La directive européenne 2007/36/CE du 11 juillet 2007 concernant l’exercice de certains droits des actionnaires des sociétés cotées devait en principe être transposée au plus tard le 3 août 2009. Bien que déjà conforme à certaines de ses dispositions (V. en ce sens Note de l’ANSA n°09-030), le droit français a pris beaucoup de retard pour transposer en totalité cette directive, laquelle a été transposée en trois temps : d’abord avec le décret n°2010-684 du 23 juin 2010 relatif aux droits des actionnaires des sociétés coté ; ensuite avec l’ordonnance n°2010-1511 du 9 décembre 2010 portant transposition de la directive 2007/36/CE du 11 juillet 2007 concernant l'exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées ; enfin avec le décret n°2010-1619 du 23 décembre 2010 relatif aux droits des actionnaires de sociétés cotées.
L’objet de la présente note se limitera aux procurations de vote dans les sociétés cotées. La transposition de la directive a permis une refonte de notre droit en la matière. En effet, le régime des mandats de vote a été assoupli d’une part et les pratiques de sollicitation de mandats ont été encadrées d’autre part.
Il conviendra de s’intéresser successivement à la liberté de désigner le mandataire du choix de l’actionnaire (i), à la procédure de vote par procuration (ii) et aux sollicitations actives de mandat (iii).
(i) La liberté pour un actionnaire de désigner le mandataire de son choix
L’ordonnance du 9 décembre 2010 est venue consacrer le principe de la liberté de choix du mandataire dans les sociétés cotées. L’article L. 225-106 alinéa 2 du Code de commerce dispose qu’un actionnaire absent à l’assemblée d’une société dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, peut s’y faire représenter, outre un autre actionnaire, par son conjoint ou par le partenaire avec lequel il a conclu un pacte civil de solidarité, par toute autre personne physique ou morale de son choix.
(ii) L’encadrement de la procédure de vote par procuration de l’actionnaire
L’ordonnance de 2010 a consacré pour la première fois un régime légal à la procédure de vote par procuration. Pour mémoire, la jurisprudence faisait application de la théorie du mandat auparavant.
Les textes de transposition sont venus consacrer les principes suivants :
- Le mandat doit être écrit et communiqué à la société
- La révocation du mandat doit respecter le même formalisme que précédemment (art. R. 225-79 alinéa 5 C. com.),
- Les actionnaires peuvent désigner ou révoquer un mandataire par voie électronique pour se faire représenter à l’assemblée (art. 225-79 alinéa 6 C. com)
- Le nouvel article L. 225-106-1 alinéa 1 du Code de commerce prévoit que lorsque « l'actionnaire se fait représenter par une personne autre que son conjoint ou le partenaire avec lequel il a conclu un pacte civil de solidarité, il est informé par son mandataire de tout fait lui permettant de mesurer le risque que ce dernier poursuive un intérêt autre que le sien ». Les alinéas suivants du texte précisent les principales situations de conflit d’intérêts pouvant exister à l’égard d’un émetteur. En tout cas, s’il y a conflit d’intérêts, le mandataire devra en informer sans délai l’actionnaire qui devra confirmer expressément le maintien du mandat. A défaut de confirmation, ce dernier sera considéré comme caduc.
- Conformément à l’obligation de loyauté prévue à l’article L. 225-106 III in fine, si un actionnaire décide de confier son vote au président du conseil d’administration / de surveillance, ce dernier devra voter sans le sens indiqué par le mandant.
(iii) L’encadrement légal des sollicitations actives de mandat
Aux termes de l’article L. 225-106-2 du Code de commerce, « Toute personne qui procède à une sollicitation active de mandats, en proposant directement ou indirectement à un ou plusieurs actionnaires, sous quelque forme et par quelque moyen que ce soit, de recevoir procuration pour les représenter à l'assemblée d'une société mentionnée aux troisième et quatrième alinéas de l'article L. 225-106, rend publique sa politique de vote.
Elle peut également rendre publiques ses intentions de vote sur les projets de résolution présentés à l'assemblée. Elle exerce alors, pour toute procuration reçue sans instructions de vote, un vote conforme aux intentions de vote ainsi rendues publiques (…) ».
Après avoir défini la notion de sollicitation active de mandat, le législateur a précisé ses conséquences. En outre, celui qui procède à une sollicitation active de mandats (par exemple, les agence de conseil en vote) devra rendre publique sa politique de vote sur son site Internet.
Les éléments devant être rendus publiques sur le site Internet des personnes procédant à sollicitation active de mandats sont précisés par l’article R. 225-82-3 II, III et IV du Code de commerce :
- Pour une personne physique, ses nom, prénom, date et lieu de naissance, domicile ;
- Pour une personne morale, sa forme juridique, sa raison ou dénomination sociale, le montant de son capital social, l'adresse de son siège social, son objet, ainsi que les organes chargés d'instruire et d'analyser les résolutions soumises et ceux chargés de décider des votes qui seront émis.
- Les principes auxquels le mandataire entend se référer à l'occasion de l'exercice des droits de vote correspondant à des procurations reçues sans instructions de vote.
Si le mandataire ne respecte pas l’obligation de rendre publiques les informations précitées, ou si le vote exercé dans un mandat sans intention de vote est contraire à la politique ou aux intentions de vote communiquées par l’actionnaire, alors le mandataire ayant procédé à la sollicitation active se verra interdire de participer à toute assemblée de la société en qualité de mandataire pour une durée de trois ans.