Jusqu’au 1er Janvier 2017, une visite médicale devait systématiquement être organisée par l’employeur pour tous les salariés, avant l’embauche ou au plus tard avant l’expiration de la période d’essai.
A compter du 1er Janvier 2017, la visite médicale d’embauche est remplacée par la visite d’information et de prévention (loi El Khomri du 08 août 2016 - Décret du 27 décembre 20 n°2016-1908).
- La visite d’information et de prévention
1/ Quels sont les salariés concernés ?
Tout salarié nouvellement embauché en CDD ou CDI non affecté à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé et sa sécurité ou celle de ses collègues.
2/ Quel est l’objet de la visite d’information et de prévention ?
Contrairement à la visite médicale obligatoire d’embauche, la visite d’information et de prévention n’a pas pour objet de s’assurer de l’aptitude médicale du salarié à occuper son poste.
Elle a pour objet de :
- d’interroger le salarié sur son état de santé
- de l’informer sur les risques éventuels auxquels l’expose son contrat de travail
- de le sensibiliser sur les moyens de prévention à mettre en œuvre
- d’identifier si son état de santé ou les risques auxquels il est exposé nécessitent une orientation vers un médecin du travail
- de l’informer sur les modalités de suivi de son état de santé par le service et sur la possibilité dont il dispose, à tout moment, de bénéficier d’une visite à sa demande avec le médecin du travail
Lors de la visite, un dossier médical en santé au travail est établi sous l’autorité du médecin du travail.
Le dossier retrace dans le respect du secret médical :
- les informations relatives à l'état de santé du travailleur ;
- les expositions auxquelles il a été soumis ;
- les avis et propositions du médecin du travail.
Le dossier peut être communiqué à un autre médecin du travail dans la continuité de la prise en charge, sauf refus du travailleur.
Le salarié, ou toute personne autorisée (par le Code de la santé publique) en cas de décès de celui-ci, peut demander la communication de son dossier médical.
Le professionnel de santé délivre une attestation de suivi au travailleur et à l'employeur à l'issue de toute visite d'information et de prévention. (Art. R. 4624-14 du Code du Travail)
3/ Quel délai pour organiser la visite ?
La visite d’information et de prévention est réalisée après l’embauche.
Elle doit être effectuée au plus tard dans un délai de 3 mois à compter de la prise effective du poste.
Toutefois, pour les travailleurs de nuit et les salariés de moins de 18 ans, cette visite doit être réalisée avant leur affectation à leur poste, c’est-à-dire avant le début de la période d’essai.
4/ Quels sont les cas de dispense de la visite d’information et de prévention ?
La visite d’information et de prévention n’est pas obligatoire pour le salarié qui a bénéficié d’une telle visite dans les 5 ans précédant son embauche si :
- il est appelé à occuper un emploi identique et présentant des risques d’exposition équivalents
- la médecine du travail est en possession de la dernière attestation de suivi ou du dernier avis d’aptitude
- aucune mesure individuelle (aménagement, transformation, adaptation du poste etc.), ou aucun avis d’inaptitude n’a été émis au cours des trois dernières années (Article R.4624-15 du Code du travail)
Il s’agit de conditions cumulatives.
5/ Qui effectue la visite d’information et de prévention ?
Cette visite n’est pas nécessairement pratiquée par le médecin du travail. Elle peut être réalisée par un collaborateur médecin, un interne en médecine du travail ou un infirmier.
Dans ce cas, le professionnel de santé qui réalise la visite d'information et de prévention peut orienter le salarié sans délai vers le médecin du travail, s’il l’estime nécessaire. (Article L. 4624-1 du Code du travail)
Cette nouvelle visite effectuée par le médecin du travail a notamment pour objet de proposer des adaptations du poste ou l’affectation à d’autres postes.
6/ Cas des travailleurs temporaires ?
Dans le cas particulier des salariés temporaires, elle peut être effectuée pour plusieurs emplois dans la limite de 3. (Article R.4625-10 du Code du travail).
7/ Périodicité de la visite d’information et de prévention ?
Jusqu’au 1er Janvier 2017, les visites périodiques avaient lieu tous les 2 ans.
Désormais, la périodicité est déterminée par le médecin du travail, au vu des conditions de travail, de l’âge et l’état de santé, ainsi que les risques auxquels le salarié est exposé. Au minimum, le salarié doit passer une visite tous les 5 ans.
Un suivi particulier est toutefois prévu pour certains travailleurs.
Ainsi notamment, pour les femmes enceintes, venant d’accoucher ou allaitantes, elles sont orientées à l’issue de la visite d’information et de prévention ou lorsqu’elles le souhaitent vers le médecin du travail qui organise une nouvelle visite ayant pour objet de proposer si nécessaire, les adaptations de poste ou changement d’affectation.
- Un suivi renforcé pour les salariés exposés à des risques particuliers
1/ Quels sont les salariés concernés ?
Il s’agit des salariés exposés aux risques prévus par l’article R.4624-23 du Code du travail :
- à l’amiante ;
- au plomb ;
- aux agents cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction ;
- à certains agents biologiques;
- aux rayonnements ionisants ;
- au risque hyperbare ;
- au risque de chute de hauteur lors des opérations de montage et de démontage d'échafaudages.
Il en va de même de tout poste pour lequel l’affectation est conditionnée à un examen d’aptitude spécifique.
Cette liste doit être mise à jour tous les ans.
Sous certaines conditions, l’employeur peut compléter la liste des postes entrant dans les catégories mentionnées, par des postes présentant des risques particuliers pour la santé ou la sécurité du salarié.
2/ Par quoi est remplacée la visite d’information et de prévention ?
Pour les postes à « risques », elle est remplacée par un examen médical d’aptitude à l’embauche, réalisé nécessairement par le médecin du travail avant l’affectation au poste. (Art. R. 4624-24.)
Cet examen a notamment pour objet :
- De s'assurer que le travailleur est médicalement apte au poste de travail auquel l'employeur envisage de l'affecter
- De rechercher si le travailleur n'est pas atteint d'une affection comportant un danger pour les autres travailleurs
- De proposer éventuellement les adaptations du poste ou l'affectation à d'autres postes ;
- D'informer le travailleur sur les risques des expositions au poste de travail et le suivi médical nécessaire
- De sensibiliser le travailleur sur les moyens de prévention à mettre en œuvre.
Cet examen donne lieu à la délivrance d’un avis d’aptitude ou d’inaptitude au poste qui est transmis à l’employeur et au travailleur. Cet avis est versé au dossier médical.
3/ Quel suivi périodique des salariés soumis à un suivi renforcé ?
Une visite médicale intermédiaire est effectuée par un professionnel de santé au travail au plus tard 2 ans après la visite avec le médecin du travail.
Par la suite, un examen médical d’aptitude devra être réalisé selon une périodicité déterminée par le médecin du travail et au maximum tous les 4 ans.
- Le salarié peut bénéficier d’un examen médical sur simple demande
Indépendamment des examens d’aptitude à l’embauche et périodiques ainsi que des visites d’information et de prévention, le travailleur bénéficie, à sa demande ou à celle de l’employeur, d’un examen par le médecin du travail.
Le salarié peut solliciter notamment une visite médicale, lorsqu’il anticipe un risque d’inaptitude, dans l’objectif d’engager une démarche de maintien en emploi et de bénéficier d’un accompagnement personnalisé.
La demande du travailleur ne peut motiver aucune sanction.
Le médecin du travail peut également organiser une visite médicale pour tout travailleur le nécessitant. (Article R.4624-34 du Code du travail)
- Quelles sont les sanctions en cas d’absence de suivi médical ?
Bien que la visite médicale d’embauche ait été remplacée par la visite d’information et de prévention, c’est examen n’en demeure pas moins obligatoire. Il en va de même du suivi périodique et davantage encore de l’examen médical d’aptitude.
L’employeur est tenu à une obligation générale de sécurité de résultat et doit veiller à la protection de la santé des travailleurs.
Au fil des années, la Jurisprudence devrait préciser les sanctions en cas de non-respect par l’employeur de ses obligations. La Cour de Cassation pourrait venir sanctionner différemment le défaut de visite d’information et de prévention et l’absence de l’examen médical d’aptitude.
En outre, il y-a lieu de rappeler que les violations de l’employeur de ses obligations en matière de suivi médical sont punies d’une contravention de 5ème classe. En cas de récidive dans le délai de trois ans, l’employeur encourt une peine d’emprisonnement de quatre mois et d'une amende de 3 750 euros. (Article L4745-1 du Code du travail)
- Rappel de la Jurisprudence rendue avant l’entrée en vigueur de la loi « Travail » du 8 août 2016
1/ Pour remplir son obligation de sécurité, l’employeur doit s’assurer de l’effectivité de la visite médicale.
En d’autres termes, l’employeur qui a demandé l’organisation d’une visite médicale d’embauche mais qui ne s’est pas assuré que celle-ci a effectivement eu lieu, peut voir sa responsabilité engagée par le salarié. En effet, le fait d’avoir demandé au service de santé au travail d’organiser une visite médicale via la déclaration d’embauche est insuffisant (Cass. Soc. 18 décembre 2013 n°12-15454).
C’est ce qu’à confirmer la Haute Juridiction dans un arrêt du 12 Janvier 2016 (Cass. crim. 16 Janvier 2016 n°14-87.695). L’employeur ne peut s’exonérer de son obligation de s’assurer de la réalisation de l’examen médical, en invoquant une impossibilité matérielle imputable au service de santé au travail.
Au cas d’espèce, le service de santé au travail n’avait pas organisé la visite médicale sollicitée par l’employeur, du fait que les CDD de très courtes durées avaient pris fin à la date où ce service était en mesure de convoquer les salariés concernés. La Cour de Cassation a refusé d’y voir une cause d’exonération.
2/ Lorsque le salarié a été victime d’un accident de travail et que la visite médicale d’embauche n’a pas eu lieu, celui-ci peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur. (Cass. Soc. 22 septembre 2011 n°10-13568).
Le salarié peut par ailleurs demander une résiliation judiciaire de son contrat. (Cass. Soc. 21 mars 2012 n°10-28165).
Toutefois, la visite médicale organisée avec plusieurs mois de retard, ne constitue pas une faute suffisamment grave de nature à faire produire à la démission du salarié, les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 18 septembre 2013 n°12-19344).
3/ La Cour de Cassation a considéré que l’absence de visite médicale d’embauche du fait de l’employeur cause nécessairement un préjudice au salarié dont le juge doit fixer la réparation. Le salarié n’a pas à démontrer un lien entre le défaut de visite et une défaillance de son état de santé que le médecin aurait pu déceler. (Cass. Soc. 11 Juillet 2012 n°11-11709)
Toutefois, par un arrêt du 13 Avril 2016 rendu au sujet de la remise tardive d’un certificat de travail, la Cour de Cassation semble avoir abonné la notion de préjudice présumé. (Cass. Soc. 13 Avril 2016 n°14-28293).
Si cette position devait être confirmée, le salarié qui invoquerait un manquement de l’employeur devrait alors prouver 1/l’existence de la faute, 2/l’existence d’un préjudice, 3/et le lien de causalité entre ladite faute et le préjudice
Marie-Laure ARBEZ-NICOLAS
Avocat au Barreau de Paris