DROIT D'AUTEUR : jeux vidéo et le rapport parlementaire Martin-Lalande du 21 décembre 2011

Publié le Modifié le 21/01/2012 Vu 3 004 fois 0
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Comme de nombreux salariés, les créateurs de jeux vidéo ignorent souvent qu’ils ont aussi très souvent la qualité d’auteur en concourant à la création des jeux. Or ils ont dans la plupart des cas des droits à faire valoir sur leurs créations (notamment le droit à une rémunération proportionnelle en tant qu’auteur). En effet, les graphismes, les musiques, images qui composent le jeu vidéo sont susceptibles d’être qualifiées d’œuvres originales au sens du droit d’auteur, même si ces créations ont été réalisées avec l’aide de la technologie. L’objectif affiché du rapport parlementaire Martin-Lalande du 21 décembre 2011 est de relancer le travail de concertation et de médiation entre les professionnels du secteur pour aboutir à un accord et améliorer le cadre juridique existant des jeux vidéo. Le tout se ferait sous l’égide du CNC (centre national du cinéma et de l’image animée).

Comme de nombreux salariés, les créateurs de jeux vidéo ignorent souvent qu’ils ont aussi très souvent l

DROIT D'AUTEUR : jeux vidéo et le rapport parlementaire  Martin-Lalande du 21 décembre 2011

 

Rapport parlementaire sur la protection juridique des jeux vidéo du 21.12.2011 de Mr Martin-Lalande

Le jeu vidéo au centre de toutes les attentions

 

Comme de nombreux salariés, les créateurs de jeux vidéo ignorent souvent qu’ils ont aussi très souvent la qualité d’auteur en concourant à la création des jeux. Or ils auraient dans la plupart des cas des droits à faire valoir sur leurs créations (notamment le droit à une rémunération proportionnelle en tant qu’auteur). En effet, les graphismes, les musiques, images qui composent le jeu vidéo sont susceptibles d’être qualifiées d’œuvres originales au sens du droit d’auteur, même si ces créations ont été réalisées avec l’aide de la technologie.

 

Le rapport de Mr le député Martin-Lalande intervient sur un sujet qui a déjà fait l’objet de nombreux débats en 2005, au sein de la commission du CSPLA. En raison de la persistance des désaccords entre les différents acteurs du secteur des jeux vidéo et les sociétés d’auteurs, la mission de concertation n’avait pu aboutir. Rappelons que les éditeurs de jeux vidéo voulaient voir reconnaitre un régime juridique spécifique aux jeux vidéo.

  

Quel est donc l’intérêt de ce rapport ? L’objectif affiché est de relancer le travail de concertation et de médiation entre les professionnels du secteur pour aboutir à un accord et améliorer le cadre juridique existant des jeux vidéo. Le tout se ferait sous l’égide du CNC (centre national du cinéma et de l’image animée).

 

«  Pour sortir de cette guerre de tranchées  », le rapport préconise de renoncer à créer un statut juridique propre au jeu vidéo et d'aménager le cadre du droit d'auteur existant pour répondre à certaines de ses spécificités.

Le rapport propose également au Gouvernement de créer de meilleures conditions économiques et fiscales pour le développement du secteur français du jeu vidéo.

 

 Actuellement, c’est le droit commun du droit d’auteur qui a vocation à s’appliquer aux jeux vidéo. Le rapport précise qu’ « il n’existe pas de statut légal propre au jeu vidéo, qu’il soit autonome ou intégré parmi la catégorie des œuvres multimédia. Autrement dit, la qualification juridique de l’œuvre jeu vidéo dépend des catégories juridiques existant déjà dans le CPI. Parmi ces catégories juridiques, certaines se rapportent à la nature de l’œuvre (œuvre audiovisuelle, œuvre logicielle), d’autres concernent son processus de création (œuvre de collaboration, œuvre collective). »

 

Le rapport constate qu’il n’existe pas de statut juridique spécifique dans les autres pays. La création d'un régime juridique propre au jeu vidéo ne serait pas la meilleure des solutions car la multiplication des régimes est source de complexité et d'accroissement du contentieux. Les instances de la Communauté européenne interrogées s’y sont d’ailleurs montrées défavorables.

 

A la lecture des différents contentieux relatifs aux logiciels, on peut comprendre l’inquiétude des éditeurs de jeux vidéo… A titre d’exemple, la société Prizee.com a été condamnée à verser à un ancien salarié 50 000 euros de dommages-intérêts pour contrefaçon… Elle n’avait pas pris la précaution d’obtenir les droits d’exploitation des musiques des jeux composées par son salarié par le biais d’une cession en bonne et due forme. La société pensait être titulaire des droits…

(cf mon article sur le sujet « le jeu vidéo suscite toujours autant d’émois juridiques »)

 

Le rapport analyse les craintes des studios français qui craignent un « handicap juridique » dans leur concurrence avec les éditeurs étrangers qui bénéficient d’un cadre juridique plus favorable (notamment un droit d’auteur inspiré du copyright américain, où en application du principe «work made for hire », l’auteur salarié n’est pas reconnu comme étant titulaire de droits ; cette titularité est reconnue à l’employeur (le producteur de jeux vidéo).

Mais le rapport constate que de nombreux studios français travaillent régulièrement avec des éditeurs étrangers : « si le risque juridique de la titularité des droits et la mauvaise image du droit d’auteur « à la française » handicapent les studios français dans la compétition internationale, ils ne constituent pas des obstacles insurmontables à l’accès au marché international. »

Notre régime juridique actuel permet pourtant aux éditeurs de jeux vidéo de sécuriser juridiquement les cessions de droits de leurs auteurs salariés à leur profit.

Le rapport révèle qu’une seule une entreprise de jeu vidéo sur 3 déclarerait avoir recours au contrat d’auteur avec ses créateurs – salariés ou indépendants. Les contrats de travail des salariés des studios de développement prévoient pourtant généralement des clauses de cession des droits patrimoniaux relatives à l’ensemble des œuvres à la création desquelles le salarié participera pendant la durée de son contrat. Mais ces dispositions sont contraires au principe de l’article L.131-1 du Code de la propriété intellectuelle qui interdit les cessions globales d’œuvres futures. Les clauses de cessions de ce type ne sont pas valides juridiquement.

Pourtant, une bonne rédaction de ces clauses permettrait aux éditeurs de jeux vidéo de sécuriser les cessions de droits et de les rendre conformes aux dispositions légales.

  

Le rapport ajoute que « si quelques grosses sociétés de jeux vidéo dénoncent la lettre de l'article L.131-1 du CPI comme un obstacle juridique à l’exploitation de leurs jeux, il ressort en vérité de la souplesse jurisprudentielle évoquée que le respect de ce principe du CPI par les studios de développement n'est pas, dans la pratique, une gageure insurmontable ».

Dès lors, le rapport conclut que la demande de certains producteurs de jeux d’adopter un statut juridique ad hoc relève plus de raisons économiques que de raisons juridiques.

 

Pour répondre aux attentes des producteurs des jeux vidéo et permettre de renouer le dialogue, le rapport préconise d’apporter  des aménagements aux règles classiques du droit d’auteur, « notamment afin de sécuriser le transfert des droits patrimoniaux des auteurs au studio de développement dans le but de faciliter son exploitation ».

Au regard des précédents débats qui ont eu lieu sur le sujet en 2005, il est difficile de prédire qu’elle sera l’issue des futures négociations entre les sociétés d’auteurs et les producteurs des jeux vidéo…

 Affaire à suivre…

Géraldine LALY
Avocat
 
DESS droit européen des affaires
DEA propriété intellectuelle
Membre de l'Association des Avocats Conseils d'Entreprises
 
22 avenue de l'Observatoire
75014 PARIS
Tél:  01 45 42 00 61 
Fax: 01 45 38 57 10
 
  
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A propos de l'auteur
Blog de Maître Géraldine LALY

Avocat en droit des affaires et propriété intellectuelle

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