Cela fait six mois qu'on parle beaucoup moins des Roms. Pourtant, rien n'a changé. La procédure méconnaît toujours les droits fondamentaux de ces citoyens de l'Union Européenne, et reste coûteuse, à la limite de la légalité, et inefficace.
Depuis que les Roms roumains et bulgares sont devenus citoyens de l'Union Européenne, à savoir depuis le 1er janvier 2007, les éloigner relève de l'effet d'annonce. En effet, ils bénéficient de la liberté de circulation (art. 45 TUE).
Les seules restrictions possibles à cette liberté de circulation sont l'ordre public et les ressources. Ainsi, le Préfet peut prononcer un arrêté de reconduite à la frontière, en cas de menace pour l'ordre public. La menace doit bien entendu être sérieuse. Par ailleurs, au-delà de trois mois de présence sur le territoire, le citoyen de l'Union Européenne, d'après l'article L. 121-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), doit justifier de ressources, et qu'il ne constitue pas une « charge déraisonnable pour le système d'assurance sociale ». A défaut, le Préfet peut ordonner au citoyen de quitter le territoire français (art. L. 511-1 CESEDA). Toutefois, le citoyen dispose d'un recours.
Dès lors, comme le dit Serge Slama, pour contourner ce recours, feu le Ministère de l'Immigration avait « inventé, en dehors de tout cadre légal, un autre stratagème: l'aide au retour humanitaire ».
Cette « aide humanitaire », dont l'appellation regorge d'hypocrisie, ne dispose d'aucun fondement légal, mis à part une circulaire interministérielle du 7 décembre 2006. Elle consiste à l'allocation d'une somme d'argent à qui accepte de rentrer dans son pays d'origine. Le dispositif était en place bien avant qu'il fasse la une des médias, mais restait modéré: 548 personnes en ont bénéficié en 2006, 757 du 1er janvier au 31 août 2008). Dès lors, pour atteindre ses objectifs, le Ministère de l'Immigration l'a généralisé.
Or, la statistique intéressante, c'est qu'en 2010, d'après Serge Slama, 84% des Roms qui ont déjà quitté la France avaient déjà bénéficié de l' « aide humanitaire ».
Cette procédure est donc, en plus de restreindre la liberté d'aller et venir, inefficace et coûteuse.
Un fichier a été mis en place pour « lutter » contre cette « fraude ». Ce fichier, en ce qu'il a pour objet de contrôler la liberté d'aller et venir des citoyens de l'Union, apparaît clairement contraire au droit communautaire.
Je n'irai pas plus loin dans le raisonnement. Nous disposons actuellement d'une procédure garantissant le respect des droits fondamentaux du citoyen de l'Union, qui a été écartée car elle n'est pas assez rapide. Nous avons donc, aujourd'hui, une procédure qui ne respecte pas les droits fondamentaux, sans recours, inefficace et coûteuse.