PÉRIODE PRECONTRACTUELLE
La période précontractuelle « est la phase préliminaire où les clauses du contrat sont étudiées et discutées[1] ». Le contrat n’est donc pas encore formé. Il se peut même qu’il n’y ait pas encore eu d’offre de contracter prête à être acceptée telle quelle, mais seulement des propositions et des contre propositions.
Ainsi, selon GHESTIN[2], « entre l’initiative que constitue l’entrée en pourparlers ou l’offre, et la conclusion d’un contrat, se situe souvent une période précontractuelle qui peut être parfois de longue durée. Il s’agit de la période des pourparlers dont la consultation peut servir à l’interprétation du contrat » (§I). Postérieurement à l’offre, la promesse d’embauche susceptible d’être réalisées, constitue également un avant-contrat (§II).
Les pourparlers précontractuels
La rencontre de deux volontés est l’élément indispensable à la formation d’un contrat. En effet, une convention ne peut se former que lorsque les contractants sont d’accord sur les éléments de la convention qu’ils se proposent de conclure. La période qui sépare ainsi la rencontre des deux individus, de la conclusion du contrat, est celle des pourparlers.
« Discuter n’est pas embaucher[3] ». Les pourparlers sont la période pendant laquelle les futurs contractants discutent et formulent des propositions de collaboration, leur permettent une véritable réflexion. Ni l’employeur, ni le candidat ne sont engagés. Ils peuvent rompre à tout moment leurs échanges, en toute liberté. Ainsi, il a été jugé que « le fait pour une association de prendre contact avec un metteur en scène parce qu’elle envisage de monter une pièce de théâtre, en mentionnant dès le début qu’elle ne pourra prendre de décision qu’après présentation et acceptation des prévisions budgétaires, ne dépasse pas le stade de simple pourparlers dont la rupture, en raison d’un devis trop élevé, n’entraîne aucune conséquence »[4].
Selon M. Hani BARCHA[5], la période des pourparlers peut faire l’objet d’une classification tripartite distinguant l’invitation à entrer en pourparlers (I), les pourparlers proprement dits (II), et l’émission de l’offre (III).
L’invitation à entrer en pourparlers
Pour illustrer cette invitation, prenons l’exemple d’un employeur qui veut embaucher un salarié. Il va recevoir plusieurs candidats en entretien, et choisira celui avec lequel il souhaite entrer en négociations. Lorsque l’employeur aura trouvé son futur cocontractant, les deux parties conviendront ou non d’entrer en pourparlers. Dans cette situation, se pose alors le problème du refus d’enter en pourparlers.
Par exemple, si l’employeur refuse d’entrer en pourparlers avec un professionnel parce qu’il le considère trop âgé, ou bien que son état de santé ne correspond pas au travail à effectuer, on considérera que ce dernier a agit conformément aux principes généraux de la liberté du travail, du commerce et de l’industrie, ainsi que dans l’intérêt de l’entreprise. Rien ne pourra donc lui être reproché.
En revanche, s’il invoque comme refus d’entrer en pourparlers, l’appartenance à un syndicat ou à une religion, ce n’est plus l’intérêt de l’entreprise qui est évoqué, mais bien une intention de nuire condamnée par la jurisprudence à des dommages-intérêts. Cette invitation à entrer en pourparlers, précède les pourparlers proprement dits (II).
Les pourparlers proprement dits
Dans cette deuxième phase, les volontés sont déterminées quant à la personne du futur contractant. Les parties vont alors discuter sur les éléments du contrat, notamment sur le salaire, la durée du travail, les congés-payés ou autre. En principe, à l’issue des pourparlers une offre d’emploi est effectuée (III).
L’émission de l’offre
Lorsque la volonté de l’une des parties est définitivement arrêtée, elle va émettre une offre. Pour que le contrat soit conclu, il faut donc qu’il y ait acceptation de l’autre partie. Cette offre peut d’ailleurs faire l’objet d’une révocation à tout moment, tant qu’elle n’a pas été acceptée. Pour illustrer cette problématique, nous pouvons nous référer à un arrêt de la CA de Paris du 13 décembre 1984[6], qui qualifie d’offre de contrat, la simple proposition de travail faite par la société « Sofrima », à l’actrice Isabelle ADJANI. Celle-ci avait en l’espèce fait une contre-proposition mentionnant le montant de son cachet, et proposant d’autres dates de tournage.
A l’issue de la période des pourparlers, une promesse d’embauche peut être formulée au salarié (§II).
La promesse d’embauche
La promesse d’embauche est une promesse unilatérale de contracter. Il s’agit d’un avant-contrat par lequel l’employeur s’engage envers le salarié à conclure un contrat dont les conditions sont d’ores et déjà déterminées. C’est plus qu’une offre, mais moins que le contrat définitif. La jurisprudence retient la qualification de promesse d’embauche chaque fois que la décision d’embaucher de l’employeur est manifeste. La décision est alors considérée comme manifeste dès lors qu’elle est ferme est précise.
Pour être qualifiée de promesse d’embauche, l’offre doit réunir 3 conditions :
- Etre adressée à une personne déterminée ;
- Ferme est définitive ;
- Etre précise et comporter des éléments essentiels de la relation contractuelle future.
Ainsi, une cour d’appel qui constate qu’une lettre ne mentionnant ni l’emploi occupé, ni la rémunération, ni la date d’embauche, ni le temps de travail, a pu en déduire qu’elle constituait une simple offre d’emploi[7].
Précisons que si la promesse a été acceptée, cela signifie que le contrat de travail a été valablement formé. Dans ce cas, les règles du droit du licenciement s’appliquent, alors même que le salarié n’a pas commencé à exécuter son contrat. Le salarié percevra donc une indemnité de licenciement et pourra prétendre aux indemnités légales ou conventionnelles de préavis et de congés-payés.
[1] CARBONNIER, droit civil, t.4, les obligations, p.85
[2] GHESTIN, traite de droit civil, les obligations. Le contrat, n°227
[3] Rezo.net.Article du 28-08-2006.
[4] Cass. 17 mai 1979. n° de pourvoi 78-40497.P
[5] M. Hani BARCHA a été juge unique de Tripoli, président du tribunal de Batroun, président du tribunal de Douma.
[6] CA Paris. 13 décembre 1984, « Sofrima contre Adjani ».
[7] Cass. soc. 12 juillet 2006, n°04-47.938.
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