Conformément à l’article L.134-12 du Code de commerce, l’agent commercial a droit, en cas de cessation de ses relations avec le mandant, à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.
Cette indemnité se justifie par la nature de mandat d’intérêt commun de ce contrat. Les parties ont en effet pour but commun le développement d’une clientèle, en développant l’activité commune.
Cependant, à la fin du contrat, l’agent commercial peut perdre le bénéfice de la valeur patrimoniale attachée à la clientèle qu’il a contribué à développer, alors que son mandant en conserve l’exploitation.
L’indemnité de cessation du contrat vise à indemniser l’agent commercial de cette perte.
A.Le principe du droit à indemnité
1.Les cas ouvrant droit à une indemnité de fin de contrat
Le droit à indemnité de l’agent commercial naît du fait :
- de la survenance du terme du contrat à durée déterminée (1-1) ;
- de la rupture du contrat du fait du mandant (1-2);
- de la cessation des effets du contrat du fait du décès ou de l’inaptitude physique de l’agent commercial personne physique (1-3).
1-1. La survenance du terme du contrat à durée déterminée
L’article L.134-12 du Code de commerce précise le principe du droit à indemnité du fait de la cessation des effets contrat de l’agent commercial, peu importe que le contrat soit ou non à durée déterminée.
La jurisprudence juge donc de manière constante que la cessation des effets d’un contrat à durée déterminée donne lieu au versement de l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L.134-12 du Code de commerce (Cass. Com., 23 avril 2003, n°01-15639 ; Cass. Com., 3 octobre 2006, 05-10.127).
Il convient également de noter qu’indépendamment du préjudice résultant de la perte pour l'avenir des revenus tirés de l'exploitation de la clientèle commune, indemnisé par l’indemnité de cessation du contrat, l’agent commercial subi dans l’hypothèse d’une rupture anticipée par le mandant du contrat à durée déterminée un préjudice résultant de la perte de commissions jusqu'à la date conventionnellement prévue.
1-2. La cessation des effets du contrat du fait du mandant
La rupture peut intervenir à l’initiative du mandant lui-même (a), du fait de circonstances imputables au mandant et qui justifient la rupture du contrat à l’initiative de l’agent commercial (b), ou encore du fait du refus du mandant d’agréer le successeur de l’agent (c).
a) la rupture intervient à l’initiative du mandant
Sauf faute grave de l’agent commercial ou force majeure, la rupture à l’initiative du mandant ouvre droit à l’indemnité de fin de contrat pour l’agent commercial.
Le mandant peut prendre l’initiative de mettre fin au contrat, soit car il ne souhaite plus poursuivre les relations contractuelles avec l’agent commercial, soit car il n’est plus en mesure de l’exécuter.
A ce titre, la cessation du contrat suite à une réorganisation du mandant du fait de sa situation économique ne peut constituer une cause d’exonération de l’indemnité de fin de contrat, sauf pour le mandant à prouver que la cessation du contrat résulte d’un cas de force majeure (CA Bordeaux, 22 juillet 2014, n°13/03780).
De même, l’ouverture d’une procédure collective à l’encontre du mandant qui ne résulterait pas d’un cas de force majeure n'exonère pas le mandant du paiement de l'indemnité de cessation de contrat.
Dans cette hypothèse, l’agent commercial devra impérativement déclarer sa créance d’indemnité aux organes de la procédure collective dans le délai de 2 mois à compter de la publication au BODACC du jugement d'ouverture de cette procédure.
b) la rupture intervient à l’initiative de l’agent commercial du fait du mandant
Conformément à l’article L.134-13 du Code de commerce, l’indemnité de cessation du contrat est due à l’agent commercial si la rupture intervient à son initiative du fait « de circonstances imputables au mandant ».
Il s'agit donc dans cette situation d'une rupture à l'initiative de l'agent mais provoquée par le comportement du mandant.
De manière générale, la cessation des effets du contrat peut être imputable au mandant dans trois situations:
- le mandant ne met plus en mesure l’agent d’exécuter le contrat
Conformément à l’article L.134-4 du Code de commerce : « le mandant doit mettre l'agent commercial en mesure d'exécuter son mandat ».
La jurisprudence considère ainsi que l’agent commercial à droit à l’indemnité de fin de contrat lorsqu’il a mis fin au contrat au motif qu’il n’était plus en mesure de l’exécuter du fait du mandant (CA, Aix-en-Provence, 9 Janvier 2014 – n° 12/23217).
La Cour de cassation a ainsi considéré, au visa de l’article L.134-4 du Code de commerce, qu’il y avait lieu de rechercher si le retrait à un agent commercial, sans condition et immédiat, du droit de commercialiser l'ensemble des nouveaux produits du mandant sans fournir de produits de remplacement, et en lui ayant coupé simultanément l’accès à l’intranet dédié aux agents commerciaux, était susceptible de permettre à l'agent la poursuite normale de ses objectifs contractuels (Cass.Com, 6 novembre 2012, n° 11-25481).
La Cour d’appel de renvoi a considéré que l’agent commercial « était en droit de considérer que, d'une part, la privation immédiate et sans délai de préavis de tout nouveau produit (…)et d'autre part, le fait (…) qu'[il] ne pouvait même plus avoir accès au site extranet dédié aux agents commerciaux, [le] plaçant ainsi dans l'impossibilité de suivre son portefeuille (…) traduisaient sans équivoque la volonté [du mandant] de parvenir à la cessation de leur relation en lui faisant supporter l'initiative de la rupture » (CA, Aix-en-Provence, 9 Janvier 2014 – n° 12/23217).
Elle a ainsi jugé que la rupture était effectivement imputable au mandant, et que l’agent commercial avait logiquement droit à l’indemnité de fin de contrat.
« Ce comportement [du mandant] est exclusif de loyauté et caractérise les circonstances imputables au mandant requises par les dispositions précitées de l'article L 134-13 du Code de commerce pour, en application des mêmes dispositions, ouvrir droit à [l’agent commercial], en dépit du fait qu'elle a été à l'initiative de la cession du contrat, à une indemnité de cessation de contrat ».
On notera forcément la place centrale attribuée à l'obligation de loyauté dans le contrat d'agence, dans l'espèce non respectée par le mandant mais qui s'impose aux deux parties.
- Les fautes du mandant justifient la résiliation du contrat
La violation par le mandant de l’une de ses obligations essentielles justifie la cessation du contrat à l’initiative de l’agent et donne droit à ce dernier à l’indemnité de fin de contrat.
Il en est ainsi par exemple lorsque le mandant cesse de payer les commissions de l’agent.
L'affirmation est évidente s'agissant d'un contrat synallagmatique.
L’obligation du mandant de payer les commissions dues à l’agent commercial constitue une obligation essentielle du mandant, dont la violation justifie la cessation du contrat et le versement d'une indemnité de cessation de contrat à l’agent commercial.
La violation par le mandant de son obligation de fournir à l’agent tous les éléments lui permettant d’établir ses factures, et donc d’obtenir le paiement de ses commissions constitue également une faute grave permettant à l’agent de mettre fin au contrat (CA Rennes 29 septembre 2009, Jurisdata n°2009-014845 ; CA Toulouse, 12 Avril 2011, n° 09/03840).
La violation par le mandant de l’exclusivité territoriale consentie à l’agent commercial constitue tout-aussi un motif de résiliation du contrat du fait du mandant (Cass. Com, 1er mars 2011, 10-11.079).
- La modification unilatérale du contrat d’agent commercial
En application de l’article 1103 du Code civil, une partie ne peut modifier unilatéralement un contrat sans l’accord de l’autre partie, sauf à engager sa responsabilité.
En effet, en application de l'article 1103 du code Civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Il en est notamment ainsi lorsque:
-Le mandant tente d’imposer un nouveau taux de commission à l’agent commercial (Cass. com., 23 juin 2004 ; n° 02-17.311),
-De retirer une exclusivité accordé à l’agent sur certains clients.
-Imposer un nouveau contrat à l’agent commercial, qui lui serait plus défavorable (CA Paris 3 février 2005 n° 2005-270650).
c) Refus du mandant d’agréer le successeur de l’agent
Conformément à l’article L.134-13 du Code de commerce alinéa 3, l’indemnité de fin de contrat n’est pas due lorsque, suite à un accord avec le mandant, l'agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu'il détient en vertu du contrat d'agence.
Sur ce fondement, la jurisprudence considère que l’agent commercial à un droit implicite à la cession du contrat, et que sauf motif objectif, par exemple l'incompétence ou l'inaptitude du successeur présenté, le mandant ne peut pas refuser d’agréer, sans motif légitime le successeur proposé par l’agent.
Il a ainsi été jugé que « le contrat d'agence commerciale ayant une valeur patrimoniale, l'agent était en droit de présenter un successeur à l'agrément de son mandant et, d'autre part, que le refus d'agrément sans motif sérieux est susceptible d'engager la responsabilité du mandant ou son obligation au paiement d'une indemnité » (CA Toulouse, 19 mai 1998, n° 96/05181).
Le refus du mandant de se prononcer dans un délai raisonnable sur le successeur présenté par l’agent commercial est également susceptible de justifier la résiliation du contrat à l’initiative de l’agent dès lors que cette attitude s’analyse en un refus arbitraire d’agrément et traduit une volonté de paralyser le droit de présentation de l’agent commercial (CA Aix-en-Provence, 8 mars 2007, n°05/11206).
1-3 La cessation des effets du contrat du fait du décès de l’agent commercial ou de son inaptitude physique à exécuter le contrat
L’article L.134-12 alinéa 3 du Code de commerce dispose que les ayants droit de l'agent commercial bénéficient également du droit à réparation lorsque la cessation du contrat est due au décès de l'agent.
L’article L.134-13 2° ajoute que l’agent commercial a également droit à l’indemnité de fin de contrat lorsque celui-ci est résilié du fait de l'âge, l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée.
Le seul fait pour l’agent commercial d’atteindre l’âge de la retraite ou encore d’être malade ne donne pas droit automatiquement à l’indemnité de cessation de contrat prévue à l’article L.134-12 du Code de commerce : l’agent commercial devra prouver qu’il n’est plus en mesure compte tenu de son âge ou de sa situation physique de poursuivre son activité.
La Cour de cassation a ainsi cassé un arrêt d’appel ayant condamné un mandant à payer une indemnité de cessation de contrat à un agent commercial ayant mis fin au contrat pour pouvoir prendre sa retraite, au motif que les juges du fond n’avaient pas caractérisé en quoi l’âge et les circonstances de la situation personnelle de l’agent commercial étaient susceptibles de ne plus lui permettre raisonnablement de poursuivre son activité (Cass. Com., 23 juin 2015, n°14-14.856).
B. Le caractère d’ordre public du droit à indemnité de fin de contrat
Conformément à l’article L.134-16 du Code de commerce, toute clause ou convention contraire aux dispositions des articles L.134-12 et L.134-13 du Code de commerce est réputée non écrite.
Ces dispositions sont donc d’ordre public ce qui implique qu'aucune stipulation contraire ne peut être ajouté au contrat et que ce principe ne peut être contourné.
La jurisprudence rappelle ainsi régulièrement que toute clause contraire est inefficace, qu'elle soit contenue dans le contrat de l'agent ou dans un acte séparé (Cass.com., 21 octobre 2014, n° 13-18370).
Toutefois, et conformément à une jurisprudence constante, la Cour de cassation considère que la loi française sur l’indemnité de fin de contrat est une loi protectrice d’ordre public interne, et qu’elle n’est pas une loi de police applicable dans l’ordre international (Cass. Com., 5 janvier 2016, n°14-10.628).
Les parties à contrat international sont donc parfaitement libres de choisir un droit applicable dont les dispositions sont moins protectrices de l’agent concernant l’indemnité de fin de contrat.
C. La mise en œuvre du droit à indemnité
1. Le délai à respecter pour solliciter l’indemnité de fin de contrat
En application de l’article L.134-12 alinéa 2 du Code de commerce, l'agent commercial perd le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits.
Ce délai d'un an commençant à courir à compter de la cessation effective des rapports contractuels (Cass. com., 18 janv. 2011, n° 09-72.510).
Faut pour l’agent commercial d’avoir notifié au mandant qu’il entendait obtenir le paiement de l’indemnité de fin de contrat dans ce délai, celui-ci est déchu de son droit à indemnité.
La sanction est radicale pour l'agent, mais ce dernier omet rarement de solliciter son droit à indemnité dans ce délai aux conséquences désastreuses pour l'agent commercial.
Si en revanche l’agent à effectivement notifier au mandant son intention d’obtenir le paiement de son indemnité dans un délai d’un an, celui-ci ne saurait être privé de son indemnité au motif qu’il n’aurait pas agi en justice à cette fin dans ce délai.
Car seule compte la notification au mandant l'intention d'obtenir le paiement de son indemnité et non l'introduction d'une action en justice dans ce délai.
2. Le montant de l’indemnité
Le montant de l’indemnité varie notamment en fonction de la durée de l'ancienneté des relations contractuelles et du montant du chiffre d'affaires réalisé avec le mandant.
Aucunes dispositions légales ne fixe cependant le montant de cette indemnisation pas plus que son mode de calcule, exception faite de l'imposition ou non de la TVA au versement de l'indemnité.
Les usages judiciaires fixent, en général, le montant de l’indemnité à celui du montant des commissions perçues au cours des deux dernières années, ou au montant total des commissions perçues pendant le mandat si celui-ci a duré moins de deux ans.
3. Indemnités perçues par les agents commerciaux lors de la rupture du contrat les liant à leur mandant et TVA
Le juge administratif considère dans cette situation que l'indemnité compensatrice versée en application de l'article L 134-12 du Code du Commerce à un agent commercial n'est pas imposable à la TVA dès lors que la reprise par le mandant de la clientèle acquise par cet agent commercial durant la période d'exécution du contrat d'agence ne caractérise pas une prestation individualisée de services entrant dans le champ d'application de la taxe. (Cour administrative d'appel de NANCY 29 nov 2007 N° 06NC00762)
Dans le cas du versement d'une indemnité globale, seule la fraction de cette indemnité pouvant s'analyser comme la contrepartie d'une prestation de services individualisée rendue par l'agent commercial au profit de son mandant doit être soumise à la TVA (sous réserve de pouvoir ventiler la part de l'indemnité réparant un préjudice de celle venant en contrepartie d'une prestation de services individualisée rendue au profit du mandant dans le cas du versement d'une indemnité globale et forfaitaire).
Peuvent notamment s'analyser comme la contrepartie d'une prestation de services individualisée rendue au profit de la partie versante, et être soumises à la TVA, les sommes suivantes versées à un agent commercial lors de la résiliation de son contrat d'agence :
- les rappels de commissions (quelle que soit leur dénomination : commissions de retour sur échantillonnage, indemnités pour échantillonnage de clientèle..,) qui correspondent aux commissions dues au titre des opérations réalisées avant la rupture du contrat d'agence et qui sont donc versées par le mandant en contrepartie de la réalisation des prestations de services d'agence ;
A l'inverse, une indemnité qui aurait pour objet exclusif de réparer un préjudice n'aura pas à être soumise à la taxe.
Dans le cas où le versement d'une indemnité correspondrait pour partie à l'indemnisation du préjudice subi (non taxable) et pour partie à des sommes dues pour des arriérés de commissions (taxables), il conviendrait d'appliquer à chacune le traitement fiscal idoine nonobstant le fait que le versement soit présenté comme le versement d'une indemnité unique.
D. Exception au droit à indemnité
Conformément à l’article L.134-13 du Code de commerce, l’agent commercial n’a droit à aucune indemnité en cas de faute grave de l’agent (2), en cas de rupture du contrat à l’initiative de l’agent sans justification (3), et en cas de cession du contrat par l’agent (4).
1. Les trois cas exonératoires au versement de l'indemnité de fin de contrat.
L’article L.134-13 du Code de commerce ne vise que trois cas exonératoires de l’indemnité de fin de contrat :
« La réparation prévue à l'article L. 134-12 n'est pas due dans les cas suivants :
1° La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial ;
2° La cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l'âge, l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée ;
3° Selon un accord avec le mandant, l'agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu'il détient en vertu du contrat d'agence »
Ainsi, certaines décisions affirment que ces trois exceptions ont un caractère limitatif :
« le mandant n'en est exonéré que dans les trois cas limitativement énumérés par l'article L. 134-13 du code de commerce que sont la faute grave de l'agent commercial, la cessation du contrat à l'initiative de l'agent commercial, la cession de son contrat par l'agent commercial, qu'aucune autre cause exonératrice ne saurait être prise en compte pour faire échapper le mandant à son obligation d'indemnisation, quand bien même elle revêtirait les caractères de la force majeure » (CA Paris, 26 mars 2015, Jurisdata n°2015-007319).
Ainsi, le mandant ne pourrait se prévaloir de la force majeure pour échapper au paiement de l’indemnité de fin de contrat.
Toutefois, certaines décisions ont considéré que la force majeure serait exonératoire de l’indemnité de fin de contrat.
Ainsi, dans un arrêt du 20 mars 2014, la Cour d’appel de Versailles a admis ce principe en jugeant que le mandant soutenait « à bon droit que si la cessation du contrat d'agence a pour cause un événement présentant pour le mandant les caractéristiques de la force majeure, celui-ci peut être exonéré du paiement des indemnités prévues par les articles L. 134-11 et L.134-12 du code de commerce , nonobstant le caractère impératif de ces textes ». La Cour d’appel de Versailles condamnait toutefois le mandant au paiement de l’indemnité faute pour ce dernier d’avoir caractérisé l’existence d’un cas de force majeur (CA Versailles, 20 mars 2014, n°12/06455).
La Cour de cassation semblait également avoir admis ce principe dans son arrêt du 3 avril 2013, en cassant un arrêt d’appel ayant condamné un mandant au paiement de l’indemnité de fin de contrat, faute pour la Cour d’appel d’avoir répondu aux conclusions du mandant dans lequel ce dernier faisait valoir que la cessation du contrat avait pour cause un cas de force majeur (Cass. Com., 3 avril 2013, n°12-15.000).
Dans l’arrêt rendu sur renvoi, la Cour d’appel de Bordeaux a jugé que le mandant devait être exonéré du paiement de l’indemnité de fin de contrat lorsque celui-ci avait cessé du fait d’un cas de force majeur :
« Cette décision d'arrêter la production, qui s'est imposée à la société Apollo, constituait pour celle-ci un cas force majeure, dès lors que, nonobstant la circonstance indifférente qu'elle faisait partie du groupe SAPA, elle n'avait pris aucune part à cette décision, et qu'elle ne pouvait ni la prévoir ni s'y opposer (…).
Dans ses conditions, la société S. & B. ne peut soutenir que la rupture du contrat, dont M. M. a pris l'initiative, soit imputable à la société Apollo, de sorte que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de paiement de l'indemnité de cessation de contrat et, partant, de l'indemnité de préavis » (CA Bordeaux, 22 juillet 2014, n°13/03780).
Ces différences de position entre les juridictions résulte semble-il d’une différence de qualification du régime de l’indemnité de fin de contrat.
Ainsi, là où certaines juridictions y voient un mécanisme de responsabilité civile, dans lequel la force majeure est exonératoire de responsabilité, d’autres juridictions considèrent qu’il s’agit d’un mécanisme indemnitaire, uniquement fondée sur l’imputabilité de la rupture.
Ainsi, dans son arrêt du 25 mars 2015, la Cour d’appel de Paris jugeait que « l'indemnité prévue à l'article L. 134-12 du code de commerce ne correspond pas à un mécanisme de responsabilité qui serait imputable au mandant rompant le contrat et qui pourrait impliquer la prise en compte d'un cas de force majeure quelconque (…) » (CA Paris, 26 mars 2015, n°2015-007319).
2. La faute grave de l’agent commercial
Il appartient au mandant qui invoque l’existence d’une faute grave de l’agent commercial pour s’exonérer du paiement de l’indemnité de fin de contrat de la prouver.
Conformément à une jurisprudence constante, les parties ne peuvent définir contractuellement la notion de faute grave. Celle-ci est définie par la jurisprudence comme la faute "portant atteinte à la finalité du mandat d’intérêt commun et rendant impossible le maintien du lien contractuel".
(Cass. Com., 15 octobre 2002 n°00-18.122.)
La caractérisation d’une faute grave étant susceptible de priver l’agent commercial de son droit à indemnité, la faute grave est appréciée de manière restrictive par la jurisprudence.
L’agent commercial n’étant soumis qu’à une obligation de moyen, le mandant devra prouver que l’agent n’a pas mis en œuvre tous les moyens lui permettant d’exécuter sa mission.
Les principaux cas de faute grave retenus sont :
- le fait pour l’agent commercial de délaisser son activité de manière conséquente ;
La simple baisse de chiffre d’affaires de l’agent commercial ne constitue pas en soi une faute grave de l’agent (Cass. Com. 14 décembre 2010 n°0-17318).
Pour que la baisse d’activité de l’agent commercial constitue une faute grave, le mandant devrait alors faire la démonstration qu’elle résulte directement du comportement de l’agent.
Ainsi la faute grave de l’agent est caractérisée lorsque la baisse du chiffre d’affaires résulte de l’absence prolongée de la prospection de la clientèle par l’agent (Cass. Com. 12 octobre 2010 n°09-16886), de l’arrêt des salons professionnels et des visites de certains clients habituels (Cass., Com., 9 juin 2015, n° 14-14.396) ou encore lorsque elle résulte d’un désintérêt manifeste et généralisé de l’agent commercial dans l’exécution de son mandat (Cass. com. 9-12-2014 n° 13-28.170).
- la vente de produits concurrents du mandant (Cass. Com. 24 mai 2011 n°10-16969).
Ce dernier point mérite que l'on s'y attarde.
En effet, les contrats d'agents stipulent de manière régulière que la représentation d'une entreprise concurrente sera soumise à l'information et/ou l'autorisation du mandant.
Ces clauses sont la reprise, tout à fait logique de l'article L.134-3 du Code de commerce qui précise que l'agent commercial peut accepter sans autorisation la représentation de nouveaux mandants, mais il ne peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente de celle de l'un de ses mandants sans accord de ce dernier.
Ces dispositions sont essentielles, car elles incarnent et rappellent une obligation fondamentale qui s'impose aussi à l'agent à savoir la loyauté.
Certaine branches d'activité sont extrêmement concurrentielles et il incombe à l'agent d'informer son mandant de la prise dans son portefeuille d'agent de nouveaux clients présentant une activité idoine et en concurrence directe avec son mandant.
La Cour de cassation a ainsi considéré, de manière très juste que constitue une faute grave : la vente de produits concurrents du mandant (Cass Com, 29 mars 2017, n°15-26.476).
Dans cet arrêt, la Cour de cassation a estimé que l’agent commercial avait commis une faute grave car il représentait deux sociétés concurrentes sans avoir demandé l’autorisation de la première société mandante.
En effet, l’article L 134-3 du Code de commerce dispose « l’agent commercial peut accepter sans autorisation la représentation de nouveaux mandants. Toutefois, il ne peut accepter la représentation d’une entreprise concurrente de celle de l’un de ses mandants sans accord de ce dernier ».
De ce simple fait, le comportement de l’agent était constitutif d’une faute grave qui justifié la cessation de son contrat, ce qui ne lui ouvrait nullement droit à une indemnité.
C'est avec beaucoup de justesse que la Cour de Cassation rappelle les obligations de l'agent, mais on regrettera la motivation de la haute juridiction qui aurait pu rappeler de manière ferme l'obligation de loyauté de l'agent qui transparait à travers cette obligation édictée à l'article L 134-3 du Code du Commerce.
La vente de produits complémentaires et non substituables à ceux mandant ne constitue pas une violation de l’obligation de non concurrence du mandant (Cass. Com, 10 novembre 2015, n° 14-14820).
Enfin, le mandant n’est pas fondé à se prévaloir de manquements de l’agent commercial dont il avait connaissance et qu’il a tolérés (Cass.Com., 11 juin 2002 n° 98-21916 ; Cass. Com., 7 avril 2009 n°08-12832).
Encore faudra-t-il à l'agent, dans ce dernier cas de figure, démontrer que son mandant avait connaissance de ces manquements et qu'il les avait tolérés.
3. La rupture du contrat à l’initiative de l’agent sans justification
Conformément à l’article L.134- 13 2° du Code de commerce, l’indemnité de fin de contrat n’est pas due lorsque « la cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l'âge, l'infirmité ou la maladie de l'agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée».
Ainsi, lorsque l’agent prend l’initiative de la rupture du contrat, sans que celle-ci ne soit justifiée ni par des circonstances imputables au mandant ni à son âge ou à sa condition physique, celui est réputé avoir renoncé à son droit à indemnité de fin de contrat.
4. La cession du contrat par l’agent commercial
Conformément à l’article L.134-13 3° du Code de commerce, l’indemnité de fin de contrat n’est pas due lorsque, selon un accord avec le mandant, l'agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu'il détient en vertu du contrat d'agence.
Cette solution s'impose du fait de l’objet de l’indemnité de fin de contrat, qui est d’indemniser l’agent commerciale de la perte de la valeur patrimonial attachée à la clientèle qu’il a contribué à développer.
En effet, l’agent ayant reçu de la part du cessionnaire la contrepartie financière de cette valeur patrimoniale, il n’est plus fondé à solliciter une quelconque indemnité de fin de contrat à son mandant.