1) Imaginons une situation de la vie courante
Le fils de Madame L. est inquiet car depuis plusieurs mois la maladie dont souffre sa mère âgée de 91 ans la rend incapable de défendre ses intérêts.
De plus, sa sœur dont la famille n’avait plus aucune nouvelle depuis 10 ans s’est soudainement manifestée et bénéficie depuis peu d’une procuration sur les comptes bancaires de sa mère (pensions de retraite, portefeuille d’actions et assurance vie).
Question : Comment Monsieur L. peut-il protéger sa mère ?
2) Réponse de l’avocat
Le besoin de protection doit résulter d’une altération des facultés mentales ou physiques liée à un problème médical.
L’organisation de cette protection judicaire est différente selon qu’il s’agit d’une mesure d’assistance (on parle alors de « curatelle » ou d’une mesure de représentation (dite « tutelle »).
L’ouverture d’une tutelle se fait lorsque la personne n’est plus du tout en état ni de s’occuper seule de ses affaires, ni même de comprendre pour le faire avec l’aide d’une autre personne et doit être représentée dans tous les actes de la vie civile.
Madame L. a simplement besoin d’être assistée ou contrôlée dans les actes importants de la vie civile (prélèvements de sommes importantes, vente d’un bien immobilier, placements etc..).
La curatelle dite « simple » lui apportera une aide ponctuelle afin d’empêcher la dilapidation de son patrimoine et lui permettra de continuer à gérer seule et librement ses revenus.
Si le juge des tutelles estime que Madame L. a besoin d’une aide permanente, y compris pour les actes courants il prononcera une mesure de curatelle renforcée après avoir vérifié que celle-ci n’est pas « apte à percevoir ses revenus et à en faire une utilisation normale » (Cass. 1re civ., 29 févr. 2012, n° 10-28.822).
Les pouvoirs renforcés du curateur consistent à gérer les revenus de la personne protégée : il paie les factures, lui remet le surplus et les actes importants nécessiteront leurs deux signatures.
Monsieur L. présentera donc une requête au juge des tutelles (tribunal d’instance du domicile de la personne à protéger) sur papier libre accompagnée d’un certificat médical circonstancié émanant d’un médecin agréé (la liste peut être obtenue au greffe du tribunal d’instance ou auprès du procureur de la République).
Après avoir vérifié la nécessité de la mesure et entendu la personne protégée (si sa santé le permet), le juge ordonnera, en considération des éléments médicaux, la mesure la plus adaptée.
Le juge devrait privilégier la désignation d’un proche de Madame L. pour exercer la mesure de protection, cependant en raison du contexte familial tendu, il choisira certainement un curateur professionnel (MJPM)*.
Enfin si Monsieur L. ne parvenait pas se procurer le certificat médical circonstancié, il pourra toutefois signaler la situation de danger (par LRAR) au Procureur de la République (tribunal de grande instance).
Claudia CANINI, Avocat à la Cour
CNC MJPM (Certificat National de Compétence de Mandataire Judiciaire à la Protection des Personnes)
*Article rédigé pour la Revue mensuelle CAPITAL : Rubrique Capital Pratique : "Vos droits" Octobre 2012