Au préalable, il convient de rappeler que, aux termes de l’article L. 2316-1 du Code du travail, « le fait de porter ou de tenter de porter atteinte à la libre désignation des délégués du personnel ou à l'exercice régulier de leurs fonctions est puni d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 3 750 euros ».
Cela étant posé, « les délégués du personnel sont reçus collectivement par l'employeur au moins une fois par mois. En cas d'urgence, ils sont reçus sur leur demande » (art. L. 2315-8, al. 1, C. trav.). Ils le sont également « sur leur demande, soit individuellement, soit par catégorie, soit par atelier, service ou spécialité professionnelle selon les questions qu'ils ont à traiter » (art. L. 2315-8, al. 3, C. trav.), ce qui « exige nécessairement qu’une demande de réception émanant des délégués eux-mêmes ou de l’un d’entre eux ait été effectivement présentée à la direction » (Cass. crim., 29 mars 1977, n° 76-91.340).
Ainsi, « cette réception est de plein droit, en sorte que le chef d’entreprise qui s’abstient d’y procéder porte atteinte à l’exercice régulier des fonctions de délégués du personnel » et « hors le cas de force majeure, son inobservation ne peut être justifiée que si elle a pour cause le refus ou la défection des délégués eux-mêmes » (Cass. crim., 22 oct. 1975, n° 74-93.478) ; ainsi, « la maladie est toujours une force majeure » (Cass. crim., 7 jan. 1981, n° 79-94.255).
En outre, l’inexistence d’un régime légal de convocation des délégués aux réunions mensuelles ne permet pas d’exclure l’atteinte à l’exercice des fonctions de délégué du personnel (Cass. crim., 17 déc. 1996, n° 95-84.938), ni l’indisponibilité du délégataire habituel, qui peut alors être remplacé par l’employeur lui-même ou un autre représentant désigné (Cass. crim., 7 jan. 1981, n° 79-94.255).
De surcroît, la réception organisée pour entendre les délégués du personnel doit leur être spécialement réservée, de sorte qu’elle ne peut se dérouler au cours d’une autre réunion (Cass. crim., 12 mars 1970, n° 69-91.317).
« L'employeur peut se faire assister par des collaborateurs. Ensemble, ils ne peuvent être en nombre supérieur à celui des représentants du personnel titulaires » (art. L. 2315-8, al. 2, C. trav.).
Ainsi, la Cour de cassation a jugé que « la pratique tendant lors de cette réception mensuelle à imposer la présence, en surnombre, d'un tiers choisi par le chef d'établissement est de nature à porter atteinte à l'exercice des fonctions représentatives » (Cass. crim., 25 sept. 2007, n° 06-84.599).
« Dans tous les cas, les délégués du personnel suppléants peuvent assister avec les délégués du personnel titulaires aux réunions avec les employeurs » (art. L. 2315-10, al. 1, C. trav.).
Sur ce point, la Cour de cassation précise que l’article susvisé « n’accorde aux délégués suppléants que le droit d’assister aux réunions et non celui d’intervenir lorsque les délégués titulaires sont présents », « que leur rôle est seulement d’acquérir formation et informations afin d’être en mesure de remplacer les titulaires défaillants », et qu’ainsi « les délégués suppléants du personnel n’ont vocation à remplir les fonctions des délégués titulaires dans leur plénitude que lorsqu’ils en assurent effectivement le remplacement » (Cass. crim., 11 oct. 1983, n° 82-94.038).
« Les délégués du personnel peuvent, sur leur demande, se faire assister d'un représentant d'une organisation syndicale » (art. L. 2315-10, al. 2, C. trav.), ce qui est le cas, par exemple, lorsqu’un représentant d’une union départementale de syndicats y assiste (Cass. crim., 10 mai 1973, n° 72-92.650).
« Le temps passé par les délégués du personnel, titulaires ou suppléants, aux réunions prévues à la présente section est rémunéré comme temps de travail » (art. L. 2315-11, al. 1, C. trav.) et « n'est pas déduit du crédit d'heures dont disposent les délégués du personnel titulaires » (art. L. 2315-11, al. 2, C. trav.).
Et, puisque « aucun texte légal n'impose à l'employeur de rembourser les frais de déplacement qu'à cette occasion les délégués du personnel peuvent engager » (Cass. soc., 14 fév. 1989, n° 85-41.075), ces frais restent à la charge de ces derniers sauf à avoir constaté « l'existence d'une convention collective, d'un accord d'entreprise ou d'un usage mettant une telle obligation à la charge de l'employeur » (arrêt précité).
« Sauf circonstances exceptionnelles, les délégués du personnel remettent à l'employeur une note écrite exposant l'objet des demandes présentées, deux jours ouvrables avant la date à laquelle ils doivent être reçus » (art. L. 2315-12, al. 1, C. trav.).
L’employeur qui impose un délai supérieur à celui visé plus haut commet un délit d’entrave à l’exercice des fonctions des délégués du personnel (Cass. crim., 9 avr. 1975, n° 74-91.981).
Et « dans le cas où aucun délégué n’aurait remis en temps utile une telle note, la réception mensuelle exigée par la loi n’en devrait pas moins avoir lieu à la date fixée, le chef d’établissement ayant seulement en pareil cas la faculté de ne pas répondre aux réclamations verbales n’ayant pas été précédées de la note prescrite » (Cass. crim., 22 oct. 1975, n° 74-93.478).
Lorsque, au cours de la réunion, l’employeur impose aux délégués un minutage excessif empêchant l’épuisement de l’ordre du jour dans des conditions normales, il porte atteinte à l’exercice régulier de leurs fonctions en refusant de reprendre plus tard la même réunion ou d’en organiser une seconde (Cass. crim., 29 mars 1977, n° 76-91.340).
Puis, « l'employeur répond par écrit à ces demandes, au plus tard dans les six jours ouvrables suivant la réunion » (art. L. 2315-12, al. 2, C. trav.).
Si l’employeur répond aux questions dans la mesure de sa compétence, celle-ci « ne saurait faire obstacle aux réponses aux questions posées par les délégués du personnel, le chef d'établissement, à cet égard, étant tenu de transmettre les réclamations excédant sa compétence et de faire connaître la réponse y apportée par les services compétents » (Cass. crim., 11 oct. 1989, n° 87-90.494).
Le défaut de réponse dans le délai légal de six jours de l’employeur rend ce dernier « coupable d’atteinte à l’exercice des fonctions de délégué du personnel » (Cass. crim., 29 mars 1977, n° 76-91.340).
« Les demandes des délégués du personnel et les réponses motivées de l'employeur sont, soit transcrites sur un registre spécial, soit annexées à ce registre » (art. L. 2315-12, al. 3, C. trav.). De sorte que lesdites demandes doivent être reprises in extenso et littéralement, la Cour de cassation ayant pu rappeler que « l’employeur ou son représentant est […] tenu de transcrire sur le registre spécial prévu à l’article L. 420-21 [L. 2315-12 nouv.] la copie de la note écrite [des] délégués du personnel » (Cass. crim., 12 jan. 1982, n° 81-92.217).
« Ce registre, ainsi que les documents annexés, sont tenus à la disposition des salariés de l'établissement désirant en prendre connaissance, pendant un jour ouvrable par quinzaine et en dehors de leur temps de travail » (art. L. 2315-12, al. 4, C. trav.) ainsi que « de l'inspecteur du travail et des délégués du personnel » (art. L. 2315-12, al. 5, C. trav.).
« Le défaut de tenue du registre constitue en lui-même une atteinte au fonctionnement régulier de l’institution des délégués du personnel, puisqu’il prive à la fois les délégués de la garantie d’une réponse écrite à leurs réclamations, les autres salariés de l’entreprise d’une source légale d’information et l’inspecteur du travail d’un moyen de contrôle prescrit par les textes » (Cass. crim., 2 juin 1976, n° 75-90.559).