Veille juridique de la semaine du 8 avril 2024 (DPA)

Publié le 14/04/2024 Vu 1 237 fois 0
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Comme chaque semaine ci-dessous ma veille juridique en matière de droit public des affaires pour la semaine du 8 avril 2024. Excellente lecture !

Comme chaque semaine ci-dessous ma veille juridique en matière de droit public des affaires pour la semaine d

Veille juridique de la semaine du 8 avril 2024 (DPA)

Veille juridique semaine du 8 avril 2024

 

I.        Veille jurisprudentielle

I.1. Contrats publics

A.    C.E. 5 avril 2024, req. n° 489280 – Précisions sur les règles de recevabilité d’un pourvoi en cassation lorsqu’une ordonnance de référé contractuel est rendue.

B.    C.E. 10 avril 2024, req. n° 482722 – Rappel que le contrôle du juge sur l’appréciation des capacités de l'attributaire est un contrôle de l’erreur manifeste d'appréciation à cet égard.

C.    T.A. de Versailles, 5 avril 2024, req. n° 2202877 – Application du délai Czabaj aux titres exécutoires d’un marché public.

D.    T.A. de Lyon, 4 avril 2024, req. n° 2202541 - Est irrecevable le recours non précédé d’un mémoire de réclamation alors que les CCAG l’imposent, ce que ne saurait constituer une lettre n'exposant pas les motifs du désaccord.

E.     CAA Douai, 2e ch., 26 mars 2024, n° 22DA01355 – Le pouvoir adjudicateur qui paie mal, paie deux fois (même victime d’escroquerie).

F.     C.E. 11 avril 2024, req. n° 489440 – Le C.E. précise la notion de « contrôle de sa gestion » pour qualifier un pouvoir adjudicateur.

G.    T.A. de Nantes, 10 avril 2024, req. n° 1913502 – Le T.A. de Nantes confirme que la résiliation de NDDL est une résiliation pour motif d’intérêt général et donne rendez-vous pour un second round, une fois la convention résilisée.

I.2. Domanialité publique

A.    C.A.A. de Strasbourg, 11 avril 2024, req. n° 23NC03773 - Pas de suspension de l’obligation faite à l’administration fiscale de restituer la TVA perçue les redevances portuaires.

II.       Veille législative, réglementaire, autres …

II.1. Contrats publics

A.       Projet de loi Simplification – Vers une administrativisation (très regrettable) des contrats de la commande publique.

II.2. Droit de l’énergie

A.    Loi du 11 avril 2024 visant à protéger le groupe Électricité de France d’un démembrement

 

 

I.         Veille jurisprudentielle

I.1. Contrats publics

 

A.   C.E. 5 avril 2024, req. n° 489280 – Précisions sur les règles de recevabilité d’un pourvoi en cassation lorsqu’une ordonnance de référé contractuel est rendue.

 

1 – Faits et procédure. En l’espèce, l’UGAP a lancé une procédure d'appel d'offres ouvert pour la conclusion d'un accord-cadre à bons de commande, divisé en 14 lots, en vue de la fourniture de divers équipements de protection pour sapeurs-pompiers et policiers municipaux. La société Volkl GmbH et Co KG a présenté une offre pour le lot n° 8 et n’a pas été retenue. 

 

Elle intente un référé précontractuel devant le T.A. de Melun, entre -temps le contrat est tout de même signé. Par voie de conséquence, la requérante, dans ses mémoires ultérieurs saisi le même tribunal de conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 551-13 du Code de la commande publique tendant à ce qu'il prononce la nullité du contrat en cause.

 

Puis la société saisit le T.A. d’un second recours en référé contractuel.

 

 Le T.A. rejette le premier recours pour non-lieu à statuer, puis le second.

 

Le pourvoi en cassation critique la première ordonnance, notamment en tant qu’il n’a pas statué sur les demandes basées sur l’article L. 551-13 du CJA.

 

2 – Question de droit. Le pourvoi est-il recevable ?

 

3 – Solution juridique. En premier lieu, concernant le référé précontractuel, le Conseil d’État va sanctionner le T.A. d’avoir prononcé un non-lieu à statuer et non une irrecevabilité, alors que le contrat était déjà signé avant que le référé ne soit intenté. Ce que fera ensuite le Conseil d’État après avoir réglé l’affaire au fond.

 

En second lieu, concernant toujours le premier recours mais les mémoires ultérieurs fondés sur l'article L. 551-13 du Code de la commande publique, le C.E. relève que le juge de première instance n’a pas statué sur ces demandes dans sa première ordonnance. 

 

Toutefois, le C.E. souligne que le juge du référé contractuel a statué lors du second recours ayant le même objet que les mémoires déposés après la signature lors du premier recours lors d’une seconde ordonnance. De ce fait, l’intervention de cette seconde ordonnance prive d'objet le pourvoi que la société Volkl GmbH et Co KG a formé contre la première en tant qu'elle a omis de statuer sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 551-13 du code précité.

 

Le pourvoi est rejeté.

 

B.    C.E. 10 avril 2024, req. n° 482722 – Rappel que le contrôle du juge sur l’appréciation des capacités de l'attributaire est un contrôle de l’erreur manifeste d'appréciation à cet égard.

 

1 – Faits et procédure. En l’espèce, la commune de Gignac a lancé un projet d’extension de l’EHPAD « Le Micocoulier ». La société Spie Batignolles Malet, s’est vue attribuer un des quatorze lots du marché, celui « voiries réseaux divers », tandis que le lot « gros œuvre », était confié à la société Ibis Construction. 

 

Le marché prévoyait que l’ensemble des travaux seraient réalisés dans un délai de 17 mois mais cette échéance a été dépassée de plusieurs mois, essentiellement en raison de retards importants pris par la société Ibis construction.  

 

La société Spie Batignolles Malet a refusé de signer le projet de décompte général et formé une réclamation tendant à être indemnisée par la commune des préjudices qu’elle estime avoir subis du fait de l’allongement du chantier. 

 

La commune a rejeté implicitement cette réclamation et le T.A. de Montpellier a été saisi. Ce dernier a partiellement fait droit à la demande en condamnant la commune de Gignac à verser à la société Spie Batignolles Malet une somme d’environ 12 000 euros au titre du solde du décompte général et en condamnant in solidum la commune de Gignac, le maître d’œuvre et la société Ibis Construction, à lui verser une somme d’environ 81 000 euros, en réparation des préjudices subis du fait des retards. 

 

La C.A.A. de Toulouse a mis hors de cause le maître d’œuvre et confirmé le dispositif du jugement de première instance. 

 

La commune de Gignac se pourvoit en cassation contre cet arrêt. 

 

2 – Question de droit. L’arrêt doit-il être annulé ?

 

3 – Solution juridique. Les juges du Palais Royal vont annuler l’arrêt de la C.A.A. puisque :

 

·      d’une part,  elle a commis une erreur de droit en jugeant que la commune de Gignac avait commis une faute en raison du choix de l'attributaire du lot de gros œuvre au motif qu'elle avait commis une erreur d'appréciation des capacités de l'attributaire à conduire les travaux alors qu'il lui appartenait seulement de rechercher si la commune avait commis une erreur manifeste d'appréciation à cet égard

 

·      d’autre part, elle a commis une autre erreur de droit, en ne recherchant pas s'il existait un lien direct de causalité entre les fautes qu'elle a imputées à la commune de Gignac et les préjudices invoqués par la société Spie Batignolles Malet, résultant des frais supplémentaires liés à l'allongement du chantier.

L’affaire est donc renvoyée devant la C.A.A.

 

C.   T.A. de Versailles, 5 avril 2024, req. n° 2202877 – Application du délai Czabaj aux titres exécutoires d’un marché public.

 

1 – Faits et procédure. En l’espèce, le syndicat pour l'innovation, le recyclage et l'énergie par les déchets et ordures ménagères (ci-après le « SIREDOM ») a conclu avec plusieurs sociétés dont la société Gillard, un accord-cadre multi-attributaires pour l'acquisition de bennes et assimilés, pour la période du 6 mai 2017 au 31 décembre 2018, reconductible tacitement pour une durée maximale de quatre ans. 

 

Par un courrier de juin 2017, le SIREDOM a lancé l'appel d'offres en vue de la conclusion du premier marché subséquent de cet accord, relatif à l'acquisition et à la livraison de bennes pour les besoins de son réseau d'éco-centres. La société Gillard s'est vu attribuer ce marché. Par courrier du 27 juillet 2017, le SIREDOM informait la société Gillard de ce que son planning d'exécution induisait un retard conséquent dans l'exécution des prestations demandées, dépassant le délai contractuel du marché d'au minimum 12 jours et qu'il décidait en conséquence d'appliquer les pénalités prévues à l'article 8.4.2 du CCAP, à titre provisoire, pour un montant de 349 919,60 euros. Pour l'exécution de cette décision, un titre de recette de ce montant était émis par le SIREDOM le 28 juillet 2017, auquel se substituait un second titre de même montant le 8 août 2017. 

 

La société Gillard saisit le 7 avril 2022 le T.A. afin de faire condamner le SIREDOM de l'indemniser de divers préjudices résultant de l'application définitive de ces pénalités. Elle soutient notamment que sa requête introduite avant l'expiration du délai raisonnable d'un an à compter du rejet de sa DIP du 8 février 2021 est recevable, et qu’en tout état de cause, les manœuvres du SIREDOM consistant à transformer des pénalités provisoires en pénalités définitives ont rendu inapplicables les mécanismes prévus au contrat puisqu’il s’agirait d’une faute délictuelle. 

 

En défense le SIREDOM oppose une FNR tirée de l’irrecevabilité du recours en l'absence de mise en œuvre par la société requérante de la procédure de réclamation prévue par l'article 37 du CCAG FCS et qu’elle est à tout le moins tardive dès lors qu'elle n'a pas été introduite dans le délai de deux mois à compter du rejet de son recours gracieux, par courrier notifié le 29 août 2017. En outre, elle est également irrecevable dès lors que la société requérante n'invoque qu'un fondement de responsabilité extracontractuelle alors que le litige relève de l'exécution d'un contrat et que seule la responsabilité contractuelle peut ainsi être invoquée. 

 

2 – Question de droit. Le recours est-il recevable ?

 

3 – Solution juridique. En premier lieu, le T.A. va faire application de la jurisprudence Czabaj en énonçant que : 

·      concernant les titres exécutoires, sauf circonstances particulières dont se prévaudrait son destinataire, le délai raisonnable pendant lequel il peut intenter un recours ne saurait excéder un an à compter de la date à laquelle le titre, ou à défaut, le premier acte procédant de ce titre ou un acte de poursuite a été notifié au débiteur ou porté à sa connaissance.

 

·      l'expiration du délai permettant d'introduire un recours en annulation contre un titre exécutoire, dont l'objet est purement pécuniaire, fait obstacle à ce que soient présentées des conclusions indemnitaires ayant la même portée.

 

Or, au cas présent, les titres de perception ne comportent pas les mentions précises des voies et délais de recours à leur encontre, de sorte que le délai de recours contentieux prévu à l'article L. 1617-5 du CGCT n'est pas opposable à la requérante. Il résulte toutefois de l'instruction, que la société requérante a eu connaissance de ces titres concomitamment à leur émission, ainsi qu'en atteste les recours gracieux qu'elle a formés auprès du SIREDOM par courriers du 6 août puis du 19 septembre 2017, ainsi que la lettre de relance émise par la direction départementale des finances publiques de l'Essonne qu'elle indique avoir réceptionnée le 4 octobre 2017. Si les échanges entre la société requérante et le SIREDOM ont pu lui laisser légitimement penser que le syndicat était susceptible d'annuler ces pénalités ou de revoir leur montant, il résulte en tout état de cause de l'instruction que, par courrier du 18 janvier 2018, faisant suite à la transmission du DGD du marché par la société requérante, le SIREDOM a indiqué que les pénalités étaient maintenues, la société Gillard ayant pris acte, dans son courrier en réponse du 19 janvier 2018, de leur caractère définitif. 

 

Ainsi, la société Gillard disposait d'un délai d'un an à compter au plus tard du 19 janvier 2018 pour exercer un recours à l'encontre des titres de recette, soit jusqu'au 20 janvier 2019. 

 

Il en résulte que les titres de recette mettant à sa charge des pénalités de retard étant devenus définitifs à la date d'introduction de la requête, la société Gillard n'est pas recevable à former des conclusions indemnitaires tendant à ce que le SIREDOM soit condamné à lui rembourser le montant de ces pénalités.

 

En second lieu, le T.A. va rejeter l’argument de la requérante selon lequel il y aurait eu une faute délictuelle. En effet, dès lors que les parties étaient liées par des contrats et que les préjudices invoqués sont nés des modalités d'exécution de ces contrats, la société requérante n'est pas recevable, ainsi que le soutient le syndicat en défense, à rechercher sa responsabilité sur un autre terrain que celui de la responsabilité contractuelle. 

 

Le recours est donc rejeté. 

 

 

D.   T.A. de Lyon, 4 avril 2024, req. n° 2202541 - Est irrecevable le recours non précédé d’un mémoire de réclamation alors que les CCAG l’imposent, ce que ne saurait constituer une lettre n'exposant pas les motifs du désaccord.

 

1 – Faits et procédure. En l’espèce, le département du Rhône a entrepris la restructuration d’un collège. La maîtrise d'œuvre de l'opération est confiée à un groupement constitué des sociétés Alain Lelievre, mandataire, et CET Ingénierie. La société Alain Lelièvre demande la condamnation de la métropole de Lyon, venue aux droits du département du Rhône, à lui verser la somme de 16 237,13 euros TTC en règlement du solde lui revenant de ce marché.

 

L’article 37 des CCAG-PI prévoyait que lorsqu'intervient, au cours de l'exécution d'un marché, un différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur, résultant d'une prise de position écrite, explicite et non équivoque émanant de ce dernier et faisant apparaître le désaccord, le titulaire doit présenter, dans un délai de 2 mois, une lettre de réclamation, à peine d'irrecevabilité de la saisine du juge du contrat.

 

Ainsi, la métropole de Lyon demande le rejet de la requête pour irrecevabilité, faute de réclamation préalable présentée conformément à l'article 37 du CCAG-PI auquel renvoie l'article 28 du CCAP du marché. De plus, selon elle, l'absence de décision de réception des prestations fait obstacle, en application de l'article 11.8 du CCAG-PI, au règlement du solde du marché or aucun décompte général et définitif n'est intervenu. En outre, elle fait prévaloir qu’en tout état de cause, le lot n° 4 de l'opération de travaux n'a donné lieu à l'établissement d'aucun décompte général de sorte que les prestations de maîtrise d'œuvre ne peuvent être regardées comme achevées.

 

2 – Question de droit. Le recours est-il recevable ?

 

3 – Solution juridique. Le T.A. va rejeter le recours puisqu’à la suite de la transmission le 5 avril 2021 par la société Alain Lelièvre de la note d'honoraires finale à la métropole de Lyon cette dernière a, par un courrier du 11 janvier 2021, refusé de procéder à son paiement au motif que des lots de travaux n'étaient pas encore soldés. Le courrier de réponse du 7 avril 2021 de la société Alain Lelièvre, qui se borne à réitérer cette demande de paiement, n'expose pas les motifs de son désaccord avec le maître d'ouvrage s'agissant de la fin de ses missions en l'absence de solde de tous les lots. 

 

Dès lors que la société Alain Lelièvre ne justifie ainsi pas avoir adressé une lettre de réclamation à la métropole de Lyon, cette dernière est fondée à opposer, en application de l'article 37 du CCAG-PI, l'irrecevabilité contractuelle de la requête, qui est donc rejetée.

 

E.    CAA Douai, 2e ch., 26 mars 2024, n° 22DA01355 – Le pouvoir adjudicateur qui paie mal, paie deux fois (même victime d’escroquerie).

 

1 – Faits et procédure. En l’espèce, l’office public de l’habitat du département de la Seine-Maritime (ci-après « Habitat-76 ») a attribué à la société Brunet l’exécution du lot n° 1 « chaufferie » du marché de travaux relatif à la création de la chaufferie collective et à la réfection des gaines de désenfumage de l’institution médico-sociale de Bolbec pour un montant de 312 700 euros HT. 

 

Après un échange téléphonique avec un individu se présentant comme un agent des services d’Habitat 76, la société Brunet a transmis le 2 août 2018 les factures correspondant au paiement en litige à une adresse électronique ne correspondant pas au nom de domaine habituel de l’office. Le 29 août 2018, la même personne a demandé à la société Brunet de lui communiquer les attestations d’assurance de la société aux fins de règlement des factures. Le 22 août 2018, un individu se présentant comme le « comptable d’agence » de la société Brunet a adressé, après un échange téléphonique avec un agent d’Habitat 76, un courriel à ce dernier lui demandant le paiement d’un montant de 47 740,80 euros HT, correspondant à la situation de travaux n° 1 jointe à son message, et indiquant que les coordonnées bancaires de la société Brunet avaient changé depuis le 10 août 2018, communiquant à cet effet un document présenté comme une attestation relative à la modification des coordonnées bancaires de la société Brunet. Le paiement d’une somme de 58 729,99 euros TTC est intervenu le 5 septembre 2018 par virement sur ce compte appartenant à une société dénommée « Sycam ». 

 

Ces faits ont donné lieu à des dépôts de plaintes par les parties les 19 et 24 septembre 2018.

Ces travaux ont été réceptionnés le 24 octobre 2018 avec des réserves qui ont été levées le 19 novembre 2018. 

 

Le 11 octobre 2019, après une mise en demeure, Habitat-76 a notifié au titulaire du lot le décompte général arrêté à la somme de 321 760 euros HT. La société Brunet a contesté ce décompte par un mémoire en réclamation reçu le 25 octobre 2019, sollicitant le paiement de la somme de 47 740,80 euros HT, soit 57 288,96 euros TTC, correspondant à la situation de travaux n° 1. Habitat-76 a rejeté cette réclamation par une lettre du 14 novembre 2019. 

 

Habitat-76 relève appel du jugement n° 2000473 du 26 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Rouen l’a condamné à verser à la société Brunet la somme de 57 288,96 euros TTC correspondant au montant de la situation de travaux n° 1 du marché, augmentée, à compter du 21 juillet 2018, des intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations principales de refinancement les plus récentes en vigueur au premier jour du second semestre de l’année 2018, majoré de huit points de pourcentage, ces intérêts étant capitalisés à compter du 10 février 2020 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

 

Il soutient que :

·       le paiement qu’il a effectué est libératoire dès lors que l’escroquerie n’a été rendue possible que par la faute initiale commise par un employé de la société requérante qui a transmis, sans s’assurer préalablement que la demande émanait de ses services, la situation de travaux ainsi que l’attestation d’assurance à une adresse électronique ne correspondant pas à celles qu’utilisent ses agents ;

 

·      à titre subsidiaire, les fautes commises par la société doivent conduire à minorer la somme qu’elle a été condamnée à lui verser.

 

2 – Question de droit. Le paiement à un tiers escroc libère-t-il la personne publique de son paiement ?

 

3 – Solution juridique. La C.A.A. commence par rappeler l’article 1342-3 du Code civil selon lequel « le paiement fait de bonne foi à un créancier apparent est valable ». 

 

Puis, elle énonce qu’« il appartient à une personne publique de procéder au paiement des sommes dues en exécution d’un contrat public en application des stipulations contractuelles, ce qui implique, le cas échéant, dans le cas d’une fraude résidant dans l’usurpation de l’identité du cocontractant et ayant pour conséquence le détournement des paiements, que ces paiements soient renouvelés entre les mains du véritable créancier ».

 

Or, au cas présent, l’auteur de l’escroquerie présumée s’est présenté comme le comptable de la société Brunet mais n’avait auparavant jamais été en contact avec Habitat 76, le numéro de téléphone mentionné étant notamment inconnu jusqu’alors. 

 

En outre, le courriel reçu par Habitat 76 demandant le paiement de la facture affichait une adresse électronique dont le nom de domaine était, à dessein, très proche de celui utilisé par la société Brunet, l’adresse réellement utilisée par l’auteur de l’escroquerie présumée était également visible et comportait un nom de domaine qui n’était pas utilisé par l’entreprise. 

 

De plus, l’attestation produite par l’auteur présumé de l’escroquerie n’était ni datée ni signée, mentionnait comme date de clôture du précédent compte bancaire la date du 1er août 2018, alors que la date indiquée dans le courriel était le 10 août 2018. 

 

Enfin, le titulaire de ce que l’auteur de l’escroquerie présumée présentait comme le nouveau compte bancaire était une autre société dénommée « Sycam », dont l’adresse de domiciliation était certes identique à celle de l’établissement secondaire « Brunet Lacheray », mais n’était cependant pas celle du siège de la société Brunet

 

Ce dont il résulte selon la C.A.A. de Douai que « compte tenu de ces incohérences, qui auraient dû donner lieu à des investigations et vérifications complémentaires, notamment auprès des responsables de la société Brunet habituellement en contact avec Habitat 76, ce dernier n’a pu légitimement croire se trouver en présence du véritable créancier. La circonstance que l’escroquerie présumée ait été rendue possible par la communication préalable par la société Brunet de factures est à cet égard sans incidence et ne peut caractériser un manquement à ses obligations contractuelles. Par suite, le paiement effectué le 5 septembre 2018 par Habitat 76 à la société Sycam n’a pas été fait à un créancier apparent et n’a donc pas libéré Habitat 76 de sa dette contractuelle à l’égard de la société Brunet ».

 

Ainsi, Habitat 76 n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le T.A. de Rouen l’a condamné à verser à la société Brunet la somme de 57 288,96 euros TTC.

 

F.    C.E. 11 avril 2024, req. n° 489440 – Le C.E. précise la notion de « contrôle de sa gestion » pour qualifier un pouvoir adjudicateur.

 

1 – Faits, procédure et question de droit. En l’espèce, la C.A.A. de Bordeaux a par application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, posé la question suivante au C.E. :

 

« l'encadrement législatif et réglementaire de l'activité des institutions sociales et médico-sociales privées mentionnées à l'article L. 311-1 du code de l'action sociale et des familles, gestionnaires d'une manière permanente des établissements et services sociaux et médico-sociaux mentionnés notamment au 2° et au 7° de l'article L. 312-1 du même code, dans les conditions fixées par les dispositions du livre III de ce code citées au point 5, révèle-t-il l'existence d'un contrôle actif d'un pouvoir adjudicateur sur la gestion de ces organismes, au sens et pour l'application du b) du 2° de l'article L. 1211-1 du code de la commande publique, permettant de les qualifier de pouvoirs adjudicateurs »

 

2– Solution juridique. Le C.E. considère qu’il résulte de l’article L. 1211-1 du Code de la Commande publique et de l’article 2 de la directive 2014/24/UE, telles qu'éclairées par la jurisprudence de la C.J.U.E., notamment l'arrêt du 3 février 2021, Federazione Italiana Giuoco Calcio (C 155/19 et C-156/19), que la gestion d'une personne morale de droit privé est regardée comme soumise à un contrôle par un pouvoir adjudicateur lorsqu'une autorité publique exerce un contrôle actif de sa gestion qui, dans les faits, remet en cause son autonomie, au point de permettre à cette autorité d'influencer ses décisions en matière d'attribution de marchés. Ce contrôle doit être de nature à créer une situation de dépendance à l'égard de l'autorité publique, équivalente à celle qui existe lorsque l'activité de la personne morale de droit privé est financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur ou lorsque son organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par un pouvoir adjudicateur. Le fait que l'autorité publique puisse imposer un profil de gestion déterminé est un indice de l'existence d'un tel contrôle, ainsi qu'il résulte de l'arrêt de la Cour de justice du 1er février 2001, Commission c. France (C-237/99). 

 

En revanche, selon le C.E. en principe, un contrôle, a posteriori, de la régularité de l'activité de la personne morale de droit privé par l'autorité publique de tutelle ne s'apparente pas à un contrôle de sa gestion.

 

Puis faisant application de ces règles, le C.E. juge que les gestionnaires de droit privé des établissements et services sociaux et médico-sociaux ne sauraient être regardés comme un pouvoir adjudicateur. 

 

En effet, il résulte de leur statut législatif et réglementaire que « les personnes morales de droit privé gestionnaires des établissements et services sociaux et médico-sociaux énumérés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, y compris les organismes à but lucratif, ne sont soumises qu'à un contrôle de régularité, y compris lorsqu'est en cause, s'agissant des établissements à but non lucratif, des dysfonctionnements dans leur gestion financière. Si certains de ces contrôles, en matière de garantie d'emprunt et de programmes d'investissements, sont exercés a priori, ils sont destinés à garantir le respect de la réglementation tarifaire et n'ont, pas davantage que les autres contrôles, pour objet ou pour effet de remettre en cause l'autonomie de gestion de ces personnes privées. Les établissements et services sociaux et médico-sociaux ne sont ainsi pas soumis, du fait de ces dispositions, à un contrôle actif de leur gestion permettant aux autorités publiques d'influencer leurs décisions en matière d'attribution de marchés ».

 

De sorte que, «  le contrôle exercé par l'administration sur ces organismes n'est pas de nature à créer une situation de dépendance à l'égard de l'autorité publique, équivalente à celle qui existe notamment lorsque l'organe de direction de la personne morale de droit privé est composé de membres dont plus de la moitié sont désignés par un pouvoir adjudicateur ».

 

G.   T.A. de Nantes, 10 avril 2024, req. n° 1913502 – Le T.A. de Nantes confirme que la résiliation de NDDL est une résiliation pour motif d’intérêt général et donne rendez-vous pour un second round, une fois la convention résilisée.

 

1 – Faits et procédure. En l’espèce, une convention de concession passée entre l’Etat et la société concessionnaire Aéroports du GrandOuest pour la concession des aérodromes de Notre-Dame-des-Landes, Nantes-Atlantique et Saint-Nazaire-Montoir est approuvée par décret en 2010. Celle-ci prévoyait d’une part la construction et l’exploitation d’un nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), et d’autre part l’exploitation des deux aéroports existants de Nantes-Atlantique et de Saint-Nazaire Montoir. Elle prévoyait que l’exploitation de l’aéroport de Nantes-Atlantique cesserait à partir de la mise en service de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. 

 

Or, par une décision du 17 janvier 2018, l’Etat a renoncé au projet de construction d’un nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes et, par un arrêté du 24 octobre 2019, il a prononcé la résiliation de la concession. 

 

Le deuxième alinéa de l’article 1er de cet arrêté prévoit que cette résiliation prendra effet « à la plus tardive des deux dates entre la date d’entrée en vigueur de la convention de concession à conclure avec le nouveau concessionnaire des aérodromes de Nantes-Atlantique et de Saint-Nazaire Montoir et la date de notification à ce dernier du certificat prévu à l’article L. 6331-3 du code des transports ».

 

Au jour où le T.A. a rendu le jugement commenté, la nouvelle convention de concession n’a pas été conclue, de sorte que la société AGO continue à exploiter les aéroports existants en vertu de la convention de concession approuvée le 29 décembre 2010. 

 

La société AGO demande au T.A. d’ordonner une expertise avant dire droit sur le calcul du manque à gagner, ainsi que, à titre principal, de déclarer irrégulier l’arrêté du 24 octobre 2019, de requalifier la résiliation prononcée en une résiliation pour faute de l’Etat et de condamner l’Etat à lui verser la somme de 1 599 079 001 euros, et à titre subsidiaire, de condamner l’Etat à lui verser la somme de 1 413 157 000 euros.

 

La demanderesse soutient que : 

·      l’arrêté du 24 octobre 2019, qui modifie unilatéralement des stipulations financières de la concession, porte atteinte à l’équilibre financier du contrat ;

 

·      cet arrêté est entaché d’incompétence car cette modification unilatérale des stipulations financières ne pouvait, sans méconnaître l’article R. 223-2 du code de l’aviation civile, être décidée par un arrêté ministériel ;

 

·      aucun motif d’intérêt général n’est de nature à justifier la résiliation de la convention ;

 

·      les nombreux manquements commis par l’Etat dans l’exécution de ses obligations contractuelles justifient la résiliation aux torts de ce dernier ;

 

·      à titre subsidiaire, si la résiliation est reconnue d’intérêt général, elle doit être indemnisée en application de l’article 4.D.V de la concession, selon les modalités prévues par le II de son article 81, sans retenir l’interprétation donnée par le Conseil d’Etat dans son avis consultatif du 26 avril 2018 ;

 

·      quel que soit le motif de résiliation retenu, elle doit être indemnisée des préjudices résultant de l’abandon du projet et de la résiliation de la concession, de ceux résultant de la modification unilatérale de la concession et de ceux subis dans le cadre de l’exécution de la concession.

 

En défense, l’État soutient que :

 

·      les conclusions tendant à l’annulation de l’arrêté du 24 octobre 2019, en tant qu’il résilie la concession et qu’il en modifierait certaines clauses sont irrecevables ;

 

·      les conclusions indemnitaires sont irrecevables faute d’avoir été précédées d’une procédure de conciliation préalable ;

 

·      la résiliation a été prononcée pour un motif d’intérêt général en application de l’article 4.D.V du cahier des charges de la concession ;

 

·      le manque à gagner pourrait être indemnisé selon les préconisations de l’avis du Conseil d’Etat, à condition que les fonds propres injectés par le concessionnaire ne lui procurent aucune autre source de rémunération.

 

2 – Question de droit. Sur quel fondement le concessionnaire peut-il obtenir une indemnisation ?

 

3 – Solution juridique. En premier lieu, le T.A. va considérer que l’obligation prévue à l’article 94 du cahier des charges de la concession tenant à l’organisation d’une procédure de conciliation préalable en cas de différends résultant de l’application de la concession a été respectée puisque la société AGO a sollicité cette conciliation en 2019. Il juge que d’une part, la circonstance la circonstance que la résiliation n’avait pas encore pris effet n’empêchait pas qu’un différend existe entre les parties concernant le montant de l’indemnité née de celle-ci et d’autre part que c’est l’Etat - qui a également refusé la médiation proposée par le tribunal - n’a jamais répondu favorablement à l’offre de conciliation de son concessionnaire.

 

Ainsi, le recours est bien recevable. 

 

En deuxième lieu, le T.A. rappelle les règles relatives aux résiliations des contrats publics :

 

« En vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, l’autorité concédante peut toujours, pour un motif d’intérêt général, résilier un contrat de concession, sous réserve des droits à indemnité du concessionnaire. L’étendue et les modalités de cette indemnisation peuvent être déterminées par les stipulations du contrat, sous réserve qu’il n’en résulte pas, au détriment d’une personne publique, une disproportion manifeste entre l’indemnité ainsi fixée et le montant du préjudice résultant, pour le concessionnaire, des dépenses qu’il a exposées et du gain dont il a été privé. »

 

D’abord, concernant le bien-fondé de la résiliation, le T.A. considère que la résiliation est bien motivée par des considérations d’intérêt général puisque :

 

·      L’abandon du projet de construction d’un nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes a été décidé en prenant en compte la situation de blocage née des fortes oppositions et intenses divisions autour du projet et les réalités économiques du développement des transports et de l’organisation aéroportuaires, alors même que l’État aurait tenté de sauver le projet en conciliant les intérêts des différentes parties prenantes. 

 

·      Les circonstances selon lesquelles « le projet aurait été reconnu d’utilité publique et que le rapport de la mission de médiation aurait mal anticipé l’évolution du trafic aérien » ne sont pas suffisantes pour caractériser une faute de l’État.

 

·      Le contrat de concession prévoit explicitement, dans son article 4.D que « V. – Le renoncement de l’Etat au projet de l’aérodrome NDDL est assimilé à une résiliation de la concession pour motif d’intérêt général. (…). »

 

Par voie de conséquence, le régime d’indemnisation tiré des résiliations fautives aux torts du cocontractant public est inapplicable. 

 

Ensuite, le T.A. juge qu’il ne s’agit pas non plus d’une modification du contrat : 

 

·      Il considère que la modification apportée au dernier alinéa du II de l’article 81 par l’arrêté de résiliation du 24 octobre 2019 pour prévoir que l’indemnité de résiliation est payable, à hauteur de 30% à la date de prise d’effet de la résiliation et à hauteur de 70% six mois après cette même date n’est pas une modification du contrat, mais une application de celle-ci. Il s’agit d’une interprétation du contrat de nature à le rendre applicable, dès lors, que selon le T.A. la résiliation a été prononcée à effet différé, hypothèse qui n’est pas prévue par le contrat, que la date d’effet de celle-ci dépend de la désignation d’un nouveau concessionnaire, et enfin que le montant de l’indemnité de résiliation ne peut être déterminé sans connaître cette date d’effet.

 

·      De même, concernant la modification du a de l’article 4M du cahier des charges qui interdit le versement de dividendes au titre des ressources tirées de l’exploitation de NA et SN, le T.A. juge que cette explication l’explicitation apportée au contrat ne peut être regardée comme une modification unilatérale irrégulière ou de nature à en bouleverser l’économie générale.

 

Encore, concernant les fautes de l’État :

 

·      Le T.A. juge qu’il ne s’agit pas d’un cas de fait du prince car d’une part « les difficultés rencontrées dans le maintien de l’ordre public ont pour origine non pas la carence de l’Etat mais les fortes oppositions au projet » (sic) et d’autre part, car le V. de l’article 4.D du cahier des charges de la concession mentionne l’hypothèse du renoncement au projet d’aéroport sur le site de Notre-Dame-des-Landes, ce qui témoigne du caractère non imprévisible de ces difficultés et oppositions. En outre, le T.A. souligne que l’article 4A du cahier des charges de la concession stipule que « Le concessionnaire assume, à ses frais, risques et périls, toutes les charges et prérogatives liées à sa qualité de maître d’ouvrage » (sic).

 

Par ailleurs, le T.A. va juger que la requérante n’est pas fondée à demander à être indemnisée des frais liés à l’allongement des délais de mise en oeuvre du projet de construction :

 

·      le projet de nouvel aéroport a été abandonné avant tout investissement dans les travaux prévus, de sorte que la société demanderesse ne peut légitimement revendiquer l'extension des délais prévus pour la mise en service de NDDL selon l'article 4.D du cahier des charges de la concession. 

 

·      le paragraphe V de cet article 4.D, qui envisage la possibilité d'abandonner le projet, renvoie dans ce cas aux modalités d'indemnisation définies par le paragraphe II de l'article 81, excluant ainsi une autre indemnisation pour des délais devenus sans objet. 

 

·      l'État n'est pas lié au groupement d'entreprises solidaires appelé GCC, avec lequel AGO a signé un contrat de conception-construction, donc AGO ne peut invoquer les dispositions de ce contrat pour établir une faute de l'État.

 

·      la prise en compte des recommandations environnementales d'un groupe d'experts de l'État et le maintien de la structure de maîtrise d'ouvrage faisaient partie des responsabilités confiées à la société AGO par le contrat de concession. 

 

·      le fait que les bénéfices réalisés par la société AGO aient dépassé les prévisions, entraînant une augmentation des redevances dues au concessionnaire et une augmentation de la participation versée aux salariés, ne viole aucune disposition contractuelle et ne peut donc être considéré comme une faute.

 

En sus, le T.A. rejette la demande d’indemnisation pour des frais juridiques et de conseil, des pertes découlant d'acquisitions foncières et des investissements réalisés à la demande de l'État sur les aéroports de Nantes-Atlantique et Saint-Nazaire-Montoir : 

 

·      selon le T.A. elle n'allègue aucune violation contractuelle à l'origine de ces préjudices.

 

·      le contrat stipule que le concessionnaire assume à ses frais et risques les charges de la maîtrise d'ouvrage du projet, donc AGO ne peut réclamer le remboursement des frais juridiques engagés. Pour la même raison, AGO ne peut pas non plus demander le remboursement des coûts liés aux acquisitions et rétrocessions foncières, qui seront éventuellement pris en compte dans le calcul de la valeur non amortie des biens de retour en cas de résiliation. 

 

·      étant donné que le cahier des charges précise dans son article 1er que la requérante est responsable de réaliser les investissements nécessaires à l'exploitation des aéroports de Nantes et Saint-Nazaire, elle ne peut prétendre à une indemnisation à ce titre. 

 

·      les frais de conseil liés à la défense d'AGO contre l'État ne sont pas distincts des frais de la présente instance. Par conséquent, la société requérante n'a pas de fondement pour demander une indemnisation des divers préjudices examinés à ce point.

 

En troisième lieu, en ce qui concerne les demandes indemnitaires relatives aux conclusions présentées à titre subsidiaire en lien avec la résiliation pour motif d'intérêt général, le tribunal reconnaît traditionnellement que cette résiliation donne droit à une indemnité. Cette indemnité couvre les dépenses engagées par le concessionnaire et sa perte de revenus telles que définies dans les dispositions contractuelles.

 

Cependant, à la date du jugement, conformément à l'article 1er de l'arrêté du 24 octobre 2019, la résiliation n'a pas encore pris effet, donc le calcul et le versement de l'indemnité ne pourront être effectués qu'au moment où la résiliation prendra effet. Par conséquent, la société AGO n'est pas encore en mesure de demander que l'État soit condamné à lui verser une indemnité en raison de la résiliation pour motif d'intérêt général.

 

Comme demandé par la requérante, celle-ci a droit à la valeur non amortie des biens de retour tels que définis par les stipulations contractuelles. Cependant, comme précédemment expliqué, le montant de l'indemnité due à ce titre ne pourra être déterminé qu'au moment de la prise d'effet de la résiliation, et son versement dépendra de la désignation du futur concessionnaire, qui assumera finalement la charge de ces biens, conformément à l'annexe 1 à l'arrêté du 30 décembre 2009 concernant les modalités de déclaration des exploitants d'aérodromes pour l'établissement du tarif passager de la taxe d'aéroport. Par conséquent, il convient également de suspendre la décision sur ce point.

 

Le tribunal devra donc ultérieurement déterminer le montant de cette indemnité, en tenant compte notamment des éventuels avantages obtenus par la société AGO ou ses sociétés actionnaires si elles sont désignées comme nouveaux concessionnaires de l'aéroport de Nantes-Atlantique.

 

I.2. Domanialité publique

 

A.   C.A.A. de Strasbourg, 11 avril 2024, req. n° 23NC03773 - Pas de suspension de l’obligation faite à l’administration fiscale de restituer la TVA perçue les redevances portuaires.

 

1 – Faits et procédure. Le Port autonome de Strasbourg (PAS) alloue 28 places de stationnement aux propriétaires de bateaux utilisés à des fins d'habitation.

 

Chaque occupant doit verser une redevance annuelle composée d'une part correspondant à l'occupation privative du domaine public fluvial et d'autre part à des frais de raccordement aux réseaux collectifs (eau, assainissement, électricité, téléphone).

 

Le 25 novembre 2021, l'administration fiscale informe le PAS que toutes les redevances perçues sont soumises à la taxe à la valeur ajoutée (TVA).

 

Par un jugement du 6 novembre 2023, le tribunal administratif de Strasbourg annule cette décision du 25 novembre 2021 et ordonne à l'administration fiscale de reconnaître que les redevances perçues par le PAS ne sont pas assujetties à la TVA. Le ministre de l'économie et des finances interjette appel de ce jugement.

 

En attendant une décision définitive, le ministre demande à la cour administrative d'appel de suspendre temporairement l'exécution du jugement.

 

2 – Question de droit. La cour doit déterminer si les conclusions du tribunal administratif sont justes quant à la non-assujettissement des redevances perçues par le PAS à la TVA.

 

3 – Solution juridique. L'appelant soutient que le tribunal a commis des erreurs en considérant la recevabilité du recours pour excès de pouvoir dirigé contre un avis non décisoire et en affirmant que l'administration avait erré en considérant les redevances assujetties à la TVA. Il argue également que le tribunal a mal interprété les principes fiscaux européens et nationaux relatifs à la TVA.

 

Cependant, aucun des arguments avancés par l'appelant ne semble justifier l'annulation ou la modification du jugement attaqué, ni le rejet du recours pour excès de pouvoir accueilli par ce jugement.

 

En l'état actuel de la procédure, les arguments présentés en appel ne semblent pas justifier une annulation ou une modification du jugement initial.

 

 

 

II.         Veille législative, réglementaire, autres …

 

II.1. Contrats publics

 

A.   Projet de loi Simplification – Vers une administrativisation (très regrettable) des contrats de la commande publique.

 

L’article 5 du Projet de Loi Simplification dispose que « I. Le Code de la commande publique est ainsi modifié : 1°/ A la première phrase du premier alinéa de l’article L. 6, les mots : « S’ils sont conclus par des personnes morales de droit public » sont supprimés ». S’en suit une harmonisation visant à supprimer toute référence aux contrats administratifs, pour unifier les règles de la commande publique applicable aux contrats de ce genre passés par des personnes privées. 

 

Ainsi, le Projet de Loi « administrativise » les contrats privés de la commande publique !

 

L'article 17 du Projet de Loi vise à simplifier les démarches liées aux projets stratégiques, notamment en dispensant de l'obligation de passer par une procédure de mise en concurrence les marchés publics  d'installations de production d'énergie renouvelable en mer et leur raccordement, ainsi que des dérogations aux règles de l'allotissement.

 

II.2. Droit de l’énergie

 

A.   Loi du 11 avril 2024 visant à protéger le groupe Électricité de France d’un démembrement

 

La législation révise le Code de l'énergie pour stipuler que EDF est désormais une société anonyme d'intérêt national, entièrement détenue par l'État, en réponse à l'offre publique d'achat simplifiée qui a abouti à la possession totale du capital de l'entreprise par l'État depuis juin 2023. Cette détention entière du capital de l'entreprise EDF par l'État pourrait être réduite par la participation des salariés de l'entreprise au capital.

 

En outre, la loi établit un contrat décennal entre EDF et l'État, sujet à révision tous les trois ans, afin de fixer la trajectoire financière et d'investissement de l'entreprise et de concrétiser opérationnellement ses trois principaux objectifs :

- la réduction des émissions de carbone dans la production d'électricité ;

- le contrôle des tarifs pour les ménages et les entreprises ;

- l'adaptation des capacités de production à l'évolution de la demande d'électricité.

 

Enfin, la loi élargit l'accès aux tarifs réglementés de vente d'électricité (TRVe) à toutes les petites communes et les TPE à partir du 1er février 2025, indépendamment de la puissance de leur compteur électrique. Actuellement, seules les TPE et les petites communes équipées de compteurs d'une puissance inférieure ou égale à 36 kilovoltampères (kVA) bénéficient de ces tarifs. Cette modification vise à inclure un plus grand nombre de petites entreprises telles que les boulangers, les restaurateurs, les fleuristes ainsi que d'autres secteurs tels que l'agriculture, qui ont besoin d'une consommation électrique importante.

 

D'après le ministre en charge de l'industrie et de l'énergie, cette extension devrait toucher un million de TPE supplémentaires et 10 000 communes.

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A propos de l'auteur
Blog de Droit public des affaires by Florent Cedziollo

Élève-avocat et passioné par le Droit public des affaires, je vous propose de retrouver mes articles et veilles juridiques à travers ce site internet.

D'une grande curiosité, j'aime également étudier et écrire sur des sujets relatifs au droit de la concurrence ou au droit international des affaires, voire même à l'économie.

Du fait de ma formation universitaire, étant notamment Normalien en Droit-Économie-Management, j'aime allier pratique et théorie.

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