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Bonjour,
Je suis co-fondateur d'une startup en Irlande, que j'ai quitté il y a 2 ans. À mon départ, j'ai vendu mes parts à mon co-fondateur à leur valeur nominale en contrepartie d'un contrat entre nous qui me promet le versement d'un montant calculé en fonction de l'argent reçu en cas de sortie de la société. Ceci car ni lui ni la société ne pouvait m'acheter mes parts (que je ne voulais pas vendre à faible montant après 7 ans dans la société), et une nouvelle levée de fonds devenait difficile si j'apparaissais comme actionnaire passif sur la cap table.
Aujourd'hui mon co-fondateur souhaite transférer ses parts dans une holding, mais le contrat que nous avons signé le bloque. Pour cela, il propose de me racheter le contrat qui me convient, c'est à dire une offre financière pour résilier notre accord.
Sa résidence fiscale est en irlande, la mienne en France. Quel serait le barème d'imposition appliqué en cas de transfert d'argent de lui vers moi dans le cadre du rachat de ce contrat ? Je n'arrive pas à comprendre si ça serait perçu comme une donation entre deux personnes non liées imposée à 60%, ou alors un revenu lié à la vente originale de mes actions dans la société et au contrat mis en place au même moment avec mon ancien co-fondateur, et donc une imposition plus basse.
Je vous remercie pour vos indications, j'espère avoir donné assez de précisions.
Bonjour Pattone,
Vous avez vendu vos parts à la valeur nominale lors de votre départ d'Irlande, il y a 2 ans dites-vous. Vous n'avez donc alors réalisé aucune plus-value. Si je comprends bien, dans le contrat de cession ou par acte séparé concomitant à la cession, il a été prévu un complément de prix dont les conditions de calcul et de règlement ne sont pas, à ce stade de la discussion clairement définies.
On peut d'emblée, écarter la qualification de donation évoquée à propos des sommes que vous pourriez recevoir dans le prolongement de la cession de votre participation. En effet, pour qu'il y ait donation taxable aux droits de mutation à titre gratuit, il faut que les critères de la donation soient réunis au sens de l'article 894 du code civil qui prévoit que "La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l'accepte". Or, ici, l'intention libérale n'existe manifestement pas, les sommes reçues étant la contrepartie de la cession des titres.
Au vu des éléments sommaires fournis, les sommes reçues devraient, me semble-t-il, relever du complément de prix visé et imposable au titre des plus-values mobilières, sur le fondement de l'article 150-0-A du CGI qui dispose au 2 : " Le complément de prix reçu par le cédant en exécution de la clause du contrat de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux par laquelle le cessionnaire s'engage à verser au cédant un complément de prix exclusivement déterminé en fonction d'une indexation en relation directe avec l'activité de la société dont les titres sont l'objet du contrat, est imposable au titre de l'année au cours de laquelle il est reçu. (voir BOI-RPPM-PVBMI-20-10-10-20)
Il ne pourrait en aller différemment que si le complément de prix pouvait être requalifié en salaires ou en BNC imposable au barème progressif de l'impôt sur le revenu, s'il était établi que ce complément constituait, en réalité, la rémunération du cédant qui continuerait à exercer l'activité dans la société, après avoir cédé les titres (BOI-RPPM-PVBMI-20-10-10-20, n° 40).
Les compléments de prix reçus après la vente de titres sont imposables au titre de l'année de perception. Ils peuvent bénéficier du même abattement pour durée de détention que celui qui était applicable lors de la cession, si l'option pour l'imposition au barème progressif de l'impôt sur le revenu de l'ensemble des produits financiers et des plus-values mobilières est exercée.
Dans l'hypothèse de l'option pour le barème, le taux marginal d'imposition s'applique au lieu et place du prélèvement de 12.80 % de la Flat Tax. Les contributions sociales sont toujours calculées au taux global de 17,20%, abstraction faite de tout abattement pour durée de détention ou au titre des départs en retraite des dirigeants.
A défaut d'option pour l'imposition au barème, c'est donc la flat taux (au taux global de 30% contributions sociales incluses) qui s'appliquerait, sur la plus-value brute, soit en l'espèce sur le complément de prix, sans abattement.
Dernière précision, la convention fiscale conclue entre la France et l'Irlande prévoit, en son article 7, l'imposition exclusive des revenus provenant de la cession d’une participation dans une société de capitaux, dans l’Etat contractant dont le cédant est le résident, soit, vous concernant en France.
Restant à votre disposition,
Bien cordialement
Bonjour John12
Je vous remercie grandement pour votre analyse, qui m'apporte beaucoup de précisions utiles. Je me permets de répondre ci-dessous à votre retour :
> Vous avez vendu vos parts à la valeur nominale lors de votre départ d'Irlande, il y a 2 ans dites-vous. Vous n'avez donc alors réalisé aucune plus-value. Si je comprends bien, dans le contrat de cession ou par acte séparé concomitant à la cession, il a été prévu un complément de prix dont les conditions de calcul et de règlement ne sont pas, à ce stade de la discussion clairement définies.
Exactement. Je n'ai pas reporté les conditions de calcul et de règlement, car la proposition que j'ai reçu est de résilier ce contrat en l'échange d'un paiement. Ainsi, l'idée n'est pas d'éxécuter les conditions du contrat.
> On peut d'emblée, écarter la qualification de donation évoquée à propos des sommes que vous pourriez recevoir dans le prolongement de la cession de votre participation. En effet, pour qu'il y ait donation taxable aux droits de mutation à titre gratuit, il faut que les critères de la donation soient réunis au sens de l'article 894 du code civil qui prévoit que "La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l'accepte". Or, ici, l'intention libérale n'existe manifestement pas, les sommes reçues étant la contrepartie de la cession des titres.
Exactement, je vous suis jusque là. Ce paiement est une contrepartie de la cession de mes parts à mon associé.
> Au vu des éléments sommaires fournis, les sommes reçues devraient, me semble-t-il, relever du complément de prix visé et imposable au titre des plus-values mobilières, sur le fondement de l'article 150-0-A du CGI qui dispose au 2 : " Le complément de prix reçu par le cédant en exécution de la clause du contrat de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux par laquelle le cessionnaire s'engage à verser au cédant un complément de prix exclusivement déterminé en fonction d'une indexation en relation directe avec l'activité de la société dont les titres sont l'objet du contrat, est imposable au titre de l'année au cours de laquelle il est reçu. (voir BOI-RPPM-PVBMI-20-10-10-20)
Cela fait sens en effet.
> Il ne pourrait en aller différemment que si le complément de prix pouvait être requalifié en salaires ou en BNC imposable au barème progressif de l'impôt sur le revenu, s'il était établi que ce complément constituait, en réalité, la rémunération du cédant qui continuerait à exercer l'activité dans la société, après avoir cédé les titres (BOI-RPPM-PVBMI-20-10-10-20, n° 40).
Je confirme que je ne suis plus actif dans la société depuis 2018, sans aucun rôle au sein du comité de Direction. Cette requalification me semble donc non possible.
> Les compléments de prix reçus après la vente de titres sont imposables au titre de l'année de perception. Ils peuvent bénéficier du même abattement pour durée de détention que celui qui était applicable lors de la cession, si l'option pour l'imposition au barème progressif de l'impôt sur le revenu de l'ensemble des produits financiers et des plus-values mobilières est exercée.
Je suis revenu en France en 2018, avec un année blanche à mon arrivée. Je ne sais pas quel impact cela peut avoir, si un avantage peut exister à appliquer les conditions de 2018 ? Je ne suis pas certain de bien comprendre la notion d'option pour le barème.
> Dans l'hypothèse de l'option pour le barème, le taux marginal d'imposition s'applique au lieu et place du prélèvement de 12.80 % de la Flat Tax. Les contributions sociales sont toujours calculées au taux global de 17,20%, abstraction faite de tout abattement pour durée de détention ou au titre des départs en retraite des dirigeants.
> A défaut d'option pour l'imposition au barème, c'est donc la flat taux (au taux global de 30% contributions sociales incluses) qui s'appliquerait, sur la plus-value brute, soit en l'espèce sur le complément de prix, sans abattement.
C'est clair, le seul point à explorer est la notion d'option d'imposition au barème.
> Dernière précision, la convention fiscale conclue entre la France et l'Irlande prévoit, en son article 7, l'imposition exclusive des revenus provenant de la cession d’une participation dans une société de capitaux, dans l’Etat contractant dont le cédant est le résident, soit, vous concernant en France.
Très bien, c'est ce que je pensais en effet.
Je vous remercie grandement pour cette analyse très complète et très précise, qui me donne une très bonne base sur la qualification et la déclaration de ce transfert aux impôts.
Bien à vous.
Bonsoir Pattone,
Vous avez, dites-vous, des difficultés à comprendre le problème de l'imposition des plus-values de cession de titres, entre Flat Tax et imposition au barème progressif de l'impôt sur le revenu. Je vais donc essayer de préciser, en faisant simple.
Les plus-values de cession de titres (auxquelles sont assimilés les compléments de prix, comme déjà dit) sont, dans le droit commun, imposées à la Flat Tax ou prélèvement fiscal unique (PFU) créée par notre cher Président Macron. Cette Flat Tax correspond donc, pour 12.80% à un prélèvement d'impôt sur le revenu et pour 17.20% aux contributions sociales, soit un prélèvement total, contributions sociales incluses, de 30%.
Mais, la Flat tax peut être évitée, au choix du contribuable, en optant pour l'imposition au barème progressif de l'impôt sur le revenu, lors du dépôt de la déclaration des revenus (case 2OP à cocher). La difficulté d'appréciation de l'intérêt de l'option résulte du fait que cette option est globale et qu'elle concerne, non seulement toutes les plus-values mobilières de l'année d'imposition, mais aussi tous les produits financiers (intérêts, dividendes notamment). Je peux essayer de parler de l'intérêt éventuel de l'option, bien qu'il s'agisse d'un exercice difficile, sachant qu'une simulation s'impose, sur la base des revenus de chacun, pour juger de l'opportunité d'opter ou pas. Dès lors que le prélèvement d'impôt sur le revenu compris dans la Flat tax est de 12.80%, vous comprendrez qu'il peut être intéressant d'opter, si on est non imposable ou si son taux marginal d'imposition est inférieur à 12.80%.
L'option permet aussi, en matière de revenus de capitaux mobiliers, de bénéficier de la déduction des frais bancaires et d'un abattement de 40% sur les dividendes, déductions impossibles avec la Flat Tax. En matière de plus-value mobilières, l'option permet de bénéficier des abattements pour délai de détention des titres, pour autant que les titres aient été acquis avant 2018 et détenus au moins 2 ans (abattement de droit commun de 50 % si détention entre 2 et 8 ans et 65 % si détention d'au moins 8 ans, abattement renforcé pour les cessions de titres de PME de moins de 10 ans acquis avant 2018).
Vous comprenez, je suis sûr, qu'il n'est pas possible de vous dire, sans connaître tous vos revenus, si l'option est intéressante ou pas. Les services fiscaux (sur impots.gouv.fr) mettent des simulateurs à disposition. Il faut faire le calcul, avec option et sans option, pour en juger.
Petite observation complémentaire, les plus-values de cession de titres impliquent de déposer une déclaration spéciale n° 2074, voire 2074 DIR pour les dirigeants partant en retraite, ou 2074 ABT pour les bénéficiaires de l'abattement renforcé. Le résultat net est reporté sur la déclaration d'ensemble des revenus 2042.
Dernière observation enfin : Le complément de prix n'a pas encore été versé, semble-t-il. Dans le meilleur des cas, le versement interviendra donc en 2021. Il ne sera donc déclarable qu'au titre des revenus 2021 pour lesquels la déclaration sera déposée en mai, juin 2022. Vous avez donc du temps devant vous, au plan fiscal.
Cdt
Bonjour,
De nouveau je vous remercie grandement pour votre réponse à la fois complète et très précise.
Je pense que vous m'avez donné tous les éléments dont j'ai besoin pour avancer sur ce dossier, avec des pointeurs vers les textes légaux et formulaires.
Je ne peux que souligner encore une fois la qualité de votre aide, qui ne se mesure pas pour des personnes comme moi moins à l'aise avec ce type de dossiers complexes sur le plan fiscal.
Bien à vous
Bonjour,
Comme tous les bénévoles qui interviennent sur ce forum, je suis heureux quand mon intervention peut être utile.
Bonne fin de journée
Nouveau
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