Dans un arrêt publié au Bulletin, la Cour de cassation rappelle la règle, parfois méconnue ou oubliée, selon laquelle l'avocat doit justifier d'un pouvoir légalisé, c'est à dire un pouvoir spécial par acte notarié ou authentique, pour représenter son client., en application de l'article 22 de l'annexe Alsace-Moselle du code de procédure civile.
A défaut, l'avocat ne peut pas représenter, et ne peut qu'assister son client, ce qui nécessite la présence personnelle de ce dernier.
La règle vaut également en matière de vente judiciaire.
Les intéressés demeurant à l'étranger sont tenus de désigner, dans le département où le notaire est établi, un fondé de pouvoir chargé de recevoir les notifications, faute de quoi celles-ci seront acheminées par la voie postale.
Les notifications aux absents se font entre les mains de leur représentant ou curateur.
Les notifications sont réglées, au surplus, par les dispositions du code de procédure civile.
Le mandataire justifie de son mandat par une procuration déposée au rang des minutes du notaire. A la demande de l'un des intéressés ou du notaire, la procuration doit être authentiquement légalisée.
Références
Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 16 novembre 2017
N° de pourvoi: 16-17573
Publié au bulletin Rejet
Mme Flise (président), président
SCP Didier et Pinet, SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat(s)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 21 mars 2016), que par ordonnance du 20 décembre 2012, un tribunal d'instance a ouvert une procédure de partage judiciaire pour le règlement de la succession d'Alfred X... entre sa veuve et ses enfants du premier lit et a désigné un notaire pour procéder au partage ; qu'à l'issue de deux réunions, au cours desquelles Mme Y... veuve X... n'était pas présente, l'acte de partage a été signé par les parties comparantes et homologué par une ordonnance du 16 novembre 2015 ; que Mme Y... veuve X... a formé un pourvoi immédiat de droit local contre cette ordonnance ;
Attendu que Mme Y... veuve X... fait grief à l'arrêt de déclarer son pourvoi mal fondé et de confirmer cette ordonnance ayant homologué le partage, alors, selon le moyen :
1°/ que l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile ne concerne que les copartageants demeurant à l'étranger ; qu'en l'espèce la cour d'appel a constaté que Mme Y... veuve X... était domiciliée en France, à Guereins (01) ; qu'en jugeant que l'avocat de Mme Y... veuve X... n'était pas habilité dans les formes requises par l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile à représenter sa cliente à la réunion de partage du 4 novembre 2015, cependant que Mme Y... veuve X... demeurait en France, la cour d'appel a violé l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile relative à son application dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;
2°/ que l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile, qui ne concerne que le mandat que doivent donner les personnes demeurant à l'étranger à l'effet de recevoir les notifications, n'est pas applicable à la représentation des parties à un partage judiciaire ; qu'en jugeant que l'avocat de Mme Y... veuve X... n'était pas habilité dans les formes requises par l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile à représenter sa cliente à la réunion de partage du 4 novembre 2015, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile relative à son application dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;
3°/ que l'avocat est dispensé d'avoir à justifier qu'il a reçu mandat pour représenter une partie à une procédure de partage judiciaire de droit local devant notaire ; qu'en relevant que l'avocat de Mme Y... veuve X... ne justifiait pas d'un mandat lors de la réunion du 4 novembre 2015, pour en déduire qu'il n'était pas habilité à y représenter sa cliente, la cour d'appel a violé l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile relative à son application dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle par fausse application, ainsi que les articles 4, alinéa 1, de la loi du 31 décembre 1971, 416 et 828 du code de procédure civile, et 8 du décret du 12 juillet 2005 par refus d'application ;
4°/ que toute partie à une procédure de partage judiciaire de droit local a droit aux garanties du procès équitable, parmi lesquelles figure le respect du principe de la contradiction ; qu'en jugeant que le notaire n'avait pas à prendre en compte les observations et objections présentées par l'avocat de Mme Y... veuve X... au cours de la réunion de partage du 4 novembre 2015, la cour d'appel, qui a homologué l'acte de partage établi au terme de cette même réunion sans qu'elle ait pu en discuter, a violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5°/ qu'en homologuant l'acte de partage, sans répondre aux conclusions de Mme Y... veuve X... faisant valoir que la procédure de partage était caduque, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, qu'il résulte de l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile relative à son application dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle que lorsqu'un copartageant entend être représenté lors des opérations de partage judiciaire par un mandataire, celui-ci doit justifier de son mandat par une procuration déposée au rang des minutes du notaire, que le copartageant demeure ou non à l'étranger ; que, si aux termes de l'article 8 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005, l'avocat doit justifier d'un mandat écrit sauf dans les cas où la loi ou le règlement en présume l'existence, l'article 22 n'énonce aucune présomption en ce sens ; qu'ayant relevé que l'avocat qui, selon Mme Y... veuve X..., la représentait, n'avait justifié d'aucun pouvoir et que l'intéressée affirmait qu'il n'avait pas mandat pour donner son accord au projet de partage, c'est à bon droit que la cour d'appel en a déduit qu'elle n'était pas valablement représentée ;
Et attendu, ensuite, que la cour d'appel a retenu que si Mme Y... veuve X... avait été régulièrement convoquée pour la réunion de partage, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à laquelle était joint un projet de partage, et avertie des conséquences de sa non-comparution, son avocat n'avait en réalité aucun mandat écrit et n'était donc pas habilité dans les formes requises par l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile ; qu'elle en a exactement déduit, sans méconnaître l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et par une décision suffisamment motivée, que l'acte de partage devait être homologué ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... veuve X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. Frédéric X... et à Mme Aline X... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour Mme Y... veuve X....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré le pourvoi immédiat de Mme Y... mal-fondé et d'avoir confirmé l'ordonnance du tribunal d'instance de Molsheim du 16 novembre 2015 ayant homologué l'acte de partage du 4 novembre 2015 ;
AUX MOTIFS QU'il est constant que Mme X... a été convoquée pour la réunion de partage fixée par le notaire le 4 novembre 2015 par lettre recommandée avec avis de réception du 17 septembre précédent ; qu'à cette convocation était joint un projet de partage ; que la convocation reproduisait en outre les dispositions légales suivantes : « conformément à l'article 225 de la loi du 1er juin 1924, vous êtes avertis qu'en cas de noncomparution, les absents sont présumés consentir à ce que l'on procède au partage et le partage sera applicable pour eux malgré leur noncomparution » ; que lors de la réunion fixée par le notaire, Mme X... n'était pas présente ; que son avocat était présent mais n'a pas justifié d'un pouvoir ; que Mme X... reconnaît avoir été avisée de cette réunion, à laquelle elle était, selon ses écrits, « représentée par son avocat », tout en précisant que celui-ci n'avait pas mandat pour donner son accord sur le projet de partage ; que celui-ci n'avait en réalité aucun mandat et n'était donc pas habilité dans les formes requises par l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile à représenter sa cliente à la réunion ; que dès lors il ressort de l'article 225 1er alinéa de la loi du 1er juin 1924 que Mme X... n'était ni présente ni valablement représentée et se trouve donc présumée consentir à ce que le notaire procède au partage pour lequel il était nommé sur la base du projet communiqué précédemment aux parties ; que le notaire n'avait dès lors pas à prendre en compte les observations présentées par l'avocat de Mme X... lequel n'était pas dûment habilité pour la représenter ; qu'il en va ainsi des objections formulées quant aux objections qui pouvaient justifier un procès-verbal de difficultés, à la caducité de la procédure de partage judiciaire et à la prétendue prescription de la procédure de retranchement ;
qu'il ressort de l'article 225 susvisé que le partage est applicable à son égard malgré sa non-comparution ; qu'enfin, Mme X... n'a invoqué ni justifié d'aucun empêchement à la réunion prévue chez le notaire dans les conditions prévues par l'article 234 de la loi du 1er juin 1924 ; qu'elle a été valablement informée, par la convocation reçue et accompagnée d'un projet de partage, des conséquences pratiques de sa non-comparution ; que quant au fond, le partage judiciaire établi par le notaire et soumis à l'homologation du tribunal énonce les modalités de la liquidation de la succession du défunt, en prenant en compte les intérêts des co-partageants M. Frédéric X... et Mme Aline X..., héritiers réservataires d'une précédente union, ainsi que les droits de Mme Suzanne X..., veuve du défunt et titulaire de droits dans la communauté en vertu du régime de communauté universelle adopté ultérieurement et de l'attribution de la pleine propriété au conjoint survivant ;
que le notaire a ainsi procédé à la réduction en valeur de l'avantage consenti et procédé au partage de l'actif net de la communauté, conformément aux droits de chacun des co-partageants et en attribuant à Mme veuve X... l'usufruit de la succession, estimé justement à 30% de la pleine propriété, et en attribuant la moitié de l'actif net aux deux héritiers réservataires ; que le partage a été notifié à Mme veuve X... dans les 8 jours, selon les mentions figurant à l'acte, conformément à l'article 233, alinéa 3, de la loi du 1er juin 1924, formalité qui n'a pas été contestée par celle-ci ; que les droits de la partie non comparante étant respectés, le tribunal a à bon droit homologué l'acte ; que le recours a occasionné aux co-partageants des frais qui justifient une indemnisation (arrêt pp. 2-3) ;
ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE toutes les prescriptions de la procédure ont été respectées ; que les intérêts du majeur Madame Suzanne Y... veuve X..., absente, ont été sauvegardés ;
1°) ALORS QUE l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile ne concerne que les copartageants demeurant à l'étranger ; qu'en l'espèce la cour d'appel a constaté que Mme Y... était domiciliée en France, à Guereins (01) ; qu'en jugeant que l'avocat de Mme Y... n'était pas habilité dans les formes requises par l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile à représenter sa cliente à la réunion de partage du 4 novembre 2015, cependant que Mme Y... demeurait en France, la cour d'appel a violé l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile relative à son application dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;
2°) ALORS QUE l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile, qui ne concerne que le mandat que doivent donner les personnes demeurant à l'étranger à l'effet de recevoir les notifications, n'est pas applicable à la représentation des parties à un partage judiciaire ; qu'en jugeant que l'avocat de Mme Y... n'était pas habilité dans les formes requises par l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile à représenter sa cliente à la réunion de partage du 4 novembre 2015, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile relative à son application dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;
3°) ALORS QUE, en tout état de cause, l'avocat est dispensé d'avoir à justifier qu'il a reçu mandat pour représenter une partie à une procédure de partage judiciaire de droit local devant notaire ; qu'en relevant que l'avocat de Mme Y... ne justifiait pas d'un mandat lors de la réunion du 4 novembre 2015, pour en déduire qu'il n'était pas habilité à y représenter sa cliente, la cour d'appel a violé l'article 22 de l'annexe du code de procédure civile relative à son application dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle par fausse application, ainsi que les articles 4, alinéa 1er, de la loi du 31 décembre 1971, 416 et 828 du code de procédure civile, et 8 du décret du 12 juillet 2005 par refus d'application ;
4°) ALORS QUE toute partie à une procédure de partage judiciaire de droit local a droit aux garanties du procès équitable, parmi lesquelles figure le respect du principe de la contradiction ; qu'en jugeant que le notaire n'avait pas à prendre en compte les observations et objections présentées par l'avocat de Mme Y... au cours de la réunion de partage du 4 novembre 2015, la cour d'appel, qui a homologué l'acte de partage établi au terme de cette même réunion sans que Mme Y... ait pu en discuter, a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
5°) ALORS QU'en homologuant l'acte de partage, sans répondre aux conclusions de Mme Y... faisant valoir que la procédure de partage était caduque (ccl. p. 2 et 3), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
ECLI:FR:CCASS:2017:C201479
Analyse
Publication :
Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar , du 21 mars 2016