Dieu, parce que la vie est sacrée. On ne massacre pas au nom de Dieu, parce que rien ne justifie de massacrer. Quand on a des convictions, on discute, on essaie de convaincre et on écoute.
Je suis enseignant et je vais continuer à enseigner la liberté d’expression et la laïcité, parce que je me sens vivant et que je dois le faire !
Je présente toutes mes condoléances aux amis et à la famille de Samuel, je suis désolé et comme j’aimerai leur dire « plus jamais ça ! »
Notre société va mal…très mal…