L’entreprise qui passe par un prestataire pour créer son site web et qui le fait ensuite modifier par un nouveau prestataire  peut être poursuivi et condamné pour contrefaçon. Sans cession exprès, le prestataire reste titulaire des droits d’auteur !
Pensez à formaliser une cession de droits par écrit et conforme aux dispositions du code de la propriété intellectuelle.
Lorsqu’une personne confie la création de son site web à une agence, elle ne devient pas pour autant titulaire des droits d’auteur alors même qu’elle a payé pour la création du site. La charte graphique du site, les couleurs utilisées, les pages publicitaires, les fonds sonores,  sont autant d’œuvres originales sur lesquels l’agence de création détient des droits patrimoniaux au titre du code de la propriété intellectuelle.
Le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Paris du 10 novembre 2011 Victoriaa, Estelle G. / Linkeo.com, Stéphane C. (3ème chambre, 4ème Section) illustre encore une fois que sans cession exprès des droits d’auteur en bonne et due forme, le créateur du site et des pages publicitaires qu’il contient reste titulaire des droits d’auteur. La personne ou l’entreprise qui exploite le site Internet ne peut dès lors pas y faire apporter de modifications sans risquer de tomber sous le coup de la contrefaçon.
Dans cette affaire, Stéphane C avait confié la création, l’hébergement et la gestion de son site Internet elag-ouest.eu à la société Victoriaa. Puis il a changé d’hébergeur en confiant son site Internet à la société Linkeo. Stéphane C pensait être légitimement titulaire des droits. Il indique qu’il a fourni des directives précises pour son contenu et son architecture, a rédigé des textes et a fourni des photographies. Il soutient que la société Victoriaa lui a seulement fourni des prestations techniques de mise en forme informatique des données. Mais le tribunal retient que Stéphane C. n’a pas donné d’indications précises « sur la présentation des différentes pages et l’agencement des éléments qui les composent, sur le graphisme, l’animation ou l’arborescence favorisant la consultation d’un site » et à juste fait modifier des éléments mineurs. Il ne peut donc être reconnu comme auteur du site. La société Victoriaa « qui possède les compétences requises en matière de création de sites, est l’auteur de celui commandé par Stéphane C ». Elle dispose en outre des codes sources et que le site a été divulgué sous son nom.
En faisant reproduire le site Internet et en confiant l’hébergement du site à un autre prestataire sans l’accord de la web agency, Stéphane C. a commis un acte de contrefaçon. En revanche, la responsabilité du nouvel hébergeur n’est pas engagée car il bénéficie du régime de responsabilité aménagé par la LCEN. Le tribunal estime qu’il n’avait pas à vérifier la chaîne des droits dont son client pouvait se prévaloir.
Mais le Tribunal considère que l’hébergeur a commis un acte de concurrence déloyale en utilisant le site créé par la société Victoriaa pour promouvoir ses propres activités (risque de confusion des internautes et détournement de clientèle). Il a ainsi laissé croire qu’il était l’auteur du site, s’appropriant ainsi les mérites de la création de Victoriaa.
Le client est condamné à verser 3 000 € à la web agency au titre de la contrefaçon et Linkeo.com doit verser 8 000 € pour réparer le préjudice subi en raison de son comportement déloyal.
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