Un salarié n'est pas forcément protégé s'il consomme des drogues en dehors de son lieu et de son temps de travail. En effet, si cette consommation a lieu dans un temps proche de la reprise du travail et tout particulièrement lorsque le salarié occupe des fonctions liées à la sécurité des personnes, le salarié risque d'encourir une sanction disciplinaire.
Ainsi, le 27 mars 2012, la Cour de cassation a considéré que le fait de travailler sous l'emprise de stupéfiants (c'est-à-dire stupéfiants pris en dehors des heures de travail, mais dont les effets perdurent sur le lieu et durant les heures de travail) et de faire courir un risque éventuel à la clientèle constitue un manquement aux obligations découlant du contrat.
En clair, le fait que la consommation ait eu lieu durant un temps de repos n’excuse pas la faute grave.
RESUME DES FAITS
Un membre du personnel naviguant commercial d’une compagnie aérienne avait consommé des drogues durant le temps d’escale séparant deux vols longs courriers.
Informé par les forces de l’ordre de ces faits, l’employeur a licencié pour faute grave le salarié, le contrat de travail interdisant au « personnel de sécurité » de se présenter au travail sous l’emprise de substances illicites.
Contestant la cause réelle et sérieuse de son licenciement, le salarié opposait l’article 9 du Code civil disposant que « Chacun a droit au respect de sa vie privée ». Il faisait ainsi valoir qu’un fait commis en dehors du temps de travail relève de sa vie personnelle et ne peut donc justifier un licenciement de nature disciplinaire.
DECISION DE LA COUR DE CASSATION
Il est vrai que la Cour de cassation avait considéré qu’un fait commis dans le cadre de sa vie personnelle ne peut donner lieu à un licenciement disciplinaire, même s’il a occasionné un trouble dans l’entreprise (Cass. soc., 9 mars 2011, n° 09-42.150).
Mais la Cour de cassation avait érigé une exception : lorsque les faits de vie personnelle sont constitutifs d’un manquement du salarié à une obligation découlant du contrat de travail, l’employeur peut faire usage de son pouvoir disciplinaire (Cass. soc., 3 mai 2011, n° 09-67.464).
Dans notre cas, la Cour de cassation s'est servie de cette jurisprudence, estimant que le salarié avait été valablement licencié pour faute grave :
« Un motif tiré de la vie personnelle du salarié peut justifier un licenciement disciplinaire s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail ».
BREVE ANALYSE DE L'ARRÊT
A quelle obligation le salarié avait-il manqué ?
Tout simplement celle de ne pas se trouver sous l’influence de stupéfiants durant ses fonctions (car c'était contraire aux stipulations du contrat de travail) et de ne pas faire courir de risques aux passagers dont il avait la charge d’assurer la sécurité.
Il est donc aisé de comprendre que ce risque justifiait de retenir une faute grave privative des indemnités de rupture.
Dès lors que les effets d’une consommation hors du temps et du lieu de travail se prolongent durant l’exercice des fonctions (ce qui suppose qu’elle ait eu lieu dans un temps proche de la reprise du travail), le licenciement disciplinaire était parfaitement envisageable.
Qu'en est-il si le contrat de travail ne comporte aucune clause interdisant de se présenter au travail sous l’emprise de stupéfiants ?
A priori, la solution serait identique.
En effet, tout salarié est titulaire d’une obligation de prudence découlant de l’obligation de sécurité mise à sa charge par l’article L. 4122-1 du Code du travail.
Le manquement à cette obligation justifie donc une sanction disciplinaire, voire le licenciement pour faute grave. Tout dépend de la fonction du salarié.
A bon entendeur....