Le mandat de protection future, introduit dans notre droit par la loi n° 2007-308 du 05 mars 2007, (entrée en vigueur au 1er janvier 2009) est une mesure d’assistance libre, donnant un caractère subsidiaire au régime légal de protection incarné dans la mesure de Tutelle, de curatelle ou de sauvegarde de Justice.
Désormais, tous parents d’un enfant, même majeur, a la possibilité de nommer un représentant pour celui-ci, hors d’état de manifester sa volonté, afin de les remplacer le jour de leur décès.
Ce représentant s’imposera au Juge et prendra ses fonctions, soit au décès des parents, soit même avant dans l’hypothèse où les parents eux même n’étaient plus en possibilité d’exercer cette mission.
Mieux encore, le mandat de protection future constitue la possibilité de construire un régime de protection sur mesure, hors des sentiers légaux du régime de la Tutelle ou de la Curatelle.
Un mandat pour protéger qui ?
Il s’agit d’abord d’un mandat pour soi-même, mais il peut également s’agir d’un mandat pour autrui.
Pour Soi-même :
Toute personne majeure, ou mineure émancipée, peut charger une ou plusieurs personnes, dans un même mandat, de la représenter dans l’hypothèse où un cas visé à l’article 425 du code civil [1] viendrait à l’empêcher de pourvoir seule à ses intérêts.
La cause du mandat étant l’altération des facultés empêchant l’expression de la volonté, induit le fait que le mandant (celui qui rédige le mandat pour lui-même) doit être capable à l’époque de la rédaction du mandat.
Pour autrui :
Cette possibilité de désigner un mandataire pour autrui est toutefois limitée, elle est réservée aux parents (ou dernier vivant des père et mère) ne faisant pas l’objet d’une mesure de curatelle ou tutelle, exerçant l’autorité parentale sur leur enfant mineur, ou qui assument la charge matérielle et affective d’un enfant majeur (article 477 al 3 du code civil)[2]
Cette dernière hypothèse répond aux préoccupations légitimes de parents soucieux de l’avenir, après eux, de leur enfant handicapé.
Un mandat pour protéger quoi ?
Le mandat de protection future est susceptible de recevoir un double objet, la protection patrimoniale, et la protection personnelle, ces deux protections pouvant être confiée au même mandataire, ou à deux mandataires différents.
Protection patrimoniale :
Objet premier du mandat, la mission qui sera confiée au mandataire sera fonction du degré de protection souhaité par le rédacteur du mandat. La liberté de la plume est la règle, le mandat pouvant prévoir une simple mission d’assistance, totale ou partielle, pour les actes patrimoniaux, ou pour certains uniquement (actes de dispositions par exemple). Mais le mandat peut également prévoir une mesure de représentation, là aussi partielle ou totale.
A noter toutefois que lorsque la mission est imprécise, contradictoire, ou incomplet, le mandat peut faire l’objet d’un contrôle par le Juge des Tutelles, lequel peut alors ouvrir une mesure de protection juridique complémentaire. Enfin un mauvais mandat quant à son contenu peut être révoqué par le Juge qui y substituera alors une mesure légale de protection (Tutelle ou curatelle). La liberté de plume est donc une liberté sous surveillance et contrôle éventuel du Juge des Tutelles.
Protection de la personne :
Les mêmes principes président à la rédaction de la mission du mandat, avec les mêmes réserves et le même contrôle du Juge.
Le domaine est toutefois particulièrement sensible puisqu’il touche à la personne elle-même.
La mission doit donc être la traduction fidèle de la volonté du mandant, puisqu’il est ici question des :
- Directives de fin de vie : traduction des souhaits de la personne relativement à sa fin de vie (conditions de limitation ou d’arrêt des traitements), avec ici un bémol d’importance puisque le médecin n’est tenu par des directives de fin de vie que si le mandat, et donc la mission ont été établis moins de 3 ans avant l’état d’inconscience de la personne.
- Autres directives : Cette question, qui recouvre des thèmes d’importance tel que le souhait quant au lieu de vie, quant à sa vie personnelle, sa vie sociale doivent ici trouver matière à se développer. D’autres thématiques, comme la question du mariage, du divorce, du PACS, n’ont pas été traitées par le législateur, mais il n’est pas interdit de s’interroger sur la pertinence d’en faire état au sein même du mandat de protection future.
- S’agissant enfin de la question de l’intégrité corporelle et du respect à la vie privée, l’article 479 du code civil interdit au mandataire de protection future d’agir dans ces hypothèses sans accord préalable du juge des Tutelles.
Un mandat à faire comment ?
Le mandat peut prendre deux formes
Mandat notarié
Il permet notamment d'autoriser le mandataire à procéder à des actes de disposition du patrimoine du mandant (par exemple : vente d'un bien immobilier ou placement financier).
Il est établi par acte authentique. Le mandataire rend compte au notaire et lui remet notamment l'inventaire des biens et le compte annuel. Le notaire pourra signaler au juge des tutelles tout acte pris par le mandataire pouvant être contraire aux intérêts du mandant.
Un mandat pris par des parents pour leur enfant est obligatoirement notarié.
Mandat sous seing privé
Sous ce mandat, la gestion des biens se limite aux actes d'administration, c'est-à-dire ceux qu'un tuteur peut faire sans autorisation du juge (renouveler le bail d'un locataire par exemple). Tout acte de disposition nécessite l'autorisation du juge des tutelles.
Le mandat doit être contresigné par un avocat ou bien être conforme au modèle de formulaire cerfa n°13592*02 . Dans ce dernier cas, il doit être enregistré à la recette des impôts pour que sa date soit incontestable. Les frais d'enregistrements sont d'environ 125 € et sont à la charge du mandant.
Il doit être daté et signé de la main du mandant.
Le mandataire l'accepte en le signant.
A NOTER :
Tant que le mandat n'a pas pris effet, le mandant peut le révoquer ou le modifier, et le mandataire peut y renoncer.
Le mandat prend effet lorsque la personne ne peut plus pourvoir seule à ses intérêts : cela doit être médicalement constaté par un médecin inscrit sur une liste établie par le procureur de la République. Le mandataire se présente ensuite muni du mandat et du certificat médical au greffe du tribunal d'instance pour faire viser le mandat par le greffier et permettre ainsi sa mise en œuvre.
Le mandat s'exerce en principe à titre gratuit, mais le mandant peut prévoir une rémunération ou indemnisation du mandataire.
Le mandat fixe les modalités de contrôle de son exécution. Le mandant peut charger une ou plusieurs personnes de ce contrôle.
[1] Article 425 du code civil
Toute personne dans l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d'une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté peut bénéficier d'une mesure de protection juridique prévue au présent chapitre.
S'il n'en est disposé autrement, la mesure est destinée à la protection tant de la personne que des intérêts patrimoniaux de celle-ci. Elle peut toutefois être limitée expressément à l'une de ces deux missions.
[2] Article 477
Toute personne majeure ou mineure émancipée ne faisant pas l'objet d'une mesure de tutelle peut charger une ou plusieurs personnes, par un même mandat, de la représenter pour le cas où, pour l'une des causes prévues à l'article 425, elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses intérêts.
La personne en curatelle ne peut conclure un mandat de protection future qu'avec l'assistance de son curateur.
Les parents ou le dernier vivant des père et mère, ne faisant pas l'objet d'une mesure de curatelle ou de tutelle, qui exercent l'autorité parentale sur leur enfant mineur ou assument la charge matérielle et affective de leur enfant majeur peuvent, pour le cas où cet enfant ne pourrait plus pourvoir seul à ses intérêts pour l'une des causes prévues à l'article 425, désigner un ou plusieurs mandataires chargés de le représenter. Cette désignation prend effet à compter du jour où le mandant décède ou ne peut plus prendre soin de l'intéressé.
Le mandat est conclu par acte notarié ou par acte sous seing privé. Toutefois, le mandat prévu au troisième alinéa ne peut être conclu que par acte notarié.