Si l’on regarde le droit français, on remarque que les articles L. 111-1[1] et L. 111-2[2] du Code de la consommation font peser sur tout professionnel[3], vendeur de biens[4] ou prestataire de services[5], une obligation d’information sur les caractéristiques essentielles du bien ou du service. Cette obligation s’applique quel que soit le mode opératoire de la conclusion du contrat (face à face, à distance ou hors établissement). La directive renforce cette obligation pesant sur les professionnels dans tous les contrats (contrats de fourniture, contrats de vente, contrats de services, contrats de transport, contrats de consommation…) (II), mais prévoit également des particularités pour les contrats conclus à distance et hors établissement (II).
I.- L’obligation d’information dans tous les contrats
L’article 1602 du Code civil impose au vendeur professionnel d’expliquer clairement au consommateur ce à quoi il s’oblige. Cette obligation d’information est renforcée par un champ d’application plus vaste (A) et un contenu plus précis (B).
A) Un champ d’application plus vaste
• Les contrats inclus dans le champ de d’application. Le champ d’application de l’obligation d’information est déterminé par la nature juridique du contrat. L’article 5 de la directive est relatif aux contrats de consommation. Parmi ces contrats, il y a les contrats de vente et les contrats de services, mais aussi les contrats de location d’immeuble, voire d’achat de biens immobiliers. L’obligation d’information pesant sur le professionnel s’applique aussi aux contrats de fourniture d’eau, de gaz et d’électricité lorsqu’ils ne sont pas conditionnés en quantité déterminée.
• Les contrats exclus du champ d’application. Cependant, l’article 3 §3 de la directive exclut les contrats portant sur les services sociaux, les soins de santé, les jeux d’argent (y compris les loteries et les paris), les services financiers, les contrats d’utilisation de biens à temps partagé, les contrats établis devant un officier public, la fourniture de biens au cours de tournées fréquentes et régulières, les services de transport de passagers, les contrats consécutifs à l’utilisation de distributeurs automatiques, certains contrats conclus par des opérateurs de télécommunication (téléphones publics payants, connexion unique).
B) Un contenu plus précis
La directive impose aux professionnels de mentionner dans les contrats ou avant contrats huit informations à destination des consommateurs et laisse libre les Etats membres d’accroître ces obligations précontractuelles d’information par application du principe de subsidiarité.
Il s’agit des informations relatives :
1° aux principes caractéristiques du bien ou du service
2° à l’identité du professionnel (nom, enseigne, adresse géographique, numéro de téléphone et de télécopieur, adresse électronique, adresse du siège social)
3° au prix TTC ou de son mode calcul
4° aux modalités de paiement
5° à la garantie commerciale
6° à la garantie de conformité
7° aux fonctionnalités du contenu numérique
8° à l’interopérabilité entre contenu numérique et certains logiciels ou matériels (informations sur l’existence d’un système de protection, de l’impossibilité de réaliser une copie, de l’incompatibilité du CD avec certains supports…).
II.- L’obligation d’information dans les contrats conclus à distance et hors établissement
L’article 6 de la directive définit le contenu des obligations d’informations concernant les contrats conclus à distance (A) et hors établissement (B).
A) Contenu de l’obligation d’information dans les contrats à distance
Les contrats à distance sont plus connus sous le nom de contrats conclus par voie électronique. En ce qui concerne ces contrats, la directive impose au professionnel de communiquer au consommateur les principales caractéristiques du bien ou du service et le prix total des biens et services (TTC) et, s’il y a lieu, les frais complémentaires (livraison, transport, affranchissement, ou autres). À défaut d’indication du prix, il faut au minimum mentionner dans le contrat la méthode de calcul du prix. On notera que cette dernière exigence est difficile à mettre en œuvre en présence d’un contrat à durée indéterminée ou lorsque la période d’abonnement n’est pas fixé. À ces informations portant sur le prix s’ajoute le coût de l’utilisation de la technique de communication à distance pour la conclusion du contrat.
Les informations relatives aux conditions de livraison, à la durée du contrat, aux obligations du consommateur, aux moyens de paiement doivent être indiquées dès le début du processus contractuel, c’est-à-dire avant de passer commande. Le consommateur ne sera lié par l’offre électronique qu’après une acceptation écrite. Il doit recevoir en retour une confirmation du contrat conclu dans un délai raisonnable.
On notera enfin que le contenu de l’article L. 121-18 du Code de la consommation devra sans doute être modifié afin d’intégrer ces obligations définies par la directive.
B) Contenu de l’obligation d’information dans les contrats hors établissement
Les informations doivent être données par écrit ou sur tout support durable (clé USB, CD-Rom, DVD, carte à mémoire, disques durs, courriels). Une copie du contrat devra être fournie au consommateur.
Une disposition particulière de la directive concerne les services immédiats fournis par les professionnels à la demande expresse des consommateurs, pour un montant ne dépassant pas 200 euros. Bien que cette disposition ne soit pas contraignante pour les États membres, libres de la transposer ou non dans leur droit interne, elle précise que certaines informations doivent être fournies sur papier ou autre support durable, à savoir : l’identification du professionnel, le prix ou le mode de calcul et l’estimation du prix.
En droit français, l’article L. 121-23 du Code de la consommation[6] oblige déjà le professionnel à remettre un exemplaire du contrat au consommateur. La remise d’un exemplaire signifie bien que l’on est en présence d’un écrit. Faute de mentionner l’utilisation d’un support durable, le contenu de l’article L. 121-23 devrait donc logiquement être modifié.
Conclusion
La directive européenne n° 2001/83 du 25 octobre 2011 apporte incontestablement des mesures en faveur d’une meilleure protection des consommateurs, et notamment en durcissant l’obligation d’information à la charge des professionnels tout le long du processus contractuel. Le second objectif de la directive, plus large, vise à harmoniser le droit de la consommation entre les États membres. Sa transposition dans la législation des différents États de l’Union européenne devra se faire au plus tard le 13 décembre 2013 pour une application effective à partir du 13 juin 2014. Le droit français de la consommation devra sans doute être modifié, mais seulement de façon partielle, étant donné la présence de dispositions déjà protectrices dans le Code de la consommation.
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[1] Selon l’article L. 111-1 du Code de la consommation, « I.- Tout professionnel vendeur de biens doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien. II. - Le fabricant ou l'importateur de biens meubles doit informer le vendeur professionnel de la période pendant laquelle les pièces indispensables à l'utilisation des biens seront disponibles sur le marché. Cette information est obligatoirement délivrée au consommateur par le vendeur, avant la conclusion du contrat. III. - En cas de litige portant sur l'application des I et II, il appartient au vendeur de prouver qu'il a exécuté ses obligations ».
[2] Selon l’article L. 111-2 du Code de la consommation, « I.- Tout professionnel prestataire de services doit avant la conclusion du contrat et, en tout état de cause, lorsqu'il n'y pas de contrat écrit, avant l'exécution de la prestation de services, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du service. II.- Le professionnel prestataire de services doit mettre à la disposition du consommateur ou lui communiquer, de manière claire et non ambiguë, les informations suivantes : nom, statut et forme juridique, adresse géographique de l'établissement, coordonnées permettant d'entrer en contact rapidement et de communiquer directement avec lui ; le cas échéant, le numéro d'inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ; si son activité est soumise à un régime d'autorisation, le nom et l'adresse de l'autorité l'ayant délivrée ; s'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée et identifié par un numéro individuel en application de l'article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d'identification ; s'il est membre d'une profession réglementée, son titre professionnel, l'État membre dans lequel il a été octroyé ainsi que le nom de l'ordre ou de l'organisme professionnel auprès duquel il est inscrit ; les conditions générales, s'il en utilise ; le cas échéant, les clauses contractuelles relatives à la législation applicable et la juridiction compétente ; le cas échéant, l'existence d'une garantie après-vente non imposée par la loi ; l'éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l'assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l'engagement. Tout professionnel prestataire de services doit également communiquer au consommateur qui en fait la demande les informations complémentaires suivantes : en ce qui concerne les professions réglementées, une référence aux règles professionnelles applicables dans l'État membre de l'Union européenne sur le territoire duquel ce professionnel est établi et aux moyens d'y avoir accès ; des informations sur leurs activités pluridisciplinaires et leurs partenariats qui sont directement liés au service concerné et sur les mesures prises pour éviter les conflits d'intérêts. Ces informations figurent dans tout document d'information dans lequel le prestataire présente de manière détaillée ses services ; les éventuels codes de conduite auxquels il est soumis, l'adresse électronique à laquelle ces codes peuvent être consultés ainsi que les versions linguistiques disponibles ; les informations sur les conditions de recours à des moyens extrajudiciaires de règlement des litiges, lorsque ces moyens sont prévus par un code de conduite, un organisme professionnel ou toute autre instance. III.- Au sens du II, un régime d'autorisation s'entend de toute procédure qui a pour effet d'obliger un prestataire ou un destinataire à faire une démarche auprès d'une autorité compétente en vue d'obtenir un acte formel ou une décision implicite relative à l'accès à une activité de services ou à son exercice. IV.- Le II du présent article ne s'applique pas aux services mentionnés aux livres Ier à III et au titre V du livre V du code monétaire et financier ainsi qu'aux opérations pratiquées par les entreprises régies par le code des assurances, par les mutuelles et unions régies par le livre II du code de la mutualité et par les institutions de prévoyance et unions régies par le titre III du livre IX du code de la sécurité sociale. V.- En cas de litige sur l'application des I et II du présent article, il appartient au prestataire de prouver qu'il a exécuté ses obligations ».
[3] Le professionnel est une personne physique ou morale qui agit directement ou indirectement dans le cadre de son activité industrielle, commerciale, artisanale ou libérale (producteur, distributeur, commerçant, membre d’une profession libérale, …).
[4] Les biens sont des objets mobiliers corporels, non fabriqués sur les spécifications du consommateur. La directive y inclut la fourniture d’eau, de gaz ou d’électricité dans la mesure où ces biens sont fournis sur une base contractuelle. En revanche, les biens immobiliers n’entrent pas dans le champ d’application de la directive, sauf par le biais de certains contrats de services.
[5] Les services ne sont pas définis dans la directive. Il est seulement précisé que les services de transport de passagers n’entrent pas dans le champ d’application de la directive.
[6] Selon l’article L. 121-23 du Code de la consommation, « Les opérations visées à l'article L. 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat et comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes : 1° Noms du fournisseur et du démarcheur ; 2° Adresse du fournisseur ; 3° Adresse du lieu de conclusion du contrat ; 4° Désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés ; 5° Conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des biens, ou d'exécution de la prestation de services ; 6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L. 313-1 ; 7° Faculté de renonciation prévue à l'article L. 121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L. 121-24, L. 121-25 et L. 121-26 ».