À cause du syndic ?
Dans des immeubles en copropriété parfois difficiles, des locataires se plaignent fréquemment de la présence de punaises de lit. Leur première réaction est souvent d’aller se plaindre auprès des services municipaux. Ceux-ci contactent alors de manière menaçante le syndic, à savoir le représentant légal du syndicat des copropriétaires (art. 18, loi du 10 juill. 1965), la personne morale qui naît automatiquement dès qu’un immeuble est placé sous le régime de la copropriété.
Le statut de la copropriété implique que l’immeuble est divisé en lots comprenant chacun une partie privative et une quote-part de parties communes (art. 1, loi du 10 juill. 1965). Or, et sauf présence constante de déchets dans les couloirs, les punaises de lit proviennent très rarement des parties communes. Elles prolifèrent dans les meubles sales ou de mauvaise qualité issus d’endroits peu hygiéniques. Les lits et meubles sources de l’infestation se trouvent donc généralement dans des parties privatives, placées sous la responsabilité exclusive de leur détenteur.
Un exemple édifiant
Or, dans un immeuble en copropriété francilien, une infestation de punaises de lit était récurrente depuis 2017 malgré plusieurs interventions d’une entreprise de désinfection. En fait, au sein de l’un des appartements loués, un locataire entassait des meubles ramassés dans la rue. Une juridiction a considéré que ce comportement constituait un trouble manifestement illicite en raison des violations des règles sanitaires et d’une atteinte à la salubrité de l’immeuble (Cour d’appel de Paris, 30 juin 2022, n° 22/00511, AJDI, oct. 2022, p. 687, obs. Sylvaine PORCHERON). Le syndicat des copropriétaires a été habilité à missionner un huissier pour qu’il ouvre la porte, qu’il vide l’appartement et qu’il reloge le locataire le temps d’opérer la désinfection.
Quant au propriétaire, qui avait la maîtrise absolue des parties privatives de son bien et qui avait donc les moyens d’intervenir dès qu’il avait été prévenu de la situation (art. 9, loi du 10 juill. 1965), il a été condamné à verser à titre provisionnel 10 000 euros au titre des frais avancés par le syndicat des copropriétaires. Notons d’ailleurs que, s’il l’avait voulu, le syndicat des copropriétaires pouvait obtenir la résiliation du bail du locataire. Il en a été jugé ainsi à propos d’un logement provoquant la prolifération de blattes (Cour d’appel de Toulouse, ch. 3, 6 avr. 2022, RG 21/02123). On appelle cela l’action oblique, permettant à un tiers de provoquer la résiliation, quoi qu’en disent le bailleur et son locataire. Que chacun s’en souvienne et cesse d’accabler systématiquement les syndics, souvent non professionnels, dans ces immeubles fragiles !