I. RESUME DE L'AFFAIRE
Une cliente d'un supermarché CARREFOUR est victime d'une chute, après avoir trébuché sur un panneau publicitaire métallique.
Elle obient en référé la désignation d'un expert, puis assigne en responsabilité et indemnisation la société exploitant le magasin, ainsi que son assureur. Elle met également en cause la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire (la CPAM).
La Cour d'appel de LYON (11 décembre 2018, n° 16/07197) donne gain de cause à la cliente, considérant que la responsabilité de l'exploitant du supermarché peut être engagée sur le fondement contractuel, en vertu d’une obligation générale de sécurité de résultat envers sa clientèle.
La Cour de cassation ne partage pas cette opinion et casse l'arrêt pour violation des anciens articles 1384, alinéa 1er (devenu 1242, alinéa 1er) du Code civil et L. 221-1, alinéa 1er (devenu L. 421-3) du Code de la consommation.
Ainsi, selon la Cour de cassation, le Code de la consommation édicte au profit des consommateurs une obligation générale de sécurité des produits et services. Mais il ne soumet pas l’exploitant d’un tel magasin à une obligation de sécurité de résultat à l’égard de la clientèle.
II. QUE RETENIR DE CETTE AFFAIRE ?
L'obligation de sécurité a été consacrée par la loi n°83-660 du 21 juillet 1983 relative à la sécurité des consommateurs, dans une disposition aujourd'hui codifiée à l'article L. 421-3 du code de la consommation (anc. art. L. 221-1) :
« Les produits et les services doivent présenter, dans des conditions normales d'utilisation ou dans d'autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes. »
Cette règle institue une obligation de résultat.
Le 20 septembre 2017, la Cour de cassation a considéré qu'en vertu de ce texte, une entreprise de distribution est débitrice à l'égard de la clientèle d'une obligation générale de sécurité de résultat
(n°16-19.909).
Dans la présente affaire commentée, les juges du fond se sont appuyés sur cette jurisprudence. Mais la Cour de cassation n'en a pas tenu compte, opérant un revirement de jurisprudence.
Désormais (sous réserve de ce que l'avenir nous dira), la responsabilité civile des magasins est engagée sur le fondement du droit commun (art. 1242 alinéa 1er du Code civil, relatif à la responsabilité du fait des choses).
Cela implique que la victime doit démontrer que la chose a été l'instrument du dommage :
- Si la chose est en mouvement, maniée ou en fonctionnement, le simple contact entraînant une blessure suffit pour engager la responsabilité du gardien de cette chose.
- Si la chose est inerte et immobile, la victime doit non seulement prouver que la chose est intervenue dans la réalisation du dommage, mais aussi qu'elle était défectueuse ou se trouvait dans une position anormale (par exemple, sol d'un magasin rendu glissant du fait d'un détritus : Cass. 2e civ. 24 janvier 1985 n° 83-15.378). La preuve est très difficile à établir...
En somme, en cas de chute survenue dans un magasin dont l'entrée est libre, chute dont l'origine est une chise inerte, la responsabilité de l'exploitant du magasin ne peut être engagée que sur le fondement de l'article 1242, alinéa 1er, du Code civil, à charge pour la victime de démontrer que cette chose, était placée dans une position anormale ou était en mauvais état, et qu'elle a été l'instrument du dommage.
Me Grégory ROULAND - avocat au Barreau de PARIS
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