Le texte originel de l’AUSCGIE fut adopté le 17 avril 1997, lors du conseil des ministres de Cotonou. Ainsi, jusqu’à ce jour, les sociétés commerciales et GIE ont été régit par ce texte. Engagé depuis plus de deux ans, la réforme de l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique a enfin abouti à l'adoption d'un nouvel Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales le 30 janvier 2014 à Ouagadougou et entrera en vigueur le 05 mai 2014. Ce nouvel Acte uniforme a introduit des modifications majeures en droit positif des sociétés OHADA.
Cette réforme vise toutes les formes des sociétés commerciales existantes (SNC, SCS, SARL, SA).
VUE GENERALE DE LA REFORME
A/ La consécration de la validité des pactes d’actionnaires (article 2-1).
Les pactes d’actionnaires ou d’associés sont établis par des conventions spéciales dites « actes extrastatutaires ».
L’AUSCGIE révisé vient donc encadrer les pactes entre associés. Pour autant que leurs conventions ne dérogent pas à l’AUSCGIE ni aux statuts, les associés peuvent au travers ces contrat ad hoc, définir les modalités de leurs relations, la composition des organes sociaux, la conduite des affaires de la société, l’accès au capital social et la transmission des titres sociaux.
Dorénavant, les actionnaires ou les associés peuvent décider de définir la conduite des affaires de la société dans un contrat extrastatutaire tout en respectant les statuts de la société et le droit OHADA. En cours de vie sociale, les associés peuvent toujours modifier ces pactes en fonction des réalités de l’évolution de la société.
Les pactes d’actionnaires peuvent être rédigés sous seing privés.
B/ Le régime juridique de l’apport en industries/la référence de l’apport en industries dans la définition de la société (articles 4, 37, 40, 50-1, 50-20, 50-3, 50-4).
L’AUSCGIE définit le régime juridique de l’apport en industrie et ne le cantonne plus à la simple main d’œuvre. Dorénavant, les statuts décrirons l’apport en industrie et fixerons les modalités de sa libération. Bien que ne concourant pas à la formation du capital social, l’apport en industrie, donnera lieu à l’attribution de titres sociaux ouvrant droit au vote et au partage des bénéfices et de l’actif net. Nonobstant quelques spécificités, la reconnaissance de l’apport en industrie comme un apport à part entière constitue une porte sur l’entreprenariat pour les jeunes congolais. On ne cite plus l’exemple de ce jeune brazzavillois (VMK), créateur de la première tablette tactile africaine. Par le biais de l’apport en industrie, les personnes détentrices d’une idée, d’un network où d’une invention pourrons s’adosser à des investisseurs tout en ayant la qualité d’associées. Ces dispositions sont susceptibles d’ouvrir l’ère des « start-up » O.H.A.D.A.
C/La reconnaissance de la visioconférence et l’Email dans les Assemblées générale et Conseil d’administration (articles 133-1, 133-2, 134).
L’Acte Uniforme révisé institue le cadre juridique du fonctionnement des organes délibérants au sein des sociétés commerciales après la réforme d’où l’admission des convocations des réunions et assemblées par E-mail, tenue des assemblées générales par visioconférence. Les votes par correspondance sont réceptionnés par la société au moins vingt quatre (24) heures avant la tenue de l’assemblée.
La faculté reconnue aux associés de participer aux assemblées par visioconférence est de nature à favoriser l’afflux de capitaux étrangers. Quel que soit le lieu où ils se trouvent, les associés pourront directement être aux prises avec les affaires de la société. La modernité s’exprime également par l’opportunité d’accomplir électroniquement, les formalités relatives aux sociétés.
Toutefois, l’utilisation des nouvelles technologies dans la tenue des AG et CA doit être prévue dans les statuts. Aucune société ne peut utiliser de telles techniques si cela n’est pas au préalable prévu dans les statuts.
Le procès verbal des votes par correspondance ou à distance doit mentionner tout incident technique survenu au cours de l’assemblée et ayant perturbé son déroulement.
D/L’affinement des modalités d’implantation légère à l’international/Succursale et Bureau de liaison (articles 120, 120-1, 120-5).
- La succursale.
La nouveauté apportée par l’article 120 précise que la durée de la succursale de la société étrangère (société mère dont le siège n’est pas située dans l’espace OHADA) est de deux (2) ans après sa création. Le renouvellement de la succursale se fait par dispense accordée par le Ministre en charge du commerce pour une durée de deux (2) ans, non renouvelable. Ce qui fait que la durée de la succursale soit légalement encadrée à quatre (4) ans, alors que dans l’ancien droit OHADA, on peut renouveler la succursale jusqu’à l’infini.
- Le bureau de liaison ou de représentation.
L’une des grandes nouveautés de l’Acte OHADA modifié est la consécration officielle du régime juridique du bureau de liaison. En effet, l’article 120-1 définit le bureau de liaison ou de représentation comme « Un établissement appartenant à une société et chargé de faire le lien entre cette dernière et le marché, n’est pas doté d’une autonomie de gestion et n’exerce qu’une activité préparatoire ou auxiliaire par rapport à celle de la société qui l’a créé ».
L’article 120-4 donne cependant une obligation d’immatriculer le bureau de liaison au registre du commerce et du crédit mobilier.
Ainsi, notre bureau de représentation de Brazzaville doit être immatriculé au registre du commerce de Brazzaville pour éviter les sanctions pénales.
E/Reconnaissance de l’administration provisoire (article 160-1 à 160-8).
Lorsque le fonctionnement normal de la société est rendu impossible, soit du fait des organes de gestion, de direction ou d’administration, soit du fait des associés, la juridiction compétente peut décider de nommer un administrateur provisoire pour une durée de 6 mois renouvelable une fois aux fins d’assurer momentanément la gestion des affaires sociales. Par le biais de cette disposition, l’Acte Uniforme consacre les mesures de traitement des crises interne à la société. C’est donc l’apparition d’une nouvelle figure dans le droit communautaire. Ce nouveau personnage, qui n’est autre que l’administrateur provisoire. Il sera nommé par la juridiction compétente (tribunal de commerce) pour les sociétés dont le fonctionnement normal est devenu impossible.
F/La consécration de la société à capital variable (article 269-1 et suivant).
Il peut être stipulé dans les statuts des sociétés anonymes et sociétés par actions simplifiées que le capital social est susceptible soit d’augmentation par des versements des associés ou l’administration d’associés nouveaux, soit de diminution par la reprise totale ou partielle des apports effectués.
Toutefois, si, la société use de cette faculté, cette circonstance doit être mentionnée dans tous les actes et documents émanant de la société et destinés aux tiers, par l’addition à la forme sociale des mots « société à capital variable ».
Il sied de noter par ailleurs que, toute réduction de capital au-delà de la limite prescrite par les statuts est nulle.
La vraie nouveauté dans ce domaine est certainement l’absence de formalités de dépôt et de publication des actes constatant les augmentations et les diminutions du capital social opérées dans les termes des sociétés à capital variable.
G/Institution des sanctions pénales aux infractions à l’Acte Uniforme.
Le nouvel Acte Uniforme institue des sanctions pénales sans pour autant préciser la nature desdites sanctions. Ce qui signifie que chaque Etat membre de l’OHADA appliquera des sanctions spécifiques.
Ainsi, l’article 890-1 dispose que « Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux qui n’ont pas déposé, dans le mois qui suit leur approbation, les états financiers de synthèse ».
Encourent une sanction pénale, les dirigeants sociaux d’une société étrangère ou la personne physique étrangère dont la succursale, au-delà d’une durée de deux (2) ans, n’a été ni apportée à une société de droit préexistante ou à créer de l’un des Etats parties ni radiée (article 891-2).
Le défaut de nomination du Commissaire aux comptes ou de le convoquer aux assemblées générales constitue également une sanction pénale.
H/ L’instauration d’un nouveau type de société commerciale sans capital social minimum (article 853-1 et suivants)
Le point d’orgue de la réforme de l’Acte Uniforme est incontestablement l’apparition d’un nouveau type de société, à savoir la société par actions simplifiées (SAS).
Ce type de société, peut être constituée par un ou plusieurs associés et dont l’organisation et le fonctionnement sont librement déterminés par les statuts. Liberté, qui cependant, s’exerce dans le respect des règles impératives de l’AUSCGIE. Les associés ne sont responsables des dettes sociales qu’à concurrence de leurs apports.
Nouveautés par rapport à d’autres sociétés existantes:
- Pas de montant minimum du capital social et du montant nominal des actions. Il faut simplement que le montant du capital retenu soit fixé par les statuts (article 853-5) ;
- Le représentant légal de la société porte le nom de « Président ». Toutefois, on peut nommer en dehors du Président, un Directeur Général ou un Directeur Général adjoint ;
- Les statuts de la SAS peuvent prévoir l’exclusion forcée d’un associé qui ne veut pas céder ses actions.
Conclusion :
Les sociétés commerciales constituées avant l'entrée en vigueur de l'Acte uniforme révisé auront deux (2) années pour mettre en harmonie leurs statuts conformément aux modifications introduites par ce nouveau texte. Cette formalité obligatoire s'impose à toutes les sociétés commerciales, y compris celles dans lesquelles l'Etat est actionnaire (unique ou avec d'autres). Elle s'impose également aux entreprises de tous les secteurs, y compris celles régies par les lois et textes particuliers (secteurs minier, énergie, forêts).
L’article 910 dispose que « La mise en harmonie des statuts peut être accomplie par voie d’amendement aux statuts anciens ou par l’adoption de statuts rédigés à nouveau en toutes leurs dispositions. Elle peut être décidée par l’assemblée des actionnaires ou des associés statuant aux conditions de validité des décisions ordinaires (AGO ou AGM), nonobstant toutes dispositions légales ou statutaires contraires à condition de ne modifier, quant au fond, que les clauses incompatibles avec le nouveau droit ».
Si aucune mise en harmonie n’est nécessaire, il en est pris acte par l’assemblée des actionnaires ou des associés dont la délibération fait l’objet de la même publicité que la décision modifiant les statuts (article 913).