Ces trois types d'œuvres sont issus des nouvelles technologies, qui tendent à perturber le droit d'auteur. En effet, le processus de production de ces œuvres nouvelles désassemble capital économique et capital intellectuel.
- Les œuvres logicielles
Le logiciel est une œuvre de l'esprit appréhendée par l'article L 112-2 13° du CPI. Cependant, des difficultés subsistent encore et toujours quant à son système de protection mêlant à la fois droit d'auteur et droit des brevets. La protection par le droit des brevets a été refusée par le législateur et la protection par le droit d'auteur, bien que farfelue, s'est ainsi imposée. La loi du 3 Juillet 1985 mentionne à cet effet les œuvres logicielles comme étant des œuvres de l'esprit, un statut qui sera par la suite conforté par la loi du 10 mai 1994. Les œuvres de l'esprit de l'article précité mentionnent notamment les logiciels mais aussi le matériel de conception préparatoire.
Ensuite, il faut noter qu'il n'y a pas véritablement de définition établie de la notion d'"œuvre logicielle" étant donné qu'une définition règlementaire existe mais que la doctrine la considère comme dépassée (arrêté du 22 décembre 1981 sur l'enrichissement de la langue française: "il s'agit de l'ensemble des programmes , procédés et règles et éventuellement de la documentation, relatif au bon fonctionnement d'un ensemble de données"). La doctrine l'appréhende alors plus comme un programme destiné à une machine et ayant pour destination le traitement d'une information donnée.
Pour être protégées, les œuvres logicielles doivent comme toute œuvre être un objet protégeable et faire preuve d'originalité. Sont protégés, comme cela a été dit précédemment, les logiciels ainsi que le matériel de conception préparatoire. Mais que regroupe ce dernier terme ? Le matériel de conception préparatoire est composé de l'"ensemble des travaux de conception aboutissant au développement d'un programme, à condition qu'ils soient de nature à permettre la réalisation d'un programme d'ordinateur à un stade ultérieur" (définition donnée par la directive communautaire relative à la protection des programmes d'ordinateur).
Seule la forme d'expression demeure protégée, et les travaux préparatoires sont seulement protégeables que s'ils remplissent la condition d'originalité indissociable du droit d'auteur. Il faut cependant savoir que tous les éléments d'un logiciel, qui est un programme complexe, ne sont pas protégés sur le même pied d'égalité. Les codes sources sont strictement protégés par la loi (ce sont l'expression même du logiciel), mais en ce qui concerne les codes objets (expression liée à la machine elle- même), les langages de programmation tels que Java, Perl ou Dbase sont du domaine public sont librement utilisables.
Les logiciels libres
Ils entrent en marge du droit de la propriété intellectuelle car leur code source est mis à disposition du public de manière gratuite. Le public peut donc le copier, le diffuser ou encore le modifier. Toutefois ces logiciels n'appartiennent pas au domaine public contrairement aux apparences et restent soumis au respect du droit d'auteur. Leur utilisation se fait dans le cadre du respect d'une licence- type.
La protection de ces logiciels dépend d'un régime spécial, mis en évidence par des arrêts de la Cour de Cassation (Cass., crim., 21 juin 2000; Civ 1., 27 avril 2004).
Il a fallu adopter le critère d'originalité pour protéger les œuvres logicielles, ce qui fut fait en pratique par l'arrêt "Pachot" de 1991. Ainsi l'originalité, qui est la marque de l'apport intellectuel de l'auteur de l'œuvre, résulte d'un "effort personnalisé allant au- delà de la simple mise en œuvre d'une logique automatique et contraignante".
Le régime dérogatoire des logiciels provient également du fait que le créateur du logiciel a le plus souvent le statut de salarié, impliquant une conjoncture à la fois financière et intellectuelle. Néanmoins, l'existence d'un contrat de travail entre le salarié et son employeur n'affecte pas la qualité d'auteur du salarié, mais les droits patrimoniaux sur l'œuvre demeureront dévolus à l'employeur si le salarié a créé le logiciel dans l'exercice de ses fonctions ou d'après les instructions de son employeur (dévolution de lege de ses droits patrimoniaux à l'employeur). Seul le droit moral restera toujours attaché à l'auteur, le salarié.
- Les bases de données
Les bases de données sont protégées à la fois sous la protection du droit d'auteur et d'un droit sui generis au producteur de la base, comme pour le critère de substantialité de l'investissement (loi n° 98-536 du 1er juillet 1998). Ces protections peuvent se substituer l'une à l'autre ou se cumuler. L'article L 112-3 CPI vise les bases de données comme étant un "recueil d'œuvres, de données ou d'autres éléments indépendants , disposés de manière systématique ou méthodique, et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou par tout autre moyen".
La base se caractérise donc par la structuration d'éléments au départ indépend ants mais avec la possibilité d'accéder à chacun de ces composants de manière individuelle. La support de la base n'a que peu d'intérêt juridique. Le CPI appréhende concrètement les bases de données comme des œuvres composites ou dérivées (le travail de compilation n'est pas protégé en soi mais il y a un droit d'auteur attaché aux œuvres premières).
La protection sui generis des bases de données résulte de la volonté d'encouragement et de protection des investissement dans les systèmes assurant une fonction de stockage et de traitement des données contribuant à l'essor du marché des NTIC. La personne qui a produit la base de données, qui a pris un risque, mérite donc une rémunération et une protection à la hauteur de ses investissements. La durée de principe de ce droit sui generis est fixée par l'article L 342-5 du CPI (15 ans sauf cas de prorogation, notamment en cas de nouvel investissement substantiel).
- L'œuvre multimédia
La seule définition actuelle des œuvres multimédias provient de simples propositions doctrinales et de réflexions des instances législatives. C'est une création complexe réunissant des textes, des images ou des vidéos, des sons, online ou offline. Le fait également que ce type d'œuvre soit interactif avec son public empêche de la réduire à telle ou telle catégorie d'œuvre de propriété intellectuelle déjà nommée.
Enfin, une difficulté supplémentaire provient du fait que les producteurs et les créateurs de l'œuvre multimédia sont en général dissociés (capital intellectuel / capital financier).
- Œuvre multimédia / œuvre audiovisuelle : intérêts double. Définition assimilée à celle de l'œuvre audiovisuelle (sauf cd- rom car pas de défilement de séquences visuelles).
- Œuvre multimédia/ œuvre logicielle : tentation sur la question des jeux vidéo notamment, qualification qui a pu plus séduire les juges que celle d'œuvre audiovisuelle (Cass., crim., 21 juin 2000; civ 1., 27 avril 2004, "affaire Nintendo").
SOURCES :
- "Le régime juridique des œuvres multimédias", CSPLA, La documentation française, 2005
- "La création multimédia et le droit", N. Mallet- Poujol, Litec, 2003