Selon une jurisprudence bien établie de la Cour de cassation, seule la visite médicale de reprise, obligatoire à l'issue de certains arrêts de travail pour raisons de santé et notamment d'un arrêt pour maladie d'au moins 21 jours (C. trav. art. R 4624-21), met fin à la suspension du contrat de travail du salarié.
La visite de préreprise que le salarié ou son médecin traitant peuvent solliciter auprès du médecin du travail, durant la suspension du contrat, lorsqu'une modification de l'aptitude du salarié est prévisible (C. trav. R 4624-23) ne saurait se substituer à cette visite de reprise qu'il incombe à l'employeur d'organiser sous peine de manquer à son obligation de sécurité de résultat (Cass. soc. 28 février 2006 n° 05-41.555 ; Cass. soc. 16 juin 2009 n° 08-41.519).
La Cour de cassation s'est toujours montrée rigoureuse dans l'application de ces principes et n'entend pas y déroger comme elle le démontre dans un nouvel arrêt.
L'affaire concernait un salarié ayant fait l'objet d'absences répétées pour maladie. Au cours de la dernière suspension de son contrat de travail, il avait bénéficié d'une visite de préreprise à l'issue de laquelle le médecin du travail avait fixé la date de la visite de reprise du travail et l'en avait informé ainsi que l'employeur. Mais le salarié ne s'était présenté ni dans l'entreprise à l'issue de son dernier arrêt de travail ni devant le médecin du travail au jour fixé par celui-ci. Il avait même écrit à l'employeur qu'il refusait de reprendre son travail en raison de « l'ambiance dans l'entreprise ». Quelques semaines après, l'employeur l'avait licencié pour faute grave pour avoir abandonné son poste et ne pas s'être présenté à la visite de reprise.
La Cour de cassation approuve la décision des juges du fond de considérer ce licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle rappelle que c'est à l'employeur qu'il appartient de prendre l'initiative de la visite médicale de reprise et précise que le salarié ne commet aucun manquement en ne se présentant pas à une visite seulement envisagée par le médecin du travail.
Elle précise aussi, pour la première fois à notre connaissance, que la convocation du salarié à cette visite peut être faite par tous moyens, l'employeur n'étant donc pas tenu d'y procéder par lettre recommandée avec accusé de réception, comme l'avait estimé la cour d'appel.
Enfin, puisque le contrat était resté suspendu, en l'absence de visite de reprise valablement organisée par l'employeur, le salarié n'avait commis aucune faute en ne se présentant pas à son poste à l'issue de son arrêt de travail.
Cet arrêt particulièrement sévère devrait inciter les employeurs à être très rigoureux dans la gestion des absences pour raisons médicales qui, de par leur nature et leur durée, nécessitent une visite de reprise :
- sauf si le salarié a lui-même pris l'initiative de solliciter cette visite auprès du médecin du travail après les en avoir informés, comme la jurisprudence l'admet, ils doivent impérativement l'organiser eux-mêmes, dans les plus brefs délais et au plus tard dans les 8 jours suivant la fin de l'arrêt de travail ;
- ils doivent convoquer le salarié à cette visite, par écrit de préférence afin de se ménager une preuve de leur démarche ;
- tant que cette visite n'a pas eu lieu, ils ne doivent tirer aucune conséquence de l'absence du salarié à son poste de travail.
Source : Editions Francis Lefebvre