1. Les faits. Un avocat fait signer le 29 mai 2013 à un majeur en curatelle renforcée une convention d’honoraire, relative à la vente amiable d’un bien, posant un honoraire de résultat de 3 % de la vente du bien, d’une valeur de 1.200.000 euros.
Par courrier du 26 novembre 2013, le curateur professionnel refuse de valider la convention, et invite le majeur protégé à saisir le Juge des tutelles pour qu’il statue sur le bien fondé de cette convention.
Le 04 décembre 2013, l’avocat du majeur protégé adresse au Juge des tutelles une requête en ce sens. La vente sera signée le lendemain, 05 décembre 2013.
2. Procédure. Par ordonnance du 27 avril 2016, le juge des tutelles de Bastia, sans doute relancé par l’avocat du majeur protégé, qui n’était toujours pas réglé, rejette la requête. L’avocat en fait appel.
A l’audience de la Cour d’appel de Bastia du 15 novembre 2016, l’avocat demande que sa convention de mission soit validée et exécutée.
Par arrêt du 25 janvier 2017, la Cour d’appel de Bastia confirme l’ordonnance du juge des tutelles, aux motifs que, le juge des tutelles ayant reçu le 05 décembre 2013 la requête de l’avocat, soit le jour même de la vente immobilière, « le juge des tutelles n’a pas été en mesure d’autoriser la signature de la convention d’honoraires avant la dite vente sachant que (le majeur protégé) ou son conseil n’en ont pas sollicité le report. » La Cour d’appel précisant : « La convention d’honoraires n’ayant pas été signée valablement et préalablement à la vente », l’avocat « n’est pas fondé à en réclamer, s’agissant des honoraires de résultat, l’exécution. »
3. Apport de la décision. Cette affaire permet de rappeler plusieurs principes, concernant l’honoraire de l’avocat, intervenant pour un majeur protégé, en curatelle.
A) Une convention d’honoraire suppose, en curatelle renforcée, la cosignature du majeur protégé ET de son curateur. Lorsque la convention d’honoraires comporte un honoraire forfaitaire, il s’agit d’un acte d’administration ; lorsque la convention d’honoraires comporte un honoraire de résultat, ou un honoraire au temps passé, il s’agit d’un acte de disposition.
B) Lorsque le curateur refuse d’accepter les termes de la convention d’honoraire présentée par l’avocat du majeur, il appartient à l’avocat d’échanger avec le curateur pour comprendre les raisons de son refus. Il se peut que les conditions financières de l’avocat soient excessives, compte tenu des possibilités de la personne et du travail à fournir. Or, la modération est un des principes essentiels de la profession d’avocat, particulièrement en droit des majeurs vulnérables. L’avocat doit alors reconsidérer la situation : intervenir certes, mais à des conditions raisonnables.
C) Lorsque, comme en l’espèce, le refus du curateur conduit l’avocat à déposer une requête au juge des tutelles, celui-ci validera ou refusera la convention d’honoraire proposée, à l’aune de l’intérêt du majeur protégé.
D) Lorsque la convention d’honoraires n’est toujours pas validée par le juge au moment où la mission de l’avocat est terminée, alors cette convention d’honoraires (à supposer même qu’elle soit conforme à l’intérêt du majeur) ne pourra jamais être validée judiciairement.
En l’espèce, la requête de l’avocat avait été adressée la veille de la vente au juge des tutelles, et lui était parvenue le jour de la vente immobilière : or, les contraintes de travail d’un juge des tutelles font que chaque requête, sauf urgence (l’urgence étant appréciée à l’aune de l’intérêt du majeur protégé), s’inscrit dans un calendrier de travail judiciaire de plusieurs semaines voire de plusieurs mois. La requête de l’avocat ne pouvait guère être validée avant la vente.
En d’autres termes, l’avocat aurait dû s’y prendre beaucoup plus tôt : sa requête du 29 mai 2013 aurait dû donner lieu à une réponse du curateur dans les semaines qui suivirent sa transmission, sans attendre un refus formel qui n’advint que le 26 novembre 2013.
4. Pour aller plus loin. Lorsqu’un avocat a travaillé sans toutefois que sa convention soit validée par le juge des tutelles, et que la cour d’appel confirme cette absence de validation, il ne lui reste plus qu’à convenir d’un nouvel honoraire, non plus de résultat, mais lié à son temps effectif passé sur le dossier. Ce nouvel honoraire proposé devra à son tour être validé par son Client (le majeur protégé) et le curateur de celui-ci. En cas de nouveau refus du curateur, l’avocat pourra alors saisir le Bâtonnier.
En effet, en droit des majeurs protégés, tant que sa convention d’honoraire n’est pas validée, l’avocat n’a aucune obligation de travailler, et s’il le fait, seul les usages (temps passé effectif, nature des diligences, situation de fortune du Client) lui permettront d’être réglé a posteriori sur la base d’un taux horaire. Mais s’il intervient pour un majeur protégé éligible à l’aide juridictionnelle, et que celle-ci n’est pas demandée, l’avocat n’aura évidemment droit à aucun honoraire.
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