FDN attaque un décret indispensable au bon fonctionnement de la Haute autorité. Les opérateurs poursuivent aussi leur bras de fer pour que l'identification des abonnés leur soit remboursée par l'Etat.
FDN récidive. Farouchement opposé à l'Hadopi, le fournisseur d'accès à Internet associatif a annoncé jeudi avoir déposé un second recours en référé devant le Conseil d'Etat, afin de contester la procédure de sanction de l'autorité chargée de lutter contre le téléchargement illégal. D'après la loi votée l'an dernier, la Hadopi doit pouvoir infliger des amendes et couper les accès à Internet des abonnés dont les lignes ont été utilisées pour pirater. Mais les premiers messages d'avertissement n'ont toujours pas été envoyés.
L'attaque de FDN (French Data Network) s'est faite en deux temps. En mai, le fournisseur d'accès a déposé un premier recours pour contester le décret du 5 mars 2010, qui définit la façon dont la Hadopi est saisie par les détenteurs de droits d'auteur et la coopération avec les opérateurs télécoms chargés d'identifier les internautes pirates. Le second recours, envoyé mercredi, porte sur deux articles d'un nouveau décret du 27 juillet, qui prévoit plus généralement la procédure à suivre pour sanctionner le téléchargement pirate.
«Le premier décret aurait dû être soumis pour avis à l'Arcep (le régulateur des télécoms) et il ne l'a pas été», justifie Benjamin Bayart, président du fournisseur d'accès, qui a demandé son annulation pour «vice de forme». Le deuxième décret «s'appuie sur le décret précédent qui est selon nous illégal» et devrait donc lui aussi être annulé, estime-t-il. «Comme l'Hadopi dit vouloir mettre en œuvre la procédure [de sanction] très vite, on a déposé en plus un recours en référé demandant au Conseil d'Etat de suspendre l'application de ce décret le temps qu'on sache si le tout est légal ou pas», explique-t-il. Une décision pourrait être rendue «avant la fin du mois d'août».
Les opérateurs télécoms veulent être remboursés
Du côté de l'Hadopi, on indique ne pas commenter les procédures en cours. Mais on ne manque pas d'occupation, car un autre soucis de taille perturbe le lancement de l'arsenal antipiratage français. En effet, le gouvernement n'a toujours pas trouvé d'accord avec les fournisseurs d'accès sur l'identification des internautes repérés sur les réseaux de «peer-to-peer». L'Hadopi doit leur demander les coordonnées précises de leurs abonnés, en fonction des adresses IP détectées. Or, cette opération risque de prendre du temps et d'être coûteuse, quand le dispositif tournera à plein régime.
Lors de l'installation du collège de la Hadopi, le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, avait prévenu qu'il n'y avait «pas de remboursement prévu par l'Etat». «Notre position n'a pas changé», a affirmé jeudi un porte-parole du ministère. Dans une lettre envoyée fin juillet au ministère et publiée par PC Inpact, plusieurs FAI préviennent qu'ils seront «amenés à facturer […] les pouvoirs publics». Ils justifient leur position en s'appuyant sur une décision du Conseil constitutionnel du 28 décembre 2000, qui prévoit que les dépenses «ne sauraient […] incomber directement aux opérateurs» lorsqu'ils apportent leur concours «à la sauvegarde de l'ordre public, dans l'intérêt général de la population».
Ce courrier a été signé par Bouygues Telecom, Free, Numericable et Orange. SFR, qui ne figure pas parmi les signataires, indique qu'il n'y a «pas de discussions à date et qu'il ne sait pas qui paierait la fourniture des coordonnées par les FAI». Selon la filiale du groupe Vivendi, aux intérêts culturels très marqués, «ce sujet devrait être abordé dans le cadre de la Fédération française des télécoms» (FFT). En septembre 2009, la FFT avait rappelé son engagement dans la lutte contre le téléchargement illégal, tout en soulignant qu'«il appartient à l'Etat d'en financer le dispositif».
Par lefigaro.fr, publié le 12/08/2010 | Mise à jour : 17:28