I. BREF RAPPEL DES FAITS
Dans le cadre d'un démarchage à domicile, un couple conclut avec la société TUCO ENERGY (exerçant sous l'enseigne "TUCO ENERGIE"), un bon de commande portant sur l'installation d'une centrale photovoltaïque devant être raccordée au réseau public et d'un chauffe-eau thermodynamique pur la coquette somme de 43 480 euros.
Cet achat s'effectue au moyen d'un contrat de crédit consentie par la SA BNP Paribas Personal Finance (exerçant sous l'enseigne "Cetelem"). Après- quelques années, le couple s'aperçoit que le rendement des panneaux photovoltaïques est dérisoire par rapport à ce que le commercial de la société TUCO ENERGIE leur avait promis.
II. PROCEDURE
Aucune entente amiable n'étant possible, un procès s'ensuit dans le courant de l'année 2020 devant le tribunal d'instance de BERNAY, lequel annule les contrats de vente et de crédit, puis condamne CETELEM à rembourser au couple les échéances au titre du prêt, tout en privant CETELEM de leur réclamer le paiement du solde du crédit.
Compte tenu de la jurisprudence exigeant la preuve d'une faute de la banque couplée à la preuve d'un préjudice, ce jugement ne pouvait qu'être partiellement infirmé, sans pour autant léser le couple victime.
En effet, CETELEM a interjetté appel, réclamant le remboursement du montant du prêt.
Une telle demande était légitime, eu égard à la position de la Cour de cassation.
La Cour d'appel de ROUEN a confirmé le jugement ayant déclaré la vente nulle au motif :
- que le bon de commande indiquait que la marque des panneaux était "Solar World" alors que la facture indique la vente et installation de panneaux de la marque "Soluxtec"!
- de l'abence d'indication "du modèle, des références, de la dimension et du poids de l'onduleur", et du "modèle du ballon thermodynamique",
- de l'imprécision des délais de mise en service et de livraison, le bon de commande indiquant "4 mois"...
De fait, les juges d'appel ont prononcé l'annulation de la vente pour imprécision du bon de commande et condamné la société TUCO ENERGIE à rembourser ses clients du montant de la vente, à charge pour eux de le restituer à la banque, déduction faite des échéances réglées.
Aucune inquiétude ne sera de mise pour le couple victime étant donné que la société TUCO ENERGIE est in bonis et pourra donc s'acquitter du montant de sa condamnation.
III. UNE DECISION A CONSIDERER AVEC PRECAUTION, CAR SUSCEPTIBLE DE CASSATION
Cet arrêt d'appel est à considérer avec la plus extrême précaution, eu égard à la jurisprudence.
En effet, suivant la Cour de cassation, si un bon de commande est imprécis sur le modèle des panneaux photovoltaïques et de leurs accessoires, mais que la facture décrit "de manière détaillée l'installation photovoltaïque, y compris l'onduleur" et "que l'installation a été ensuite mise en service et est devenue productive", cela implique que les acquéreurs "ont exécuté sans réserve le contrat principal et le contrat de crédit, en sachant parfaitement, pour avoir eu le temps de procéder à toute vérification utile, quel type de matériel avait été installé, son prix et son mode de financement et avaient ainsi par cette exécution, confirmé le bon de commande entaché de nullité"(Civ. 1, 21 octobre 2020, 18-26.761).
En clair, si un bon de commande est imprécis (ce qui est illégal), son imprécision est purgée si la facture liée à celui-est suffisamment détaillée.
Ainsi, dans la présente affaire commentée, le couple acquéreur se plaignait d'un bon de commande imprécis et notamment de panneaux facturés et posés de marque différente de ce qui avait été convenu.
C'est effectivement répréhensible.
Or, eu égard à la jurisprudence, la Cour d'appel de ROUEN aurait pu leur opposer que leurs reproches n'étaient pas fondés, car ils ont attendu 4 ans pour agir en justice et opposer que les panneaux posés n'étaient pas ceux convenus... alors qu'ils avait eu tout le temps de le constater eu égard à la facture entre leurs mains.
En résumé, de manière objective, nous sommes d'avis que cet arrêt d'appel est critiquable sur le plan juridique.
De manière subsjective, on ne pourra évidemment que se féliciter pour le couple qui a pu obtenir gain de cause et qui, on l'espère, n'aura pas à souffrir d'un pourvoi en cassation.
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Me Grégory ROULAND - avocat au Barreau de PARIS
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