En matière de copropriété, une des sanctions les plus lourdes concerne l'annulation totale d'une assemblée générale.
Plusieurs motifs sont souvent invoqués à l'appui d'une telle demande en annulation.
Nous en étudierons un seul dans le cadre de cet article : il s'agit de l'obligation, prévue à l’article 9 du décret du 17 mars 1967, de tenir la réunion de l’assemblée générale dans la commune de situation de l’immeuble, sauf dispositions contraires du règlement de copropriété. Comme vient de le rappeler le tribunal judiciaire de Nanterre, il est de jurisprudence constante que le non-respect de ces dispositions est une "irrégularité de fond" qui entraine l'annulation de l'assemblée générale (TJ Nanterre, 14 déc. 2020, n° 19/10347). Le tribunal a ainsi fait droit à la demande de copropriétaires, défendus par Maitre Antoine CHRISTIN.
Deux points importants méritent d'être relevés :
- La notion de « commune » au sens de l’article 9 précité doit être interprétée de manière restrictive et limitée à sa signification administrative, de sorte que l’assemblée générale qui s’est tenue dans une autre commune est atteinte de nullité (Civ. 3e, 22 mai 1990, n° 88-12349). C'est ce que rappelle la cour d'appel de Comar en 2009 (CA Colmar, 9 avr. 2009, n° 07/01895). Ainsi, il n'est pas possible, sauf dérogation prévue dans le règlement de copropriété, de tenir l'AG dans une commune limitrophe, quand bien même cette dernière relèverait de la même intercommunalité (commaunauté de communes par exemple)
- Les demandeurs peuvent prétendre à l’annulation de toute l’assemblée générale du 26 novembre 2009, sans qu’ils aient à justifier d’un grief particulier (TGI Grasse, 2e ch. civ., construction, 7 juill. 2017, n° 10/00720) ;
Il arrive fréquemment que le syndic, par commodité pratique, organise l'AG dans ses locaux et non dans la commune de situation de l'immeuble dont il assure la gestion. Un exemple intéressant est fourni par un jugement de Nanterre (TGI Nanterre, 8e ch., 15 févr. 2006, n° 05/03105). Dans cette espèce, l'AG d'une copropriété située à Bois-Colombes (92) est annulée dans sa totalité pour avoir été tenue dans la commune voisine de Colombes, commune siège du syndic gestionnaire.
" Attendu sur le moyen principal d’annulation de l’assemblée générale, qu’il résulte des dispositions du décret du 17 mars 1967, en son article 9, qu’à défaut de disposition contraire du règlement de copropriété, celle-ci doit se réunir dans la Commune du lieu de l’immeuble, soit en l’espèce à Bois Colombes ;
Qu’en l’espèce si le règlement de copropriété a précisé (page 25 in fine et page 26) que ces réunions doivent se tenir « soit dans l’immeuble, soit au domicile du syndic dans une salle des réunions de Paris », il n’est cependant pas prévu que cela puisse être en autre lieu ; qu’il n’est pas non plus invoqué de décision de l’assemblée générale emportant possibilité de tenue en un autre lieu, notamment par suite de changement de syndic ou de domiciliation du syndic ; que le règlement de copropriété a ainsi clairement visé, hors la Commune de BOIS COLOMBES, la seule Commune de Paris, sans équivoque ;
Que cependant l’assemblée générale du 20 décembre 2004 a été convoquée pour se tenir dans les bureaux du syndic à COLOMBES (92), ce qui enfreint les dispositions précitées et entache de nullité l’assemblée générale dont il s’agit, sans que la nécessité d’un grief pour les copropriétaires ne soit requise ;
Que la circonstance selon laquelle l’assemblée a pu se réussir à diverses reprises, avant le 20 décembre 2004 et sans contestation, à COLOMBES ne peut en l’absence de décision préalable de l’assemblée générale sur ce point à la majorité prévue par l’article 24 de la loi n°557-65 du 10 juillet 1965, ou de modification du règlement de copropriété, couvrir en l’espèce cette cause de nullité ".
Dura lex sed lex...
On voit donc que le syndic a tout intérêt à respecter scrupuleusement ces règles géographiques, étant précisé que l'annulation de l'AG entraine celle de l'ensemble des résolutions votées. Les conséquences peuvent être lourdes...