I. Exposé des faits
Le 31 mars 2015, FRANFINANCE a consenti à une personne âgée un crédit de 30.000€ (avec intérêts à 4,90%) destiné à financer des travaux de rénovation de la toiture et des combles de son habitation, effectués par la société GLOBAL HABITAT.
Le 22 avril 2015, les travaux sont effectués et réceptionnés.
L'emprunteuse décède le 28 septembre 2015.
Faute pour son héritier de régler le crédit, FRANFINANCE l'assigne en vue d'obtenir sa condamnation à cette fin.
Par jugement du 9 avril 2019, le tribunal d'instance de Mont de Marsan a annulé la vente et le crédit, condamné GLOBAL HABITAT à rembourser FRANFINANCE et à reprendre possession, à ses frais, de tous les produits, matériaux et matériels qu'elle a installés au domicile de sa cliente décédé et de remettre celui-ci, dans l'état qui était le sien lors de la conclusion du contrat de vente du 31 mars 2015.
SAS Global Habitat a relevé appel du jugement, mais a été déboutée.
II. Exposé des considérations des juges d'appel
A. Nullité de la vente pour altération mentale de l'acquéreur
Devant la Cour, il est établi que les capacités mentales de l'acheteuse-emprunteuse étaient altérées à la date de la souscription du contrat de travaux et du contrat de prêt affecté.
Pire, ces altérations étaient manifestement apparentes, car elles ont été constatée par un médecin expert et agréé, dans le cadre d'une procédure de mise sous tutelle, le 19 mai 2015, soit à peine 5 semaines après la signature des actes litigieux !
Aussi, en 5 semaines, les altérations mentales de la justiciable ne pouvaient avoir surgi soudainement entre les 31 mars et 19 mai 2015, et ce d'autant plus qu'elle est décédée dès septembre 2015 et que son médecin traitant a constaté qu'elle était sujette à des troubles de nature spatio temporels et de mémorisation dès juin 2014 !
Par conséquent, la consommatrice n'a pu valablement consentir les contrats litigieux au sens de l'article 414-1 du code civil.
De fait, la vente doit être annulée.
B. Nullité du contrat de crédit souscrit auprès de FRANFINANCE
Le contrat de crédit est un contrat affecté au contrat principal de travaux de rénovation de toiture effectués par le vendeur GLOBAL Habitat.
De fait, la nullité de plein droit du contrat principal entraîne d'office la nullité du contrat de crédit affecté.
C. Conséquences
1. Sur la reprise des matériaux
La nature des travaux effectués rendent en partie impossible la remise en état des locaux dans leur état au 31 mars 2015, notamment concernant les travaux de traitement du bois.
En revanche, le vendeur peut récupérer le matériel utilisé pour réaliser la couverture en tuiles en terre cuite quand les tuiles ont été remplacées et l'isolation intérieur des combles notamment s'agissant de la laine de roche installée.
De fait, GLOBAL HABITAT est condamné par la Cour d'appel à reprendre possession, à ses frais, de tous les produits, matériaux et matériels qu'elle a utilisés ou installés au domicile de l'acquéreur.
2. Sur le crédit
La Cour d'appel exonère l'héritier de rembourser le solde du crédit à FRANFINANCE et condamne cette dernière à lui rembourser les sommes prélevées sur le compte bancaire de la défunte, de son vivant.
Selon la Cour d'appel, FRANFINANCE a commis une faute en ne vérifiant pas la validité du bon de commande.
En effet, celui-ci :
- était rédigé de façon manuscrite,
- était illisible notamment sur le détail du matériel et produits vendus et services à effectuer
- ne détaillait pas le prix des prestations divisées en 3 parties
- ne précisait ni la durée de la prestation ni la date prévisible des travaux à effectuer.
- ne comportait aucune référence juridique précisant le cadre du contrat souscrit niles conditions de la rétractation.
Il ressort de ces éléments que l'acquéreur n'était pas mise en mesure de pouvoir vérifier la prestation commandée, la correspondance du prix et ses modalités de financement ni d'exercer son droit de rétractation.
A cela il faut ajouter l'altération de ses facultés mentales... ce qui signifie que la vente souffrait d'une irrégularité absolue !
Quant à GLOBAL HABITAT, elle est condamnée à rembourser FRANFINANCE, car la nullité du contrat principal tient aux fautes commises par le vendeur quant au vice du consentement manifeste du consommateur.
III. QUE RETENIR DE CETTE AFFAIRE ?
En premier lieu, on rappellera que l'article 414-1 du Code civil dispose que :
Pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit. C'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte.
Aussi, la signature d'un contrat portant sur l'installation de matériaux d'isolation et du contrat de crédit qui lui est lié, peuvent être annulés, si on rapporte la preuve de l'altération des facultés personnelles de l'acquéreur au moment où l'acte est passé.
Cette preuve se rapporte au moyen d'un diagnostic médical.
Cependant, l'acquéreur n'est pas automatiquement exonéré de rembourser le crédit. En effet, à ce stade, seul le capital, sans intérêts et déduction faite des versements opérés, doit être restitué par l’emprunteur.
--> Pour échapper au remboursement du crédit, il est obligatoire de démontrer que l'établissement de crédit a commis une faute lors de la délivrance des fonds au vendeur.
Cette faute est notamment caractérisée par la carence du prêteur quant à ne pas s'être assuré que le contrat avait été souscrit régulièrement et que la prestation avait été exécutée régulièrement.
Je reste à votre disposition :
MAIL : gregory.rouland@outlook.fr
tél: 06.89.49.07.92
Avocat au Barreau de PARIS