A l’approche des fêtes de fin d’année, il est d’usage pour les communes d’installer dans les rues et les bâtiments publics illuminations et décorations pour le plus grand plaisir des petits… comme des grands.
Parmi ces décorations figure en bonne place la Crèche de Noël. La crèche tient désormais pour beaucoup plus de la coutume que d’une véritable symbolique religieuse.
Pour autant, elle tient son origine dans la tradition chrétienne. Or, en installant une crèche dans un lieu public, il ne faut pas méconnaître le principe de laïcité.
Les communes ou autres personnes publiques qui souhaitent disposer une crèche de Noël dans un emplacement public doivent donc jongler entre laïcité et festivités… ainsi que le précise le Conseil d’Etat dans l’affaire commentée (CE, 9 novembre 2016, n°395122).
Dans cette affaire, la commune de Melun avait décidé de mettre en place pour le mois de décembre 2012 une crèche dans une alcôve de l’hôtel de ville située sous le porche reliant la cour d’honneur au jardin. Une association avait alors demandé à la commune de s’abstenir dans sa démarche. La commune n’ayant pas consenti à cette demande, l’association avait alors saisi le tribunal administratif, lequel avait rejeté sa demande. Mais la cour administrative d’appel avait finalement annulé le jugement ainsi que la décision de la commune.
C’est sur le pourvoi formé par la commune de Melun que le Conseil d’Etat recadre le débat.
Le Conseil d’Etat concède que la crèche de Noël peut revêtir plusieurs significations. Si elle présente pour un certain nombre de personnes un caractère religieux en faisant partie de l’iconographie chrétienne, elle constitue aussi un élément traditionnel des décors des fêtes de fin d’année sans signification religieuse particulière.
C’est pourquoi, le Conseil d’Etat précise qu’une crèche ne peut être installée par une personne publique dans un lieu public et à titre temporaire que « lorsqu’elle présente un caractère culturel, artistique ou festif, sans exprimer la reconnaissance d’un culte ou marquer une préférence religieuse ». Faute de présenter un tel caractère, l’installation d’une crèche serait jugée contraire aux principes de laïcité et de neutralité.
Quatre conditions doivent alors être appréciées pour savoir si l’installation de la crèche présente ce caractère culturel, artistique ou festif :
- Le contexte : il doit être dépourvu de tout élément de prosélytisme ;
- Les conditions particulières de l’installation ;
- L’existence (ou l’absence) d’usages locaux ; et
- Le lieu de cette installation. Dans ce cas, le Conseil d’Etat distingue deux hypothèses : (i) si l’installation est réalisée dans l’enceinte même de bâtiments publics, sièges de collectivités publiques ou de services publics, elle n’est pas possible sauf à justifier de circonstances particulières ; (ii) par contre, dans les autres lieux publics, y compris sur la voie publique, l’installation sera permise pendant la période de fin d’année – sauf à constituer un acte de prosélytisme.
Par un second arrêt du même jour dans un litige opposant une association au conseil général de la Vendée (CE, 9 novembre 2016, n°395223), le Conseil d’Etat assoie sa jurisprudence.
Il appartient maintenant aux juridictions de renvoi de statuer, pour ces deux affaires, à nouveau au vu des conditions posées par le Conseil d’Etat.
V.A.