Affaire Combo: Le procureur général de l’Union des Comores a-t-il commis une violation de la présomption d’innocence ?

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Affaire Combo: Le procureur général de l’Union des Comores a-t-il commis une violation de la présomption d’innocence ?

A peine deux mois d’enquête sur le meurtre du Colonel Combo Ayouba, la justice comorienne s’insurge aux commentaires des comoriens l’accusant de l’incompétence dans cette affaire. Rappelons que le colonel Combo Ayouba, a été assassiné le 13 juin  par des inconnus à son domicile de Moroni (capital des Comores). Le colonel Combo Ayouba était  chef de corps au sein de l'Armée nationale de développement (AND), l'armée comorienne, et l'un de ses plus haut-gradés. Originaire de l'île d'Anjouan, considéré au sein de l'état-major plutôt comme un proche du président Sambi, il était l'un des rares anciens membres de la garde présidentielle formée dans les années 1980 par le mercenaire français Bob Denard, encore en activité au sein de l'armée, et à ce niveau de responsabilité. Ainsi donc l’enquête judiciaire semble tenir ses promesses, c’est ce qui prétend affirmer le procureur de la République.

Mais cette affirmation prononcée par ce haut magistrat, semble aux yeux de certains comme une affirmation illégitime voire, une atteinte à la présomption d’innocence.

En l’espèce, le procureur général Nidhoim Attoumani venait de dire lors d’une conférence de presse  « connaitre les meurtriers de Combo ». Y-a-t-il atteinte à la présomption d’innocence ? Que dit le procureur Nidhoim? «  La justice a mis la main sur les meurtriers présumés du Lieutenant Combo Ayouba et qu’il reste maintenant à identifier  et arrêter les commanditaires » Il ajoute encore : « De lourdes charges pèsent sur trois individus interpellés et placés en détention. A leur encontre, ont été réunis des éléments de preuve concordants, circonstanciés et irréfutables de nature à démontrer leur participation directes aux faits incriminés ». Et il termine en rajoutant « Nous ignorons les commanditaires de l’acte mais l’enquête se poursuit. Ces trois militaires bénéficient naturellement de la présomption d’innocence. Le secret de l’instruction ne nous permet pas de relever leur identité. (…) On cherche à savoir ce qui ont donné l’ordre et les moyens pour commettre le méfait ».

Dans ce sens, ces  phrases présentent certains obstacles. Dans la mesure où, le magistrat venait d’affirmer dans un premier temps, « la culpabilité » de certaines personnes présumées innocentes,  comme si ces dernière, leurs culpabilités ont été affirmées par une audience judiciaire. Le procureur Nidhoim, ne pouvait faire dire au juges ce qu’ils n’on pas dit. Aucun esprit éveillé ne peut se laisser tromper. En outre, il venait dans un deuxième sens, affirmer que ces personnes présumées innocentes ont droit au respect de la présomption d’innocence. Ça ne semble pas des arguments juridiques cohérents au sens d’une procédure d’enquête judiciaire.

Que dit le droit ? La présomption d’innocence est édictée comme principe, notamment dans la Déclaration internationale des droits de l’homme de 1948, mais les références les plus opératoires se trouvent dans la loi, notamment comorienne stipulant que, « Toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n'a pas été établie. Les atteintes à sa présomption d'innocence sont prévenues, réparées et réprimées dans les conditions prévues par la loi. »

La présomption d’innocence n’est pas un état. C’est un statut protecteur dans le cadre du procès, et la partie poursuivante cherche à combattre cette présomption simple en exerçant l’accusation. Aussi, la présomption d’innocence n’est pas opposable à la victime, car l’exercice du droit fondamental qu’est le droit d’action devant le juge serait rendu impossible.

Mais le débat sur la culpabilité, et l'immunité reconnue à ceux qui accusent un innocent, c'est pour l'audience. Pas pour des plateaux de conférence. C'est vrai et faux. Le cœur du débat doit avoir lieu dans l'enceinte du tribunal, et sous le contrôle des juges et de la partie adverse, nous sommes d'accord. Mais il y a aussi la liberté d'expression et le bon sens qui, réunis, ont toujours permis à une partie, hors procès ou avant procès, d'y aller de son petit commentaire. Ce n'est pas un drame. Il reste cependant que ce grand écart, légal mais mal expliqué, apparait à beaucoup illégitime.

Espérons que ce rebondissement de cette affaire aille au bout de la logique des choses pour non seulement le bien de la famille de la victime mais également pour le bien de la sécurité des comoriens.

 

Par ISSA SAID

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