C’est sur le fondement de ce principe que la chambre commerciale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 24 mai 2011, a annulé une procédure d’audition diligentée par les enquêteurs de l’AMF à l’encontre d’un chef d’entreprise soupçonné d’avoir commis un délit d’initié, pour cause d’irrégularité de son audition. La Cour de cassation a jugé, au visa des articles L. 621-10, L. 621-11 et R. 621-35 du Code monétaire et financier, que l’enquête de l’AMF doit être loyale, ce qui implique que les déclarations du chef d’entreprise ne peuvent être recueillies si ce dernier n’a pas renoncé au bénéfice des règles protectrices applicables aux auditions visant à assurer la loyauté de l’enquête (Cass. com., 24 mai 2011, n° 10-18267).
Les articles L. 621-10, L. 621-11 et R. 621-35 du Code monétaire et financier encadrent en effet les auditions menées par l’AMF afin de préserver entendues :
- Selon l’article L. 621-10 : « Les enquêteurs peuvent convoquer et entendre toute personne susceptible de leur fournir des informations ».
- Selon l’article L. 621-11 : « Toute personne convoquée a le droit de se faire assister d’un conseil de son choix ».
- Selon l’article R. 621-35 : « La convocation est adressée à l’intéressé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, remise en main propre contre récépissé ou acte d’huissier, huit jours au moins avant la date de convocation. Elle fait référence à l’ordre de mission nominatif de l’enquêteur établi par le secrétaire général ou son délégataire. Elle rappelle à la personne convoquée qu’elle est en droit de se faire assister d’un conseil de son choix. Les procès-verbaux établis dans le cadre des enquêtes énoncent la nature, la date, le lieu des constatations opérées. Ils sont signés par l’enquêteur et la personne concernée par les investigations. En cas de refus de celle-ci, mention en est faite au procès-verbal ».
En l’espèce, cette procédure n’avait pas été respectée. Après avoir été condamné pour délit d’initié par la Commission des sanctions de l’AMF, le dirigeant d’une société a interjeté appel afin de demander l’annulation de la procédure en raison du caractère irrégulier de l’audition diligentée par les enquêteurs du régulateur financier.
La cour d’appel de Paris, dans un arrêt rendu le 30 mars 2010, a rejeté cette demande. La décision d’appel a finalement été censurée par la Cour de cassation qui reproche aux juges du fond de ne pas avoir recherché si la personne entendue avait préalablement « renoncé au bénéfice des règles applicables aux auditions, visant à assurer la loyauté de l’enquête ».
En revanche, les enquêteurs de l’AMF ont le droit de ne pas appliquer les règles susmentionnées si la personne entendue a renoncé expressément, avant son audition, à leur application. Or, le chef d’entreprise n’avait pas renoncé notamment à son droit de se faire assister d’un conseil de son choix.
À l’heure où les personnes entendues en garde à vue peuvent bénéficier de l’assistance d’un avocat, on ne peut que se réjouir du souci de la Cour de cassation de contrôler la loyauté des procédures d’auditions diligentée par une autorité indépendante de régulation, compte tenu de la complexité de son domaine d’intervention.
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