Au titre des atteintes à l'intégrité physique d'une personne, l'article 222-22 du code Pénal rappelle que l'agression sexuelle est constituée par toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise. Jusqu’à la Loi N° 2010-121 du 8 février 2010 tendant à inscrire l'inceste commis sur les mineurs dans le code pénal,laquelle qui insère en particulier un nouvel article 222-22-1 dans notre code pénal, ce dernier ne réprimait pas comme infraction autonome les agressions sexuelles entre parents proches ou actes d’inceste. Il tenait cependant compte du lien de famille pour sanctionner en déterminant une circonstance aggravante au lien de famille. En quoi peut-on parler d'évolution ?
Avant la Loi, notre code tenait compte du lien de famille pour sanctionner et définir certaines infractions sexuelles en accordant une circonstance aggravante à ce lien de famille.
De ce fait, lorsqu'elles étaient commises par « un ascendant, légitime, naturel ou adoptif, ou par toute autre personne ayant autorité sur la victime ; la sanction était majorée.
Les règles différent selon la nature de l'infraction qu’il s’agisse de viol, d’agressions sexuelles ou d’atteintes sexuelles, et selon que la victime a ou non dépassé l'âge de la majorité sexuelle fixée à 15 ans, selon le type de comportements déviants lié à la transgression sexuelle.
Or force est de constater que l’inceste revêt un caractère spécifique dans les rapports familiaux, puisqu’ici l’auteur n’a pas besoin d’utiliser la violence, la contrainte, la menace ou la surprise pour arriver à ses fins.
Cet acte, assimilable à un véritable abus de confiance sur l’enfant, permet à tout proche parent d’utiliser la confiance préétablie, du fait du lien familial, pour obtenir faveurs et actes déviants souhaités.
Or malgré cette particularité, notre code pénal, assimilait l’inceste
- soit à un viol, qualifié de criminel qui relève de la cour d'assises : tout acte de pénétration sexuelle de quelque nature que ce soit, , lequel commis sur un enfant de moins de quinze ans, est puni de vingt ans de réclusion criminelle quel qu'en soit l'auteur.
- soit , au même titre que la pédophilie en le qualifiant d’attentat à la pudeur avec circonstance aggravante lié à des attouchements qui suppose un contact physique de nature sexuelle soit de l'auteur sur la victime, ou d'une victime, contrainte et forcée.
L'attentat à la pudeur était réprimé plus ou moins sévèrement, selon qu'il a été commis avec violence, contrainte ou surprise, qu’il a entraîné des blessures physiques plus ou moins graves, sur un mineur de quinze ans…
Ainsi, les atteintes sexuelles sur des mineurs âgés d'au moins quinze ans ne constituent des infractions que si elles sont commises par « un ascendant, légitime, naturel ou adoptif, ou par toute autre personne ayant autorité sur la victime », lequel encourt deux ans d'emprisonnement et une amende de 30 000 euros. Article 227-27 du code pénal. Ce texte vise les atteintes sexuelles sans violence, contrainte, menace ni surprise sur un mineur âgé de plus de quinze ans.
En matière d’agression sexuelle, où les circonstances aggravantes peuvent se cumuler, l’acte commis sur un mineur de 15 ans par un ascendant, fait encourir à son auteur une peine de 10 ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende. ( article 222-30 code pénal).
Avec la nouvelle loi, la spécificité de l’inceste, en tant que tel est désormais reconnue. Il s’agit d’un point important, destiné à permettre aux victimes de mieux se reconstruire, pendant que certains détracteurs considèrent qu’il n’y a pas grand apport à une telle mesure.
I- Les points essentiels de la réforme
Notre code pénal compte désormais un paragraphe " de l'inceste commis sur les mineurs " depuis la loi N°2010-121 du 8 février 2010 tendant à inscrire l'inceste commis sur les mineurs dans le code pénal et à améliorer la détection et la prise en charge des victimes d'actes incestueux -NOR: JUSX0908032L. Déposée à l'Assemblée nationale le 18 mars 2009, et adoptée le 26 janvier 2010 elle affiche ses deux objectifs : identifier, prévenir, détecter et lutter contre l'inceste sur les mineurs et améliorer l'accompagnement médical et social des victimes.
A) La définition de l’inceste
Les "viols et agressions sexuelles sont qualifiés d'incestes lorsqu'ils sont commis au sein de la famille, sur un mineur, par un ascendant ou par toute autre personne ayant une autorité de droit ou de fait".
Un amendement gouvernemental a ajouté expressément à cette rédaction l'inceste entre frère et sœur et l'inceste commis par le concubin d'un membre de la famille.
Ainsi les viols et agressions sexuelles lorsqu’ils sont commis sur un mineur par son ascendant, son oncle, sa tante, son frère, sa sœur, sa nièce, son neveu ou bien par le conjoint, le pacsé ou le concubin d’une de ces personnes, sont considérés comme des incestes.
Le mineur ne peut être considéré comme consentant à un acte sexuel avec un membre de sa famille . Il subit, rappelons le ici, un véritable abus de confiance de la part d’adultes qu'il côtoiera au sein de la famille, au moment même où il est censé construire sa personnalité qui entre alors dans un processus de destruction. La notion de contrainte est également précisée, "car la question du consentement est centrale dans la répression de l'inceste".
B) Les nouveaux articles à prendre en compte
Cette loi porte 3 titres.
TITRE 1 : IDENTIFICATION ET ADAPTATION DU CODE PENAL A LA SPECIFICITE DE L'INCESTE
TITRE 2 : PREVENTION
TITRE 3 : ACCOMPAGNEMENT DES VICTIMES
Une circulaire d’application du 9 février 2010 du Ministre de la Justice vient l’expliciter.
1°-Précision sur la contrainte morale : Une preuve facilitée dans la rédaction de l’article 222- 22-1
La contrainte prévue par le premier alinéa de l'article 222-22 peut être physique ou morale. La contrainte morale peut résulter de la différence d'âge existant entre une victime mineure et l'auteur des faits et de l'autorité de droit ou de fait que celui-ci exerce sur cette victime.
2°-Précisions sur les viols et agressions sexuelles à caractère incestueux
Au sein d’un Paragraphe: sur l'inceste commis sur les mineurs.
Article 222-31-1
"Les viols et les agressions sexuelles sont qualifiés d'incestueux lorsqu'ils sont commis au sein de la famille sur la personne d'un mineur par un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s'il s'agit d'un concubin d'un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait"
Article 222-31-2
"Lorsque le viol incestueux ou l'agression sexuelle incestueuse est commis contre un mineur par une personne titulaire sur celui-ci de l'autorité parentale, la juridiction de jugement doit se prononcer sur le retrait total ou partiel de cette autorité en application des articles 378 et 379-1 du code civil. Elle peut alors statuer sur le retrait de cette autorité en ce qu'elle concerne les frères et sœurs mineurs de la victime.
Si les poursuites ont lieu devant la cour d'assises, celle-ci statue sur cette question sans l'assistance des jurés"
3°-Précisions sur les atteintes sexuelles commises sans violence, contrainte, menace ni surprise sur mineur de quinze ans qualifiées incestes.
Article. 227-27-2
Les infractions définies aux articles 227-25, 227-26 et 227-27 sont qualifiées d'incestueuses lorsqu'elles sont commises au sein de la famille sur la personne d'un mineur par un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s'il s'agit d'un concubin d'un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait.
Article 227-27-3
Lorsque l'atteinte sexuelle incestueuse est commise par une personne titulaire de l'autorité parentale sur le mineur, la juridiction de jugement doit se prononcer sur le retrait total ou partiel de cette autorité en application des articles 378 et 379-1 du code civil.
« Elle peut alors statuer sur le retrait de cette autorité en ce qu'elle concerne les frères et sœurs mineurs de la victime.
« Si les poursuites ont lieu devant la cour d'assises, celle-ci statue sur cette question sans l'assistance des jurés. »
B) L’amélioration de la prévention de l'inceste
Celle-ci est envisagée notamment en renforçant le rôle de l'école dans la prévention du délit et celui des chaînes audiovisuelles publiques.
L’article L. 121-1 du Code de l’éducation, prévoit que « les écoles, les collèges et les lycées assurent une mission d'information sur les violences et une éducation à la sexualité »
Pour mieux détecter, signaler et prendre en charge les victimes, la loi prévoit également que la formation initiale et continue des médecins, enseignants, travailleurs sociaux et avocats.
C) Un meilleur accompagnement des victimes
La possibilité de prévoir un « administrateur ad hoc » désigné dès qu'intervient un signalement d'inceste voit le jour.
L’article 5 de la Loi prévoit que « Lorsque les faits sont qualifiés d'incestueux au sens des articles 222-31-1 et 227-27-2 du code pénal la désignation de l'administrateur ad hoc est obligatoire, sauf décision spécialement motivée du procureur de la République ou du juge d'instruction. »
Son rôle de surveillance, de protection sera essentiel pour prévenir tous risques. Il sera l’interlocuteur privilégié et disponible du mineur pour l'aider dans les démarches engagées.
D) Une possibilité donnée aux associations de lutte contre l’inceste de se constituer partie civile.
II- Des sanctions accrues
Le ministère public peut poursuivre d'office dès lors qu'il a connaissance des faits. Il n'est donc pas indispensable que la victime porte plainte.
L'article 2-3 du code de procédure pénale autorise les associations de défense, à se constituer partie civile en cas d'atteintes sexuelles incestueuses commises sur un mineur.
Le mineur ne peut être considéré comme consentant à un acte sexuel avec un membre de sa famille. Victime d'une infraction sexuelle, il pourra être assisté d'un avocat tout au long de la procédure et ce dès le début de l'enquête".
La sanction variera selon qu’il s’agira d’un viol, qualifié crime qui pourra entraîner une condamnation de 20 ans d’emprisonnement, (article 222-24 du code pénal ) ou bien d’une atteinte sexuelle,
Tarif de base : 5 ans d'emprisonnement et de 75.000 euros d'amende. (article 227-25 du code pénal) au lieu de 2 ans et 30.000 euros d'amende auparavant.
Rappel un retrait de l’autorité parentale, ourra être décidé, conformément aux dispositions de l’article 378 du code civil
Il est à noter, avec cette réforme que notre arsenal pénal s’est amélioré puisque la défense des plus fragiles, la protection de l'enfance, mais aussi la préservation de la cellule familiale ont fait un nouveau pas en avant …
Demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
Sabine HADDAD
Avocat au barreau de Paris