Licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement : la procédure

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Le licenciement pour inaptitude obéit à des règles très strictes, dont l’objet est notamment de rechercher le reclassement du salarié inapte. L’employeur doit observer scrupuleusement ces règles, sous peine de voir le licenciement du salarié jugé sans cause réelle et sérieuse.

Le licenciement pour inaptitude obéit à des règles très strictes, dont l’objet est notamment de recherch

Licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement : la procédure

1. Constat de l’inaptitude

 

a) Rôle du médecin du travail

Le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude du salarié à son poste qu'après deux examens médicaux espacés de deux semaines (article R. 4624-31, 3° du Code du travail).

Par exception, l'inaptitude peut être constatée après un seul examen médical, si le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité, ou celle de tiers (article R. 4624-31, alinéa 1er du Code du travail).

 

b) Rôle de l’employeur

S’il appartient au médecin du travail de se prononcer sur l’aptitude du salarié, l’employeur se doit néanmoins d’être vigilant.

En effet, si l’avis du médecin du travail est irrégulier ou ambigu, le licenciement du salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse, voire nul.

A titre d’exemple, le licenciement prononcé alors que le délai minimum de 15 jours entre les deux examens médicaux n'est pas respecté est nul (Cass. soc. 20 septembre 2006 n° 05-40241).

De même, dans les cas où l’inaptitude peut être prononcée à l’issue d’un seul examen, la seule mention de l'article R. 4624-31, alinéa 1er dans l'avis d'inaptitude ne suffit pas à caractériser le danger immédiat.

Par conséquent, en présence de tels avis, il appartient à l’employeur de se rapprocher du médecin du travail, afin que l’aptitude soit régulièrement constatée.

 

2. Reclassement du salarié inapte

a) Objet du reclassement

Il résulte de l’article L. 1226-2 du Code du travail que lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur doit lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités.

Les propositions de l’employeur doivent prendre en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.

Lorsque le médecin du travail conclut à l'inaptitude du salarié à tout emploi dans l'entreprise, l'employeur est néanmoins tenu de rechercher une possibilité de reclassement.

Dans le cas contraire, le licenciement du salarié pour inaptitude et impossibilité de reclassement est dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 28 octobre 2009, n° 08-44253).

Par ailleurs, si l’avis d’inaptitude n’est pas assorti de propositions de reclassement, l’employeur doit solliciter le médecin du travail pour obtenir toutes précisions utiles quant aux conditions de travail permettant le reclassement.

S’il ne le fait pas et licencie le salarié en se contentant de l’avis d’inaptitude, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse (cass. soc. 22 octobre 1996, n° 93-43787).

L'emploi proposé au salarié doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

 

b) Etendue du reclassement

La recherche du poste de reclassement doit s’effectuer au niveau de l’entreprise et de ses établissements.

Par ailleurs, si l’entreprise appartient à un groupe, l’employeur est tenu d’effectuer cette recherche parmi les entreprises du groupe dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation lui permettent d’effectuer la mutation de tout ou partie du personnel (Cass. soc. 10 mars 2004, n° 03-42744).

Enfin, il importe de préciser que les recherches de reclassement doivent être effectives et sérieuses.

Ainsi, si l'employeur se contente d’envoyer des lettres de pure forme à des filiales du groupe auquel il appartient et procède au licenciement du salarié avant d'avoir eu les réponses de certaines des filiales, le licenciement sera jugé sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 31 mai 2007 n° 06-41055).

 

c) Cas particulier de l’inaptitude consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelles

Lorsqu’un salarié est déclaré inapte à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, l’employeur est tenu de lui proposer un poste de reclassement, compte tenu des conclusions du médecin du travail et après avis des délégués du personnel (article L. 1226-10 du Code du travail).

L’avis des délégués du personnel doit être recueilli avant le licenciement et après le second examen médical effectué par le médecin du travail, c’est-à-dire à l’issue de la déclaration d’inaptitude (Cass. soc. 8 avril 2009, n° 07-44307).

Il convient de préciser que les délégués du personnel doivent être consultés, même lorsque l’employeur invoque une impossibilité de reclassement (Cass. soc. 11 juin 2008, n° 06-45537).

 

3. Notification du licenciement

a) Délai

L’employeur dispose d’un mois à compter de la déclaration d’inaptitude pour trouver un poste de reclassement.

Si, à l’issue de ce délai, aucun poste n’a été trouvé ou si le salarié l’a refusé, l’employeur doit licencier le salarié ou reprendre le versement du salaire correspondant à l’emploi que le salarié occupait avant son absence pour maladie (article L. 1226-4 du Code du travail).

Le délai d’un mois court à compter de la date du second examen (Cass. soc. 6 février 2008, n° 06-45551).

Par exception, lorsque le médecin du travail déclare un salarié inapte au terme d’un unique examen, en raison d’une situation de danger immédiat, le délai court à compter de cet unique examen (Cass. soc. 6 février 2008, n° 06-45551).

 

b) Forme

Comme pour toute procédure de licenciement, il convient de convoquer le salarié à un entretien préalable à son éventuel licenciement, au moins cinq jours ouvrables avant la tenue de l’entretien.

La notification du licenciement ne peut intervenir avant l’expiration d’un délai de deux jours ouvrables après l’entretien.

S’agissant de la motivation du licenciement, l’employeur doit mentionner dans la lettre de licenciement l’inaptitude du salarié et indiquer l’impossibilité dans laquelle il est de trouver un poste de reclassement dans l’entreprise compatible avec l’état de santé du salarié, aucune mutation, transformation ou aucun aménagement de poste n’étant réalisable.

La référence à l’impossibilité de reclassement dans un poste compatible avec le certificat médical dressé par le médecin du travail suffit à motiver la lettre de licenciement (cass. soc. 31 janvier 2006, n° 05-41188).

En revanche, « l’inaptitude physique du salarié », sans mention de l’impossibilité de reclassement, ne constitue pas l’énoncé d’un motif précis de licenciement (cass. soc. 9 avril 2008, n° 07-40356).

 

4. Indemnités dues au salarié

 

a) Indemnité de licenciement

En cas de licenciement pour inaptitude, le salarié peut percevoir l’indemnité légale de licenciement ou l’indemnité conventionnelle, si elle est plus favorable.

Par ailleurs, le licenciement d’un salarié inapte à la suite d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail ouvre droit à l’indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l’indemnité légale de licenciement (article L. 1226-14 du Code du travail).

 

b) Indemnité de préavis

Le salarié inapte à reprendre l’emploi qu’il occupait ne peut pas prétendre à une indemnité de préavis pour cette période qu’il est dans l’impossibilité d’exécuter (cass. soc. 20 novembre 2001, n°  99-40954).

En revanche, une indemnité d’un montant égal à l’indemnité légale de préavis est due au salarié devenu inapte à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle (article L. 1226-14 du Code du travail).

En conclusion, la procédure du licenciement pour inaptitude est particulièrement formaliste, et l’employeur doit la respecter scrupuleusement, à supposer bien sûr qu’il ne soit pas parvenu à reclasser le salarié inapte.

 

Xavier BERJOT

Avocat Associé

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1 Publié par Visiteur
23/08/2010 15:24

Il semblerait qu'il manque cette info assez récente pour être complet

Depuis le 1er juillet 2010, le salarié déclaré inapte reçoit une indemnité temporaire d'inaptitude durant un mois, du même montant que l'indemnité journalière versée par ...les caisses de sécurité sociale. La durée du versement correspond au délai accordé à l'employeur pour décider soit du licenciement, soit du reclassement du salarié inapte, et au cours duquel aucune rémunération n'est due.

2 Publié par JEAN S
23/08/2010 15:27

Cordialement

3 Publié par Xavier Berjot
23/08/2010 15:43

Cet article est relatif à la "procédure" et c'est la raison pour laquelle cette indemnité n'était pas abordée.

Il faut préciser que l'indemnité temporaire d'inaptitude n'est pas due en cas d'inaptitude non professionnelle.

4 Publié par JEAN S
23/08/2010 16:46

Merci de votre réponse et de la précision qui je dois l'avouer m'avait échappée.
Je m'intéresse au droit mais ne suis qu'un amateur

5 Publié par iolithe
03/09/2010 00:13

bonjour à tous
je suis actuellement en arret de depression suite une violence que j'ai reçu au travail,j'ai vu deja mon medecin du travail,et elle me proposée de voir un psy et des traitement. là le medecin de travail m'appelle pour me dire elle va me mettre en inapte. et mon patron va me faire un reclassement. puis j'ai reçu un appel de mon patron. il m'a dit il ne veut pas faire une procedure, ça le fait perdre 10 à 12 semaine,et il me proposer dans un autre magasin,mais il veut revoir mon contrat,mon poste,et le salaire. tout ça je peux accepter,mais là fin de la conversation, il me demande de faire une demission,et il me donnera un autre contrat dans les heures qui suit.
ma question, est ce que ,quand on est en inaptitude, on doit refait un autre contrat, et forcement diminuer le salaire? si je ne suis pas d'accord, est ce que je suis en tort?
merci de votre reponse.

6 Publié par Visiteur
07/09/2010 09:53

Pourriez-vous m'indiquer ce qui est pris en compte pour le calcul de l'indemnité de licenciement pour impossibilité de reclassement suite à une inaptitude consécutive à un accident du travail.

7 Publié par Xavier Berjot
07/09/2010 10:18

Bonjour,

Je ne suis pas en mesure de répondre à des questions personnalisées sous forme de réponses à des commentaires.

Vous pouvez me joindre par email :

berjot@jbv-avocats.com.

Cordialement,


Xavier Berjot

8 Publié par Visiteur
22/12/2010 10:59

Merci pour ce déroulé de procédure particulièrement clair et précis.
Cordialement

9 Publié par Visiteur
15/10/2011 14:18

Bonjour,
J'ai repris mon travail après 3 années d'arrêt de maladie en Juin 2011(en 2008 j'ai été reconnu en maladie professionnelle et travailleur handicapé).
Mon employeur m'a placé en juin 2011 sur un autre poste complètement différent d'avant mon arrêt sans même avoir au préalable demandé l'avis du médecin du travail pour faire une étude de poste.
Après l'intervention de l'inspection du travail il a été dans l'obligation de respecter la loi et de faire les démarches normales de reclassement professionnelle. J'ai donc eu mes deux visites médicale et déclaré inapte à ce nouveau poste qui m'avait été imposé par mon employeur. A la suite de ma déclaration d'inaptitude un délai de deux mois s'est passé ( toute la procédure a été respecté). Mon employeur m'a envoyé une lettre recommandée où il y stipulait qu'il était dans l'obligation de me licencier compte tenu du fait qu'il était dans l'impossibilité de me reclassement et compte tenu de mon refus du poste qui m'a été proposé.
J'ai reçu une seconde lettre AR de convocation à un entretien préalable d'un éventuel licenciement. Je m'y suis rendu seul, durant l'entretien qui s'est bien passé mon employeur m'a expliqué ce pourquoi j'étais convoqué.
- Licenciement pour non possibilité de reclassement et refus de ma part au poste qui m'a été proposé.( il m'a donc énuméré tous ce dont je devais toucher - indemnité de licenciement pour inaptitude suite à une maladie prof; indemnité de trois mois de préavis non effectué et payé; congé payé restant; dif.
Un mois après je n'avais toujours aucune nouvelle de mon employeur je l'ai donc appelé.
Il m'a dit qu'il faisait des démarches pour me proposer un autre poste et qu'il réfléchissait au fait de ne plus du tout me licencier.
Ses démarches sont les suivantes: Demande de budgéter une création de poste en Novembre, proposition et étude de poste auprès du médecin du travail et ensuite une proposition me serait faite.
Aujourd'hui depuis la fin juin 2011 je ne fais plus rien et suis dans l'obligation d'attendre que mon employeur daigne faire une quelconques démarches.Suite à ce qui m'avait été ennoncé et expliqué pendant l'entretien préalable de licenciement , j'ai tout de suite après fait des démarches de recherche d'emploi pour ne pas me retrouver au chomage et j'ai eu des propositions de postes très intéressantes.
Mes questions:
- Mon employeur a t-il le droit de me laisser dans l'attente indéfiniment , A t-il le droit de disposer de moi de cette façon sachant que cette situation dure depuis maintenant quatre années, peut il me faire espérer un reclassement qui je le sais par des preuves écrites (mail), n'a nullement l'intention de le faire. Il ne le fait que dans un but bien précis : Ne surtout rien payer à son employé ( qui a une ancienneté de 30 années).
Moi je ne souhaite surtout pas revenir dans cette société et souhaite qu'il me licencie car durant ces quatre années il n'a fait que me mettre des bâtons dans les roues et ne sais jamais réellement occupé de moi ni même de mon reclassement. Une seule chose importe pour lui : que je démissionne pour ne rien à avoir à payer....
AIDEZ MOI SVP....Je n'en peux plus et je pense que je fais terminer par craquer moralement.

10 Publié par Visiteur
17/01/2012 16:23

Bonjour Maître,
Je viens d'être licencié suite à une inaptitude de poste. J'ai refusé un reclassement lequel n'a pas été étudié par le médecin du travail. Mon employeur m'a convoqué à un entretien préalable de "sanction pouvant aller jusqu'au licenciement", mais sans plus de détails. Pendant l'entretien il n'a pas voulu parler directement de licenciement, se contentant de revenir sur ses efforts de reclassement infructueux. Quelques jours plus tard j'ai reçu ma lettre de licenciement pour "cause réelle et sérieuse", m'informant que je serais payé deux mois de préavis, et non pas l'indemnité de préavis. Egalement que je recevrais les documents obligatoires à la fin des deux mois.
Mon employeur n'a pas consulté les délégués de personnel avant de me proposer un reclassement. Il a demandé, mais pas attendu, l'avis du médecin du travail sur le poste de reclassement proposé.
Je demande où j'en suis exactement? Licencié ou non? Sanctionné ou non? Auriez-vous l'amabilité d'éclaircir cet action lequel semble d'être assez fréquent si on lit ce que dit beaucoup de blogueurs en cherche d'aide?

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