Introduction
Voici une lecture que je conseille à tous, juristes, étudiants, ou simples citoyens souhaitant approcher la matière qu'est le droit.Voici donc :
Le Meilleur est Avenir, écrit par Jacques Mestre, professeur de Droit, ancien doyen de l'Université d'Aix-en-Provence.
Edité aux PUAM, Presses Universitaires d'Aix-Marseille.
Présentation par l'éditeur
Dans cet ouvrage, Jacques Mestre, qui est professeur à la Faculté de droit d'Aix-Marseille, porte un regard résolument optimiste sur les choses de la vie et l'avenir de notre Humanité. Il a choisi de le faire en une triple qualité.
D'abord en sa qualité d'enseignant. Animé, après plus de trente ans d'exercice professionnel, d'une passion toujours intacte pour ce superbe métier d'ouverture et de transmission. Mais soucieux également de voir les jeunes trouver leur place, avec tout le bonheur qu'ils méritent, dans une société difficile, à la fois libérée et exigeante, audacieuse et craintive.
Ensuite en tant que juriste. Observant ici que nombre de questions fondamentales se posent aujourd'hui, de manière très concrète, en termes juridiques. Et désireux que le Droit, souvent présenté comme ardu et technique, et qui est, en réalité, une matière simple, soit dès lors accessible à tous, et particulièrement à celles et ceux qui ont soif de réflexion et de dialogue.
Enfin en tant que citoyen de base, immergé, comme tant d'autres, dans un monde qui le dépasse et, parfois même, l'angoisse. Et pourtant convaincu que ce monde recèle en lui des trésors de passion et d'enthousiasme, d'intelligence et de beauté, susceptibles de le préserver du pire et de l'orienter vers le tout meilleur...A condition encore que ces trésors ne disparaissent pas sous les préoccupations quotidiennes, et qu'ils puissent librement s'exprimer ! L'auteur se propose donc de leur donner la parole, à la manière d'un rapporteur de synthèse qui, à la fin d'un colloque, s'efforcerait de rassembler tous les éléments positifs présentés par les autres pour que l'essentiel soit mis en lumière, et permette à chacun, à la place qui lui revient, de se tourner avec confiance vers l'avenir...
Un commentaire personnel
Lorsque ce livre m'a été offert, j'avais été frappé par l'aspect humain et moral de cet ouvrage, qu'on pourrait renommer selon la fameuse collection : La philosophie du droit pour les nuls. On y retrouve une notion de justice - ou d'injustice parfois - très humaine, à travers les yeux de son auteur dont la longue carrière lui a permis la rédaction de si belles réflexions.
Je l'ai relu récemment. Et j'ai été frappé à nouveau.
J'avais réalisé, fin 2008, à l'écoute d'une intervention de B. Fauvarque-Cosson (professeur à l'Université Paris II) sur France Culture, que l'étudiant en droit français ne fait pas qu'apprendre une matière, des techniques, des méthodologies. Il apprend tout d'abord à "penser le droit".
A la lecture de cet ouvrage, on découvre l'étendue du droit, sur chacun de nous, sur notre société. On découvre qu'il ne suffit pas de penser le droit, mais que le droit pense.
Que pense-t-il ? Et bien J. Mestre nous fait découvrir que le droit est porteur d'un certain nombre de valeurs communes; qu'il n'est pas qu'une image de la société : il transporte les valeurs que l'homme a forgées. Il les défend, ou parfois, les critique.
Ainsi en pensant le droit on pense des valeurs partagées. On trouve ici une forme profonde d'humanisme puisque l'homme et ses valeurs sont centrales.
Lorsque l'on voit le fonctionnement de la justice, l'état de la famille, la complexité du droit des sociétés et les sommes astronomiques qui y sont liées on se dit qu'il est loin, le temps où le droit défendait la veuve et l'orphelin. Pourtant on réalise à nouveau, à la lecture de ce livre, que la veuve et l'orphelin sont un témoignage - parfois teinté de chrétienté dans l'ouvrage - , qui forme tout notre droit.
Une anecdote
En France, il n'est pas dans l'habitude quotidienne du juriste de regarder la philosophie humaniste contenue dans le droit. On ne mesure pas tout l'optimisme qu'il véhicule.
Ainsi on véhicule souvent des images préconçues. Par exemple la fameuse contradiction de ces deux images fortement ancrées dans notre société et qui n'auraient aucun sens si elles étaient rasssemblées, ainsi : le droit serait un milieu conservateur (première image) qui se voudrait refléter l'état actuel de notre société où les moeurs vont parfois plus vite que leurs ombres (seconde image). Quelle contradiction !
Au contraire, on admet en Grande-Bretagne bien plus volontiers les racines du droit, les notions de justice humaine et les courants qui ont amené la société à son droit moderne. Peut-être est-ce l'une des conséquence de l'Equity britannique ?
La petite histoire
Ainsi par exemple, je revois mon professeur britannique en droit de la responsabilité nous raconter en cours magistral, l'arrêt qui fonde le droit de la responsabilité pour négligence :
"Le juge, Lord Denning, justifie sa décision en citant la Bible. La bible, vous connaissez ? Vous savez, il y a ce passage dans le nouveau testament, où Jésus prêche à la foule. Il apprend à aimer son prochain comme soi-même."
Et elle continue :
"Et d'un coup, au milieu de tout ça, il y a le seul juriste de la foule, qui fait un bond, il est pas d'accord, il y a un souci, alors il veut qu'on lui précise, les définitions, à qui ça s'applique etc.
Bon, bah c'est exactement ce à quoi le droit répond. Lord Denning montre que la responsabilité pour négligence, c'est ce devoir là ! C'est cette question là qui se pose !"
C'est cette approche du droit, humaniste, philosophique, sociologique, que Jacques Mestre nous fait découvrir, avec toute sa passion.
En conclusion, en lisant J. Mestre, on réalise vraiment le sens, la valeur, et la portée de notre droit.