L'opposabilité de la cession du droit au bail au bailleur

Publié le Modifié le 14/01/2019 Vu 28 122 fois 0
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L'opposabilité de la cession du droit au bail au bailleur impose le respect de formalités incontournables.

L'opposabilité de la cession du droit au bail au bailleur impose le respect de formalités incontournables.

L'opposabilité de la cession du droit au bail au bailleur

L'Opposabilité de la cession du droit au bail au bailleur

1 - Formalité de l'article 1690 du Code civil

a) Cession du droit au bail en dehors de la présence ou de l'agrément du bailleur.

Lorsque la transmission du droit au bail, avec ou sans le fonds de commerce se fait en dehors de la présence du bailleur, le cédant et le cessionnaire doivent respecter les formes de l'article 1690 du Code civil relatif à la transmission des créances.

La cession est un contrat entre le locataire vendeur et l'acquéreur du droit au bail, auquel le bailleur, débiteur du droit de jouissance des lieux, est un tiers.

Or, si l'article 1689 dispose que le « transport » d'un droit entre le cédant et le cessionnaire s'opère par la « remise du titre », l'article 1690 réglemente l'opposabilité de la transmission aux tiers en précisant que le « cessionnaire n'est saisi à l'égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur » ou par « l'acceptation du transport faite par le débiteur dans un acte authentique. »

Aussi, la cession doit être signifiée au bailleur par acte extra-judiciaire, ou acceptée par celui-ci dans un acte authentique.

Cette formalité devient plus rare car les clauses d'autorisation qui sont usuelles  maintenant dans les baux la rendent inutile si le bailleur accepte expressément le cessionnaire ou si ce dernier disepense expressément les paries de recourir à la signification prévue à l'article 1690 du Code Civil.

Mais lorsque la signification est nécessaire, l'absence de formalité rend la cession inopposable au bailleur si bien que le cessionnaire devient un occupant sans titre qui peut être expulsé, le bail pouvant être résilié en raison du départ fautif du preneur.

A noter également que le défaut de signification pourra constituer un motif de non-renouvellement sans indemnité (Civ. 3e, 12 juin 2001, no 00-12.428)

Il n'y a pas de délai imposé par les textes pour effectuer cette signification : néanmoins, par sécurité, elle devra être réalisée au plus tard à l'entrée du cessionnaire dans les lieux date à laquelle le nouveau locataire pourrait être considéré comme occupant sans titre.

Il faut cependant noter que de nombreux baux commerciaux imposent un délai de signification,  habituellement de 30 jours pour procéder à la signification de l'article 1690 du code civil souvent à titre de nullité de la cession.

Les juges du fond conserveront cependant une marge d'appréciation sur le respect de ses délais, la nullité n'étant pas automatiquement acquise.

b) Le rôle de la signification

La signification de la cession n'a pas pour objet « d'informer » le débiteur de l'obligation c'est à dire le bailleur de la cession de la cession du droit au bail.

Elle a pour effet de créer le lien de droit entre le débiteur cédé et le nouveau créancier, cela malgré l'effet relatif des contrats prévu à l'artcile 1199 du Code Civil, et en dehors de tout consentement de celui-ci. C'est pourquoi, en son absence, le cessionnaire ne peut opposer le droit qu'il a acquis au bailleur.

C) Le cas de l'agrément tacite du bailleur.

En l'absence de signification, la simple information du bailleur ne peut suffire à caractériser un engagement de celui-ci dans le lien de droit avec le cessionnaire. L'attention du rédacteur des actes de cession devra donc être totale.

En effet, la simple réponse du bailleur ne suffira pas à établir un lien contractuel, aussi les formulations usuelles selon lesquelles le bailleur "prend bonne note de la cession envisagée" ou " à bien pris connaisance de la cession envisagée" seront insuffisantes

il faudrait, pour que le lien contractuel soit établi, qu'il résulte soit d'un écrit non équivoque soit du comportement du bailleur qui manifesterait son agrément à la présence du cessionnaire.

La perception des loyers peut constituer un acquiescement à la présence du cessionnaire et donc une acceptation tacite mais à condition que le bailleur sache en quelle qualité celui-ci les paye puisqu'un un tiers pouvant toujours acquitter une dette pour le compte du débiteur.

Tel sera cependant le cas lorsque le bailleur emet les appels de loyers ou le nouveau quittancement à l'ordre du nouveau locataire.

Cependant la validation tacite étant le plus souvent refusée, le respect des formalités de l'article 1690 du Code Civil sera toujours la règle.

 2 - La dispense contractuelle de signification

a) Les clauses contractuelles doivent constituer un agrément du cessionnaire par le bailleur.

Les clauses relatives à la cession se présentent sous différentes formes.

Il ne faudra cependant pas confondre les clauses d'« autorisation de cession » et les clauses d'« agrément du cessionnaire » dont l'objet et le but diffèrent.

 

Les clauses d'« autorisation de cession » obligent à solliciter l'autorisation du bailleur sur le principe de la cession, sans que le cessionnaire soit déjà connu : aussi , l'autorisation du bailleur ne dispensera pas de la signification.

 

Les clauses d'« agrément du cessionnaire » obligeant le locataire à demander l'agrément du bailleur avant la cession, contraignent à communiquer les renseignements sur la personne du cessionnaire, et, donc, en cas d'accord du bailleur, constituent une reconnaissance « par avance » de la présence du cessionnaire dans les lieux, en dispensant de la procédure légale(Civ. 3e, 2 oct. 2002)

 

Sauf clause contraire prévue au bail.

 

b) Le concours du bailleur à l'acte de cession.

Lorsque le bailleur est appelé à concourir à l'acte de cession, il a connaissance de la personne du cessionnaire, mais également en signant l'acte, il manifeste son intention de l'agréer.

Il y a donc, de fait, dispense de signification dans ce cas.

Cependant, si le bailleur est convoqué à la signature de l'acte de cession, mais ne s'y rend pas, ou indique par écrit au rédacteur qu'il n'entend pas y concourir, la signification sera nécessaire, sauf dispense expresse du bailleur valant alors agrément du cessionnaire.

De même, la signature de l'acte de cession par acte authentique, ne dispense pas, soit de convoquer le bailleur à l'acte, soit de lui signifier la cession par la suite : l'article 1690 du Code civil ne créant pas de dispense en cas de transport par acte authentique, puisqu'au contraire il précise que le débiteur doit l'accepter dans l'acte .

 

 

 

3) Les sanctions pour défaut de respect des formalités de la cession

a)  Non-respect des procédures.

La cession non signifiée au bailleur, ainsi que la cession réalisée sans respecter une clause prévue au bail, est une cession irrégulière qui est inopposable au bailleur, et entraînera la résiliation du bail par la faute du locataire qui a quitté les lieux.

La régularisation ultérieure étant inopérante et les paiements reçus du cessionnaire ne pouvant s'analyser ipso facto comme une acceptation non équivoque de la cession.

 En ce qui concerne le non-respect des clauses de formalité, la jurisprudence relève qu'elles ne peuvent être remplacées par aucune autre formalité, aussi, dans bien des cas, l'erreur d'adresser l'acte de cession au bailleur par lettre recommandée sera fatale, idem concernant l'absence du bailleur à la signature alors que le bail l'imposait.

Notamment dans un cas où le bail disposait « toutes cessions, sous peine de nullité devront être faites par actes établis par le conseil du propriétaire […] », l'absence de la formalité, alors que le bailleur ne s'est pas rendu aux rendez-vous de signature, mais n'a pas été mis en demeure par la cédante d'avoir à faire établir l'acte par son conseil, entraîne l'irrégularité de la cession, et la résiliation du bail.

Ainsi, la cession qui ne respecte pas la forme authentique prévue au bail, n'est pas opposable au bailleur.

Concernant le non-respect des clauses d'agrément, les tribunaux les interprètent également strictement. La sanction pouvant être rapide puisqu'il a été admis que l'irrégularité pouvait sanctionnée par l'acquisition de la clause résolutoire constatée par le juge des référés.

 

S'il a été jugé que l'échange de courriers avec le bailleur l'informant du projet de cession, tout comme « la sommation interpellative avec injonction de répondre sous 48 heures » ne saurait suppléer l'absence d'accord exprès (Paris, 16e ch. B, 28 nov. 2003) un arrêt de la cour d'appel de Paris a considéré que la cession réalisée « sans le concours du bailleur » qui avait disposé de neuf jours entre la réception du projet d'acte et la signature de ce dernier, pour prendre position, ne revêt pas un caractère fautif et ne justifie pas le prononcé de la résiliation du bail (Paris, 16e ch. A, 17 janv. 2005)

Cependant la prudence devra toujours conduire le rédacteur des actes, à défaut de réponse du bailleur, à solliciter devant le juge sa convocation ou solliciter l'autorisation judiciaire de la cession envisagée.

b) Agrément tacite du cessionnaire par le bailleur, malgré le non-respect des clauses contractuelles.

Comme dans le cas où la signification de la cession n'est pas régulièrement faite , les cessions irrégulières peuvent être couvertes par l'agrément tacite du bailleur.

Cet agrément résulte en général à la fois du quittancement des loyers au nom du cessionnaire, et de circonstances démontrant que le bailleur a traité directement avec le cessionnaire.

Cependant, le simple encaissement des loyers par le bailleur sera insufissant à caratériser son agrément tacite.

En conclusion la prudence devra toujours être de mise et conduira à respecter strictement la procédure d'autorisation et d'agrément prévu au bail et la signification prévue à l'article 1690 du Code Civil.

 

 

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