L’achat ou la cession de fonds de commerce est un acte majeur dans la vie d’une entreprise. En effet, cette opération permet à une personne morale ou physique de céder un bien qu’il a exploité et à une autre de commencer une activité. Aussi bien pour le cédant que pour le cessionnaire, il constitue un acte important. Pour le cédant, c’est parfois le fruit d’une vie et pour le cessionnaire, peut être une belle histoire qui commence…
Il importe de ce fait de prendre toutes les précautions en amont et en aval afin que cette opération puisse se dérouler dans la plus grande sérénité pour les parties. A cet effet, l’assistance d’un conseil en la matière est primordiale.
La cession du fonds de commerce est réglementée par les articles articles L 141-1 et suivants et R 141-1 et suivants du Code de commerce .
J’aborderai dans mes développements, les actes préparatoires à la cession du fonds de commerce (Ière partie), ensuite je traiterai la question de la promesse d’achat et de l’acte de cession et enfin celle des formalités relatives à la publicité de l’acte dont je traiterai dans un autre article (2ème partie).
I- Les actes préparatoires
Ce sont les questions préalables que l’on se pose lorsque l’on achète un fonds de commerce. Il s’agit ici de s’interroger sur les points les plus pertinents afin d’éviter de se retrouver après la cession en possession d’un fonds de commerce qui n’a pas de valeur, et pour le vendeur d’éviter une remise en cause de la vente, qui peut aller jusqu’à la nullité de la vente.
A- La vérification de la capacité des parties et la prise en compte du régime matrimonial
En ce qui concerne la capacité, il est important de vérifier que la personne a la capacité requise.
Il conviendra alors de vérifier si la personne est encore mineure ou si elle fait l’objet d’une mesure de tutelle, de curatelle ou de sauvegarde de justice, auquel cas, la validité des actes est soumise à conditions selon qu’il s’agit de l’achat ou de la vente du fonds de commerce.
Concernant le régime matrimonial, lorsque le propriétaire du fonds est marié sous un régime non communautaire, il a seul le pouvoir de vendre le fonds et d’en percevoir le prix. Il n’a besoin dans cette situation d’aucune autorisation de la part de l’autre époux.
Il en est de même en cas de communauté, s’il s’agit d’un bien propre (article 1428 du code civil). Par contre, s’il s’agit d’un bien commun, le consentement des deux époux est nécessaire (article 1424 du code civil). Cette règle ne s’applique qu’en cas de cession globale du fonds.
En ce qui concerne la cession par une personne morale, il convient de s’assurer que la personne physique qui représente la personne morale a bien le pouvoir de signer un tel acte au nom de la Société. Il faut en pratique se référer aux statuts de la société.
B- La prise en compte de certains éléments clés du fonds de commerce
1- La vérification de l’existence d’une clientèle
Sans entrer dans le débat doctrinal en la matière, Il ne fait aucun doute que la clientèle constitue un des éléments essentiels du fonds de commerce, « sans lequel le fonds ne peut exister ». En effet, l’absence de réalité de la clientèle peut entraîner une disqualification de la cession de fonds de commerce en cession d’éléments d’exploitation, c'est-à-dire en cession du droit au bail.
Il importe à cet égard quand on achète un fonds de commerce de vérifier la réalité de l’existence de la clientèle. En règle générale, il s’agit de vérifier le chiffre d’affaires. En pratique, le chiffre d'affaires retenu est, en principe, celui correspondant aux recettes TVA incluses. Cette technique consiste à dégager une moyenne sur la base des trois dernières années d’exploitation et d’appliquer à celle-ci un coefficient (celui-ci est déterminé à partir de barèmes d’évaluation par profession). Cette méthode n’est pas la seule. Il peut y avoir en effet, une évaluation par bénéfice reconstitué.
Cette exigence de la réalité de l’existence d’une clientèle se retrouve dans la loi qui exige que soit mentionné dans l’acte de cession de fonds de commerce, le chiffre d’affaires des trois dernières années (article L.141-1 du Code de commerce).
Par ailleurs, il convient de faire très attention car certaines activités sont marquées par un fort intuitu personae, ce qui peut poser problème en cas de cession de fonds de commerce, pour assurer une pérennité du commerce.
2- Le droit au bail
La question relative au bail est importante lorsque le fonds est exploité dans des locaux loués. Le droit au bail constitue un élément stable du fonds de commerce. Le principe en la matière est qu’en cas de cession d’un fonds de commerce, le droit au bail est compris dans la cession (Article L. 145-16 du Code de commerce). S’agissant de reprendre une activité, il est important de s’enquérir du temps restant à courir, des conditions du renouvellement du bail commercial et de la destination des lieux.
En ce qui concerne la destination des lieux, Il convient de s’assurer qu’elle est adaptée à l’activité du nouvel acquéreur. De ce fait, il pourrait être demandé au bailleur de ratifier une extension à l’élargissement de la destination du bail ou encore, les travaux nécessaires pour l’acquéreur sur l’exploitation qu’il veut faire sur les locaux.
Dans ce cas, il faudrait tenir compte également de certains impératifs légaux et administratifs. Aussi, dans certains cas, l’autorisation de la copropriété est parfois nécessaire. Dans d’autres situations, un permis de construire est obligatoire (Article R431-34 et suivants du Code de l’urbanisme).
3- Le nom commercial, et l’enseigne
Le nom commercial ne suit pas forcement le fonds de commerce. En cas d’achat de fonds de commerce, il importe donc d’en demander l’inclusion s’il s’avère qu’il est nécessaire à l’existence du fonds.
4- Le sort des contrats en cours
En matière de cession de fonds ce commerce, le principe est celui de non transmission des contrats à l’exception des contrats de travail en cours, du contrat de bail (Article L1224-1 du Code du travail), des contrats d’assurance de dommage (Article L 121- 10 du Code des assurances) et des contrats d’édition en cas de cession du fonds de commerce de l’éditeur ( article L132-16 du Code de la propriété intellectuelle).
De ce fait, les contrats dont bénéficiaient l’exploitant précédant et nécessaires à la continuation du fonds de commerce devront pouvoir être négociés avant la cession définitive et même en faire une condition suspensive de la vente. Il s’agit généralement des contrats de crédit-bail, des contrats de distribution (franchise, concession, distribution sélective). Le vendeur pourra de ce fait se mettre d’accord avec le cessionnaire pour la reprise de tout ou partie des contrats qu’il aura conclu, sous réserve d’ l’acceptation des cocontractants.
5- Activités réglementées
L’exercice de certaines activités nécessite une autorisation ou l’accomplissement d’un stage. Il s’agit donc d’une activité réglementée. Il en est ainsi par exemple de l’activité de débitant de boisson, qui nécessite en fonction de la nature de boisson offerte au public, d’une catégorie particulière de licence, ou encore de celle concernant la restauration traditionnelle ou la restauration rapide ou vente à emporter. Il est donc important avant de se lancer dans son projet, de vérifier que l’activité n’est pas réglementée.
II- La vérification du périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat ( Loi n°2005-882 du 2 aout 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises)
Elément essentiel et préalable de la vente, le vendeur du fonds doit satisfaire à cette formalité. Dans le périmètre défini par le conseil municipal, toute intention de céder un fonds de commerce, doit être précédé d’une déclaration d’intention préalable. Avant toute cession, il faut s’enquérir du fait que le commerce n’est pas dans un périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat, auquel cas, le cédant doit donc faire une déclaration préalable à la commune. La sanction du défaut de cette formalité préalable est la nullité de la cession.
La déclaration doit être établie conformément au formulaire cerfa n°13644*01 disponible sur le site internet : http://www2.equipement.gouv.fr/formulaires/fic_pdf/13644.pdf ou sur servicepublic.fr
La procédure est la suivante :
- C’est au cédant qu’il impose de faire la déclaration, sauf dans les cas de cession de bail par voie d’adjudication, et de la cession de gré à gré autorisée par le juge commissaire sur le fondement de l’article L. 642-9 du Code de commerce.
- La déclaration préalable doit être rédigée en quatre exemplaires et adressée, par LRAR, au maire de la commune où est situé le fonds ou l'immeuble dont dépendent les locaux loués, ou déposée en mairie contre récépissé.
- Le maire dispose alors d’un délai de deux mois pour exercer son droit de préemption au profit de la commune ou d’y renoncer. Le silence du maire équivaut à une renonciation d’acheter le commerce.
- La décision prise est notifiée au cédant par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou par remise contre décharge au domicile ou au siège social du cédant ; lorsque le cédant est lié par un contrat de bail, une copie de cette notification est adressée à un bailleur (C. urb., art. R. 214-5, al. 2).
Ces préalables ayant été effectué, il importe de s’atteler à la rédaction de la promesse de cession, en vue de préparer la cession définitive. J’aborderai ce point dans un prochain article.
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