Le risque de faillite en cascade et les procédures collectives, dans le contexte de la crise économique liée à la pandémie de Covid-19.

Publié le 25/05/2020 Vu 5 071 fois 1
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Pour faire face à la situation économique liée à la pandémie de Covid-19, et pour renforcer la capacité de résilience des entreprises , les procédures collectives pourraient être une solution.

Pour faire face à la situation économique liée à la pandémie de Covid-19, et pour renforcer la capacité

Le risque de faillite en cascade et les procédures collectives, dans le contexte de la crise économique liée à la pandémie de Covid-19.

Dans le contexte de la crise sanitaire mondiale  liée à la pandémie de Covid-19, le gouvernement a pris des mesures pour lutter contre la propagation du virus en France, à savoir principalement l’application de «gestes barrières » et le «confinement » de la population. Cette dernière n’est pas restée sans retour de manivelle, elle a provoqué une baisse brutale ou cessation d’activité pour  de nombreuses entreprises, donc une crise économique.

Pour faire face à cette dernière crise, et pour renforcer la capacité de résilience des entreprises en difficulté, le gouvernement d’Edouard Philippe a décidé de mettre en place un fond de solidarité permettant le versement d’une aide financière défiscalisée aux entreprises, un dispositif de prêts garantis par l’Etat, le report des principales échéances fiscales, et aussi le mécanisme du chômage partiel  a été mis en œuvre.

Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras ; ces mesures bien qu’elles  soient  à saluer, restent tout de même insuffisantes. Elles viendront simplement  apporter un léger souffle aux dirigeants d’entreprise en difficulté, en reportant ou en allégeant les charges.  Mais le manque à gagner ne saura être comblé  dans cette situation, et avec un chiffre d’affaire lourdement en baisse, les entreprises devront plus tard affronter le cumul des charges. Encore faut-il rappeler que le bénéfice de ces mesures est soumis à des critères d’éligibilité dont toutes ne respectent pas (faut croire que seul les GAFAM restent aujourd’hui inébranlables face à cette crise).

Il existe cependant d’autres solutions pour ces entreprises en difficulté, ce sont des outils du droit qui permettent de traiter les difficultés de l’entreprise afin d’assurer la poursuite de l’activité et la préservation de l’emploi. Le code de commerce met en place dans son LIVRE VI «Des difficultés des entreprises », des procédures adaptées. Dans le contexte économique que  nous avons présenté, la procédure de sauvegarde parait la plus efficace parmi ces outils.

 Pourquoi la procédure de sauvegarde ?

La procédure de sauvegarde se place sur le schéma, entre la procédure de conciliation et le redressement judiciaire. Elle recoupe certaines caractéristiques de part et d’autre.

 La procédure de conciliation n’est pas une procédure collective stricto sensu. Il ne s’agit pas d’une mesure juridictionnelle de traitement des difficultés mais d’une procédure amiable, ce qui signifie qu’aucune des parties ne peut être forcée d’y participer. Finalement, il s’agit plus d’un processus de conciliation en vue de trouver un accord amiable entre le débiteur et ses créanciers. Cette procédure reste louable, car souple et confidentielle pour l’essentiel. Son inefficacité viendrait de la réticence de certains créanciers, qui  ne consentent  à un accord pouvant  être intéressant pour le débiteur. A ce niveau la sauvegarde pourrait révéler son efficacité.

La procédure de sauvegarde est une évolution qui résulte de la loi du 26 juillet 2005. C’est une procédure collective à l‘instar du redressement et de la liquidation judiciaire, autrement dit elle est placée entièrement sous le contrôle du tribunal et elle impose à tous les créanciers une discipline collective qui leur interdit d’agir en paiement contre le débiteur.

Donc  concrètement, elle a pour  avantage de forcer en faveur du débiteur le consentement des créanciers exigeants. Techniquement, le mécanisme du prepack  plan serait adapté si on part d’une conciliation qui n’aboutit pas à la signature d’un accord. En effet, au stade de la conciliation, on essaie d’obtenir un accord amiable.  La majorité des créanciers est favorable à cet accord mais certains créanciers refusent de le signer. Dans une telle hypothèse, on peut basculer en procédure de sauvegarde pour que le tribunal impose, sous la forme d’un plan (prepack plan), ce qui avait été au départ prévu comme un accord amiable.  Il s’agit là d’une sauvegarde accélérée qui a pour avantage son court délai (1 à 3 mois). Néanmoins elle est soumise à des conditions étroites :

·         dépassement des seuils légaux de 20 salariés,

·         3 000 000€ de chiffre d’affaires hors taxe

·          1 500 000€ pour le total du bilan

Cette procédure  accélérée est aussi ouverte, indépendamment de ces seuils, aux entreprises qui ont établi des comptes consolidés (C. com., art. L. 233-16).

En revanche dans le cadre d’une procédure de sauvegarde ordinaire ouverte à toutes les entreprises qui n’étant pas en cessation de paiement rencontrent des difficultés insurmontables (art. L.620-1 Code de commerce), les délais s’étendent sur une période de 6 mois renouvelable sans dépasser 18 mois au maximum.

Donc en général, la procédure  de sauvegarde a l’avantage sur la conciliation de pouvoir s’imposer aux créanciers, et l’avantage sur le redressement judiciaire de soustraire le débiteur à de nombreuses contraintes judiciaires. En sauvegarde, le chef d’entreprise est assuré de rester à la tête de son entreprise, au pire il va être assisté par l’administrateur judiciaire. Le chef d’entreprise n’est pas écarté de la direction de son activité comme ce peut être le cas en redressement, de surcroit ce sont  les actions en responsabilité et les sanctions contre lui qui sont mises à l’écart.

Par ailleurs si cette procédure peut aider efficacement les entreprises à surmonter les difficultés dans cette période de crise, il parait judicieux pour le juriste-conseil de s’autoriser un autre angle de vue. Car l’essentiel des relations entre les agents économiques peut se représenter dans un circuit économique qui montre les interdépendances entre ces agents. Les créanciers des uns pouvant être les débiteurs des autres, si ces outils du droit parviennent à sauver des entreprises c’est parfois au  péril de l’activité de certaines autres (les créanciers fournisseurs).

Et ainsi pourrait se déclencher une faillite en cascade, surtout quand on s’aperçoit suite à la crise  les aménagements légaux prorogeant les délais et les durées des procédures. Notamment la circulaire du 30 mars 2020 venue préciser le champ d’application des ordonnances des 25 et 27 mars 2020 relatifs aux  délais et durées afférents au droit des entreprises en difficulté. Ces prolongations pourront justifier, le cas échéant, un rééchelonnement des échéances de remboursement de dettes comprises dans le plan de sauvegarde ou de redressement devenues exigibles après le 12 mars 2020 et ce jusqu’à l’expiration d’un délai de 3 mois suivant la fin de l’état d’urgence sanitaire et de 5 mois sur demande de l’administrateur judiciaire.

En somme s’il arrive que certaines entreprises retrouvent une santé financière grâce à ces outils du droit, le risque d’une faillite en cascade n’est pas écarté dans le circuit économique.

C’est dans ce sens que le Professeur F-M  SAWADOGO[1] écrivait que « l’histoire mouvementée du droit  des procédures collectives … amène à conclure à une relative incapacité du droit à juguler les difficultés des entreprises et à assurer un paiement satisfaisant des créanciers ».

 



[1] Le professeur Filiga-Michel Sawadogo est agrégé des facultés de droit, professeur titulaire à l’UFR Sciences juridiques et politiques de l`Université Ouaga II.

 

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1 Publié par FALE
27/05/2020 15:45

Belle analyse
L'on pourrais se poser quelques questions :
1_ Toutes les entreprises ont elles le même degré de risque de faillite ?
2_ Les mesures d'accompagnement actuelles et projetées sont elles fonctions du domaine d'activité ?
3_ Que pourrait proposer la juridiction pour éviter les disparités entre les entreprises en fonction du domaine d'activité.

NB : Gardons à l'esprit que des secteurs ont vus accroître leurs activités au cours de cette pandémie qui d'ailleurs continue à ce jour !!!!!

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