Guy VIGNERON face à l'exercice illégal du métier de syndic pro

Publié le Modifié le 02/03/2023 Vu 2 589 fois 0
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Ancien adjoint au directeur juridique de la SNCF, Guy VIGNERON fut l'un des intervenants majeurs de la doctrine en copropriété. Il a beaucoup étudié les syndics. Cela nous amène à nous demander qui exerce illégalement ce métier.

Ancien adjoint au directeur juridique de la SNCF, Guy VIGNERON fut l'un des intervenants majeurs de la doctrin

Guy VIGNERON face à l'exercice illégal du métier de syndic pro

La doctrine sur de bon rails

Il est intéressant d'évoquer la doctrine juridique, c'est-à-dire les travaux publiés dans des revues dont la direction scientifique est exercée par un organisme de formation ou enseignant du supérieur. Dès lors, il convient à présent de rendre hommage à Guy VIGNERON. Celui-ci a tenu durant 30 ans la chronique jurisprudentielle au sein de Loyers et copropriété (revue célèbre éditée par LexisNexis et dont le directeur scientifique est l'universitaire Joël MONEGER).

Guy VIGNERON avait un profil atypique, puisqu'il fut adjoint au directeur juridique de la SNCF (voir Joël MONEGER, "Le dernier voyage de Guy Vigneron 1924-2019", Loyers et copropriété, février 2019, p. 1). Cela ne l'empêchait pas d'avoir énormément écrit d'articles sur la copropriété.

Guy VIGNERON a longtemps collaboré au jurisclasseur, une véritable encyclopédie juridique. De grands spécialistes ont d'ailleurs loué le  savoir réellement encyclopédique de Guy VIGNERON, associé à son goût de l'explication simple .

 

Un spécialiste des syndics

Guy VIGNERON a rédigé un ouvrage indispensable pour toute personne qui exerce le métier de syndic professionnel (Guy VIGNERON, Christelle COUTANT-LAPALUS, Le Syndic de copropriété, collection Droits & professionnels, LexisNexis, 7ème édition, 2021, 40 €).

Le livre a été mis à jour en 2021 par Christelle COUTANT-LAPALUS, avec laquelle Guy VIGNERON avait tenu sa chronique jurisprudentielle au sein de Loyers et copropriété en 2016, avant de lui transmettre le flambeau. Elle tient actuellement cette chronique en binôme avec Agnès LEBATTEUX (Joël MONEGER, Christine LEBRUN, "Le train sifflera trois fois : un départ, deux arrivées", Loyers et copropriété, janvier 2017, pp. 1 et 2).

Dans l'ouvrage de Guy VIGNERON et Christelle COUTANT-LAPALUS relatif aux syndics, il est rappelé (point 18, page 10) que l'exercice à titre professionnel de ce métier nécessite une carte professionnelle. A défaut, le contrevenant s'expose à 6 mois d'emprisonnement et 7 500 € d'amende (article 14 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 modifiée).

Quelques textes spéciaux autorisent certaines professions réglementées ou certains organismes agréés à être syndics professionnels, et notamment les avocats (article 6.3 de leur Règlement Intérieur National), les géomètres-experts (article 8-1 de la loi n° 46-942 du 7 mai 1946 modifiée), les huissiers (article 20 du décret n° 56-222 du 29 février 1956 devenu article 29 du décret n° 2021-1625 du 10 décembre 2021 relatif aux commissaires de justice) et les organismes HLM  quand ils sont institués syndics de par la loi (article L. 443-15 du Code de la Construction et de l'Habitation).

 

L'irruption des prestataires disruptifs

Que penser d'une start-up qui fait, à grand battage, de la publicité pour "remplacer" les syndics pros sans pour autant disposer de la carte professionnelle concernée ?

Le 24 janvier 2022, le Tribunal de Commerce de Paris (lien) a estimé que les pratiques de cette start-up constituaient une publicité trompeuse, et a condamné pour cela la start-up. Cette dernière, après avoir prétendu avoir gagné ce procès, a finalement fait appel... La Cour d'appel de Paris tranchera concernant ces pratiques publicitaires.

On comprend l'agacement des syndics pros, d'autant que la ministre du Logement a prétendu publiquement que la start-up, dont elle était venue visiter les locaux, "gérait" 3000 copropriétés.

Emmanuelle Wagon chez la start-up en question

Un allié de Matera qualifie même cette dernière de "syndic" (lien).

Pourtant, Matera, que le présent blog ne soutient aucunement, n'exerce probablement pas l'activité de syndic à titre illicite. Elle fournit juste des prestations aux syndics non professionnels, activité dont Guy VIGNERON avait fait l'analyse.

 

Absence d'intermédiaires

Guy VIGNERON encourageait, toutefois, plutôt la constitution d'unions coopératives de services (voir Jurisclasseur, formulaire notarial, fascicule 177, 2005, formulaire d'administration de la copropriété).

Ces structures étaient alors régies par l'article 42-2 du décret du 17 mars 1967. Elles visaient à fournir des services aux syndics coopératifs sans pour autant disposer de la carte professionnelle. L'exception à la détention d'une carte professionnelle se justifiait par le fait que des non professionnels bénéficiaires des services produits contrôlaient la structure sans intermédiaire.

Ce modèle a été repris dans les unions de services régies par l'article 93 de la loi ENL (n° 2006-872 du 13 juillet 2006), d'ont l'accès est ouvert aux syndics bénévoles non coopératifs et aux dirigeants d'ASL.

Ces exceptions se justifient par le fait que des individus peuvent gérer directement leurs affaires sans avoir besoin d'une carte professionnelle. Le modèle de Matera, toutefois, n'a rien à voir avec cela.

Concernant l'exercice de l'activité de syndic pro, il est donc temps de limiter les exceptions permettant d'échapper à l'exigence d'une carte professionnelle.

Ces exceptions ne doivent concerner que les structures qui sont directement gérées par les bénéficiaires des services proposés. Les unions coopératives, unions de services, sociétés coopératives et HLM coopératifs peuvent logiquement être syndics sans cartes.

Pour TOUS les autres, il faut obliger la détention d'une carte (et cela vaut pour les avocats, les géomètres experts et les commissaires de justice). Des organismes HLM ont déjà leur carte et montrent le bon exemple. Chaque prestataire commercial doit accepter les mêmes contraintes que ses concurrents. C'est là une question de loyauté.

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