Ce moteur de recherche fonctionne suivant quatre modes d'affichage (allant du livre entier au simple extrait). Outre l'argument tiré du fait que le mode « extrait » est celui par défaut du système, des sociétés d'éditions françaises ont engagés une action en contrefaçon contre la firme californienne.
Google faisait valoir deux arguments importants :
1° L'absence de communication au public
Selon Google, la numérisation ne serait pas contrefaisante car la fixation intégrale de l'œuvre n'ayant lieu que sur ces serveurs internes, elle ne permettrait pas la communication au public, critère posé par l'article L.122-3 du Code de la Propriété Intellectuelle. Or, en pratique, pour avoir un affichage au profit du public, tout du moins par extrait, Google avait bien numérisé l'ensemble des œuvres. Seul l'accès est limité pour l'internaute.
A cela, le Tribunal affirme que « la numérisation d'une œuvre, technique consistant en l'espèce, à numériser l'intégralité des ouvrages dans un format informatique donné, constitue une reproduction de l'œuvre qui requiert en tant que telle, lorsque celle-ci est protégée, l'autorisation préalable de l'auteur ou de ses ayants droit »
De plus, Google affirmait que la simple potentialité d'accès à l'ouvrage intégral ne pouvait suffire. A cet argument, le Tribunal rappelle que le terme « permettant » doit s'entendre dans le sens de rendre possible l'accès et non pas comme dans le sens d'offrir la possibilité au public de consulter l'œuvre.
Ainsi, cette solution traduit la position qui consiste à retenir que la numérisation per se est un acte de contrefaçon.
2° L'exception de courte citation
Selon l'argumentation de Google sur ce point, la diffusion intégrale nécessite l'accord des ayants droit, alors que les courts extraits entreraient dans de la courte citation ( L.122-5 Code de la Propriété Intellectuelle) et seraient donc exclus de toute négociation.
Ainsi, la simple diffusion des couvertures de livres pourrait-elle entrer dans ce champ ? Le Tribunal tranche de façon classique et retient que la représentation intégrale de l'œuvre picturale exclut le bénéficie de la courte citation, d'autant plus que l'aménagement prévu par l'article L.122-5-9 n'est applicable qu'à l'information par voie de presse.
En conclusion, cet décision doit inciter Google à négocier en France avec les ayants droit. Par aucun « accord transactionnel de classe avec les éditeurs américains dont l'opposabilité aux demanderesses n'est pas démontrée et qui serait de surcroît en cours de validation par la justice américaine ». En effet, le projet Google Books avait déjà reçu un plomb dans l'aile lorsque le département de la Justice américaine avait demandé au juge fédéral Denny Chin de ne pas valider l'accord entre Google et les éditeurs et auteurs américains. En effet, déjà était posé le problème des livres épuisés mais pas tombés dans le domaine public. Ainsi, Hachette déclarait à l'époque que « cet accord inverse la charge de la preuve et inverse la charge économique à son détriment ». Toutefois, aux Etats-Unis, Google avait su agiter la carotte sous le nez des éditeurs, en promettant de rembourser les frais d'avocats (estimés à 30 millions de dollars) et solder les « numérisations sauvages » du passé par un chèque de la somme de 125 millions de dollars. Qu'en sera-t-il des éditeurs français ?