Dans un arrêt du 14 mars 2014, la Cour de cassation apporte deux précisions utiles en matière de convention de forfait en jours, savoir :
- une convention de forfait en jours doit fixer exactement le nombre de jours travaillés ;
- l'entretien annuel sur la charge de travail doit bénéficier à tous les salariés actuellement soumis à ce dispositif, y compris ceux qui ont signé leur convention individuelle de forfait avant le 22 août 2008.
Dans cette affaire, il était question d'un salarié icencié pour faute grave et qui sollicitait du juge prud'homal la nullité de la convention de forfait en jours conclue en 2006.
S'agissant de la mention du nombre exact de jours travaillés, les juges du fond avaient refusé d'invalider la convention de forfait au motif que l'indication de "215 à 218 jours" de travail dans la lettre d'embauche et sur les bulletins de salaire s'expliquait pas l'impossibilité de déterminer de « façon intangible » le nombre maximum de jours travaillés chaque année en raison des « variables liées au calendrier ».
Au visa de l'article L. 3121-45 du Code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, la cour de cassation censure l'analyse des juges du fond et retient que : « une convention de forfait en jours doit fixer le nombre de jours travaillés ».
S'agissant de la sanction de l'absence d'entretien, les juges du fond avaient par contre considéré que cela ouvrait au salarié le droit à une indemnité pour exécution déloyale de la convention de forfait en jours. Devant la haute juridiction, l'employeur soutenait que l'article L. 3121-46 du Code du travail (issu de la loi du 20 août 2008), et qui impose d'organiser un entretien annuel individuel avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l'année (entretien qui porte sur la charge de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération), ne serait pas applicable aux faits de l'espèce. Il s'estimait ainsi dispensé d'organiser cet entretien au motif que la convention individuelle de forfait avait été signée par les parties en décembre 2006, soit avant l'entrée en vigueur du volet « temps de travail » de la loi du 20 août 2008, intervenue le 22 août 2008.
La cour de cassation n'est pas de l'avis de l'employeur et retient que : « l'article 19 III de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 [indiquant que les accords collectifs instituant des forfaits jours en application des dispositions du Code du travail « dans leur rédaction antérieure à la publication de la présente loi restent en vigueur »] n'a pour objet que de sécuriser les accords collectifs conclus sous l'empire des dispositions régissant antérieurement le recours aux conventions de forfait et les dispositions de l'article L. 3121-46 du Code du travail, issues de la même loi, sont applicables aux conventions individuelles de forfait en jours en cours d'exécution lors de son entrée en vigueur ».
Ainsi, la haute juridiction en conclut que l'employeur qui n'a pas organisé d'entretien relativement à la charge de travail du salarié, à l'organisation du travail dans l'entreprise et à l'articulation entre la vie professionnelle et personnelle, a manqué à ses obligations. L'employeur doit donc prévoir un entretien annuel sur la charge de travail pour tous les salariés en forfait jours, y compris ceux qui ont signé leur convention individuelle avant le 22 août 2008, date d'entrée en vigueur de cette obligation.
Jean-philippe SCHMITT
Avocat à DIJON (21)
Spécialiste en droit du travail
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