Addentum à notre étude publiée sur ce blog
Un arrêt récent, largement publié, précise l'incidence de la liquidation judiciaire d'une entreprise sur les obligations d'un ancien salarié lié par une clause de non-concurrence.
Ainsi qu'il l'a déjà été rappelé sur ce blog, tout salarié doit, pendant l'exécution de son contrat de travail, respecter une obligation de non-concurrence. Cela n'a pas à faire l'objet d'une stipulation spécifique : il s'agit d'une application de l'impératif de bonne foi qui gouverne les relations de travail (art. L.1222-1 du Code du travail).
Cependant, les parties peuvent décider, par voie de stipulation, de prolonger l’obligation légale de non-concurrence pour la période postcontractuelle - ainsi, l’employeur aura la certitude que son ancien salarié ne le concurrencera pas.
Depuis trois arrêts du 10 juillet 2002, une « clause de non-concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace, qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives ».
L'arrêt du 21 janvier 2015 pose un problème intéressant, puisqu'inédit (ce qui explique que l'arrêt, lui, ne le soit pas). Qu'advient-il de cette obligation conventionnelle lorsque l'entreprise a cessé son activité (en l'espèce, en raison d'une liquidation judiciaire) ?
Il aurait été légitime de considérer que compte tenu de la perte d'objet de l'obligation, elle eût été jugée caduque. En effet, de facto, le fait que le travailleur occupe un nouvel emploi susceptible de concurrencer l'activité d'une entreprise disparue ne causerait aucun préjudice à cette dernière puisqu'elle n'existe plus !
Tel n'est pourtant pas la solution retenue par la Cour de cassation, qui, au visa de l'article 1134 du Code civil, estime que "la clause de non-concurrence prenant effet à compter de la rupture du contrat de travail, la cessation d'activité ultérieure de l'employeur n'a pas pour effet de décharger le salarié de son obligation de non-concurrence".
Une solution fondée avant tout sur la force obligatoire des conventions légalement formées (l'alinéa premier de l'article susvisé), mais largement teintée par l'impératif de bonne foi. Tant que la contrepartie financière est versée, le salarié est tenu par son engagement.