I. - L'auteur intellectuel ou l'auteur inspirateur
« l’auteur intellectuel » de l’œuvre est titulaire des droits d'auteur portant sur l'œuvre lorsque ses directives sont très précises et expriment une personnalité (affaire Renoir-Guino : Cass. 1, 13 novembre 1973, D. 1974, Jurisp. p. 533, note C. Colombet).
Certains auteurs (V. Laure Benabou, Pourquoi une œuvre de l’esprit est immatérielle, Revue Lamy Droit de l’immatériel, janvier 2005, p. 55) insistent sur l'aspect « intellectuel » ou « immatériel » de l'œuvre visée par l'article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle, en rappelant que celle-ci peut bénéficier d'une protection avant même sa réalisation. L'œuvre de l'esprit est notamment « l'idée de sa création » pouvant d'abord « consister en une manière d'élaborer une œuvre, une méthode de réalisation » (affaire Renoir-Guino). Selon le même auteur, l'œuvre de l'esprit « ne se limite pas à un résultat statique mais est une construction dynamique mise en mouvement par l'idée », ce indépendamment du fait, non contesté, qu'une œuvre ne peut être « reconnue comme telle que si elle est fixée ».
Ainsi, lorsqu'un bâtiment est édifié par un entrepreneur de travaux sous la direction d'un architecte, concepteur de l'immeuble, l'auteur est l'architecte et non l'entrepreneur de construction.
II. - L'auteur réalisateur
L'idée de protection d'une œuvre de l'esprit est traditionnellement liée à sa réalisation, fût-elle inachevée (article L. 111-2 CPI). La Cour de cassation décide, en effet, que « la protection de l'idée comme œuvre de l'esprit suppose la création de l'œuvre par la réalisation, même inachevée, de la conception de l'auteur »[1].
La jurisprudence appliquant les dispositions de l'article L. 111-2 du code de la propriété intellectuelle décide constamment que l'ébauche, l'esquisse, le travail préparatoire est protégé en tant qu'œuvre inachevée. Ainsi, par exemple, de maquettes d'une construction monumentale[2].
L’activité créatrice et, par conséquent, la qualité d’auteur se déduit notamment de la réalisation de l’œuvre ou, à tout le moins, de la participation à sa réalisation.
La Cour d’appel d’Aix en Provence a décidé que :
« …la protection légale est accordée non seulement à l’élément purement formel d’une œuvre mais encore aux éléments originaux qui en forment la structure ». En d’autres termes, « toute création résultant d’un travail personnel de l’esprit et de l’intelligence et constituant une production originale soit par la forme, soit par le fond bénéficie de la protection assurée par la loi… »[3].
L'acte de création, acte complexe et protéiforme, a, nous le voyons, un double aspect et ne peut être réduit ni à son aspect immatériel, intellectuel, ni à la réalisation de l'oeuvre ou de la contribution "matérielle" à une oeuvre plurale.
Pascal ALIX
Avocat à la Cour
[1] Cass. Civ. 1, 17 octobre 2000, pourvoi n° 97-20820, Bull. I, n° 248
[2] Cass. Civ. 1, 8 janvier 1980, D. 1980, 83, note Edelman
[3] Cour d’appel d’Aix en Provence, 13 janvier 1958, rev. trim. dr. com.