En l’espèce, Metz Métropole a lancé un appel à initiative privée pour développer un réseau d'infrastructures de recharge pour véhicules électriques sur son domaine public, en utilisant l'article L. 2122-1-1 du code général de la propriété des personnes publiques. La société UEM a été retenue, tandis que l'offre de la société E-Totem a été rejetée. La société E-Totem a contesté la régularité de cette procédure en se fondant sur l'article L. 551-1 du code de justice administrative, c’est-à-dire en intentant un référé précontractuel.
Les moyens développés par la requérante concernent un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence dans la passation du contrat.
Ainsi, la question que devait trancher le Tribunal administratif de Strasbourg concerne la qualification d’un contrat ayant pour objet de déployer, financer, exploiter, superviser et maintenir un réseau de bornes de recharge de véhicules électriques sur la voirie et le foncier public de Metz Métropole. En d'autres termes, ce contrat est-il un contrat de concession ?
Le Tribunal commence par rappeler l’objet du contrat dont il est question en l’espèce, un contrat de développement d’un réseau d'infrastructures de recharge pour véhicules électriques, qui prend la forme d’une convention-cadre d’une durée maximale de 15 ans, les titres d’occupation spécifiques à chaque station devant être conclus au fur et à mesure de leur installation et dans la limite de la durée maximale de la convention-cadre. Le cahier des charges de la consultation comporte, en outre, des prescriptions quant au nombre minimal de points de charge à installer et à leurs délais de déploiement, à leurs caractéristiques minimales techniques, esthétiques et environnementales, ainsi qu’à la qualité du service rendu aux usagers. Enfin, il prévoit que l’attributaire disposera de l’exclusivité sur le domaine public, mais uniquement pour des infrastructures de recharge d’une puissance inférieure ou égale à 50 kW par point de charge.
Puis étudiant les conditions de qualification d’un contrat de concession (contrat écrit conclu par un acheteur au sens du code de la commande publique, ayant pour objet de répondre à un besoin de l'autorité concédante et mettant à la charge du concessionnaire un risque d’exploitation opérationnel), le Tribunal administratif en conclut qu’il ne s’agit pas d’une concession.
Premièrement, les prescriptions et sujétions imposées dans le contrat ne dépassent pas les obligations liées à la gestion du domaine public.
Deuxièmement, le Tribunal juge que pour qu’il y ait concession, il faut que le contrat soit conclu pour les besoins de l’acheteur. Or, si le déploiement d’infrastructures de recharge pour véhicules électriques répond à un intérêt général s’attachant, pour Metz Métropole, à s’assurer de la satisfaction des besoins de sa population, il ne résulte pas de l’instruction qu’il concernerait les activités menées par ses services ou exercées pour leur compte, ni par suite que le contrat en litige aurait pour objet la satisfaction d’un besoin qui lui est propre. Ainsi, le Tribunal prend le contrepied des thèses développées par une partie de la doctrine selon qui le besoin satisfait n'est pas celui de l'autorité concédante mais celui des usagers de l'ouvrage ou du service concédé. Toutefois, comme le rappelle le Professeur Richer : « tant que n'a pas été inventée une procédure pour faire élire le concessionnaire par la collectivité des usagers, c'est encore la collectivité publique concédante qui est la mieux placée pour connaître les besoins et déterminer les moyens d'y satisfaire : l’intérêt des usagers devient le sien et, par le fait elle trouve un intérêt économique direct à l'exécution du contrat ».
Ce jugement rappelle l’affaire CE 19 janv. 2011, CCI de Pointe à Pitre où le Conseil d’Etat a pu juger que le contrat autorisant l'exploitation d'une boutique hors taxes dans un aérogare moyennant des obligations tenant à « la qualité du service, à l'aménagement des horaires d'ouverture et à l'insertion du commerce dans la réalité locale, notamment par la réalisation d'une vitrine de promotion des produits locaux et la création d'un espace guadeloupéen et d'une case à rhum » n’est pas une concession mais une convention d'occupation domaniale.
Troisièmement, et dernièrement, le pouvoir adjudicateur n’a pas entendu organiser un service public que la convention projetée aurait pour objet de déléguer au sens du code de la commande publique. En effet, « une personne privée qui assure une mission d'intérêt général sous le contrôle de l'administration et qui est dotée à cette fin de prérogatives de puissance publique est chargée de l'exécution d'un service public » (CE, 22 février 2007, APREI, req. n° 264541). Or au cas présent « le cahier des charges laisse le titulaire libre de fixer les tarifs qu’il appliquera aux usagers, ne lui confère aucune prérogative de puissance publique et ne prévoit aucun contrôle de son activité par Metz Métropole ». Il n’y a donc pas non plus de service public selon le TA. Toutefois, il sera possible d’objecter qu’il peut y avoir concession de service sans service public (voir sur ce point CE, 14 février 2017, req. n° 405157).
Le Tribunal en conclut donc que le référé précontractuel n’est pas recevable contre une convention ayant pour objet de développer un réseau d'infrastructures de recharge pour véhicules électriques sur le domaine public d’un pouvoir adjudicateur.