C’est une décision pour un horloger suisse que vient de rendre la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE 4 septembre 2014 C-452/13 Germanwings / Henning).
En effet, elle avait déjà confirmé (CJCE 19 novembre 2009 C-402/07 Sturgeon et C-432/07 ; 23 octobre 2013 C-581/10 et C-629/10) que le retard de trois heures ou plus ouvrait droit au profit du passager aérien, à une indemnisation dans les conditions énoncées à l’article 7 du Règlement CE n°261/2004 établissant des règles communes en matière d’indemnisation et d’assistance des passagers en cas de refus d’embarquement et d’annulation ou de retard important d’un vol.
A cette occasion, elle avait précisé que le retard s’entendait en une perte de temps supérieure ou égale à trois heures, c’est-à-dire lorsque les passagers atteignent leur destination finale trois heures ou plus après l’heure d’arrivée initialement prévue par le transporteur aérien.
Mais quelle est donc l’heure d’arrivée effective à retenir afin de déterminer l’ampleur du retard subi par les passagers aériens et savoir si ce retard ouvre droit à indemnisation ou non ?
C’est à cette question très précise, et d’une grande importance pratique pour les compagnies, que vient de répondre la Cour de Justice.
Dans l’affaire soumise à la Cour, le passager aérien soutenait qu’il était arrivé avec plus de trois heures de retard. Quant à la compagnie aérienne, elle estimait que l’heure d’arrivée effective était l’heure à laquelle les roues de l’avion avaient touché le tarmac et qu’en l’espèce le retard était de 2h58 – en sorte que ce retard n’ouvrait pas droit à indemnisation.
Or, la notion d’heure d’arrivée effective n’est pas définie dans le Règlement CE n°261/2004.
Cette notion pouvait donc en pratique recouvrir plusieurs réalités : comme le moment où l’avion se pose sur la piste, ou celui où il atteint sa position de stationnement, ou celui où les portes s’ouvrent ou encore un moment défini contractuellement entre les parties.
Tout d’abord, afin de permettre une application uniforme au sein de l’Union de cette notion d’heure d’arrivée effective, la Cour excluait d’emblée la possibilité pour les parties de la définir contractuellement.
La Cour relevait ensuite que durant toute la durée du vol, les passagers se trouvent confinés dans un espace clos, sous les instructions et le contrôle du transporteur aérien et qu’ils ne peuvent alors vaquer librement à leurs occupations (familiales, professionnelles, etc.). Les passagers se trouvent ainsi dans une situation de « contrainte » qui est admise et inévitable tout au long du vol. Cependant, cette situation ne saurait perdurer au-delà de la durée du vol.
Elle observait encore que cette situation ne change pas de manière substantielle lorsque l’avion se pose sur la piste, ni lorsqu’il atteint sa position de stationnement, ni même lorsque les cales de blocages sont installées.
Ainsi la Cour relevait que les passagers cessaient d’être dans cette situation, dès l’instant où les portes de l’avion s’ouvrent, puisqu’ils sont autorisés à sortir de l’avion.
La Cour remarquait par ailleurs que la notion d’heure d’arrivée effective contenue dans d’autres règlements européens ou dans des documents émis par IATA, et se référant au moment où l’avion atteint sa position de stationnement, ne saurait être utilisée ici. En effet, ces autres textes ou documents se rapportent à la navigation aérienne et non aux droits minimaux des passagers aériens contenus au Règlement CE n°261/2004. Il en résulte que cette notion n’est pas pertinente pour apprécier l’ampleur du retard.
La Cour en conclut alors que la notion d’heure d’arrivée effective utilisée pour déterminer l’ampleur du retard coïncide avec le moment où au moins l'une des portes de l’avion s’ouvre.