L’article L3221-4 du Code du travail dispose que :
« Sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse. »
Selon une formulation devenue constante, « la différence de traitement entre les salariés placés dans la même situation doit reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence » (Cass. soc., 21 juin 2005 : Juris-Data n° 2005-029082 ; Dr. soc. 2005, p. 1047, note Ch. Radé ; RJS 2005, n° 978. - Cass. soc., 25 mai 2005 : Juris-Data n° 2005-028564 ; Bull. civ. 2005, V, n° 178 ; JCP S 2005, 1174, note F. Bousez. - Cass. soc., 1er déc. 2005 : Juris-Data n° 2005-030999 ; JCP G 2006, II, 10017, note D. Corrignan-Carsin ; Cass. soc., 15•mai 2007, n° 05-42.894 ; Cass. soc., 15 mai 2007, n° 05-42.895).
Ont été reconnus comme justification objective d’une différence de traitement, notamment :
1° l’ancienneté, à condition qu’elle ne soit pas prise en compte dans une prime spéciale mais intégrée dans le salaire de base (Soc., 20 juin 2001, n° 99-43 905) ;
2° l’expérience :
« L'expérience est définie comme l'ensemble des « modifications avantageuses qu'apporte l'exercice à nos facultés, des acquisitions que fait l'esprit par cet exercice, et, d'une façon générale, de tous les progrès mentaux résultant de la vie. (...) On n'appelle pas expérience toutes les modifications produites par la vie (...), mais seulement celles qu'on juge avantageuses. Le terme a donc une valeur appréciative.
Dans le travail, l'expérience est considérée, au même titre qu'un diplôme (auquel elle correspond parfois, au titre des mécanismes de validation de l'expérience acquise), comme présumant une certaine compétence.
Cela peut certes se traduire par un travail de meilleure qualité mais il serait réducteur de ne la réduire qu'à cela : le salarié qui a de l'expérience est porteur de multiples autres avantages pour son employeur.
C'est un salarié qui n'a pas besoin d'une longue formation pour être « opérationnel », qui nécessite moins d'encadrement, qui peut rassurer la clientèle en se prévalant d'une longue pratique... Bref, pour l'entreprise, l'expérience d'un salarié est une valeur que l'employeur peut choisir de distinguer. » (A. Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, V° Expérience : PUF 2002) ».
La Cour de cassation admet en s'y référant, de prendre en compte l’expérience acquise au sein du même employeur (Cass. soc., 7 juin 2006, n° 04-45.592) ou en l'appliquant (Cass. soc., 16 févr. 2005, n° 03-40.465 : RJS 2005, n° 28. - Cass. soc., 20 sept. 2004, n° 03-42.025).
La Cour de cassation a pris en compte l'expérience « acquise au cours des années passées sur le site » (Cass. soc., 16 févr. 2005, n° 03-40.465 : RJS 2005, n° 28.) ou « l'expérience acquise par les salariés au cours de leurs années de présence dans l'entreprise » (Cass. soc., 20 sept. 2004, n° 03-42.025 ; Soc., 29 septembre 2004, n° 03-42.033).
Ainsi, un salarié, agent de sécurité incendie, ayant plus d'expérience sur un site peut être mieux rémunéré (Cass. soc., 16 févr. 2005, no 03-40.465), ainsi qu’un agent de sécurité travaillant dans un hôtel (Cass. soc., 15 nov. 2006, nos 04-47.156 à 04-47.158).
La Cour de cassation répond clairement : il est désormais acquis que l'expérience peut aussi bien être celle constituée dans l'entreprise, où l'application du principe d'égalité est invoquée, que celle forgée auprès d'autres employeurs.
Ont également été reconnus comme justification objective d’une différence de traitement :
- la performance, généralement rémunérée par des primes dont le calcul doit obéir à des critères objectifs et vérifiables (Soc, 18 janvier 2000, Bull., n° 25)
- la date d’embauche, entraînant l’application d’accord collectifs distincts (Cass. Soc.11 décembre 2002, Bull., n° 00-46.800)
- la qualité du travail fourni, (Soc., 26 novembre 2002, n° 00-41.633, Bull., n° 354)
- la date d’embauche postérieure à la mise en oeuvre d’un accord de réduction du temps de travail prévoyant pour les seuls salariés en fonction antérieurement une indemnité compensatrice de la réduction de salaire (Soc., 1er décembre 2005, Bull., n° 206)
- des tâches plus larges dans un poste de travail identique (Cass. Soc., 13 mars 2002, n° 00-42.536)
- une technicité particulière du poste (Cass. Soc., 8 janvier 2003, n° 00-41.228)
- la charge de responsabilités particulières (Soc., 11 janvier 2005, n° 03-15.258)
- l’appartenance des salariés à des statuts différents (salariés de droit privé et fonctionnaires -Soc., 11 octobre 2005, n° 04-43.026- ou salarié sous contrat à durée indéterminée et intermittent du spectacle -arrêt récent du 28 avril 2006, n° 03-47.171-) à des établissements distincts (Soc., 27 octobre 1999, Bull., n° 422 - Cass. Soc.,18 janvier 2006, n° 03-45.422 ) ou à des entreprises distinctes (Soc., 6 juillet 2005, Bull., n° 235)
- La pénurie de candidat entraînant le risque de fermeture de l’établissement (Soc., 21 juin 2005, Bull., n° 206), ce qu’admettait déjà la jurisprudence communautaire (CJCE, 27 octobre 1993, C-127/92)
Il convient donc d'apprécier au cas par cas si des critères objectifs permettent de justifier une différence de traitement entre plusieurs salariés en comparant les situations.
Si les situations des salariés comparés semblent similaires, il faut alors envisager une action devant le Conseil de Prud'hommes afin de solliciter des arriérés de salaires, notamment.