Cette affaire n'est pas la première du genre, SVH ENERGIE avait déjà été condamnée : voir notre article du 25.11.2019
I. RÉSUMÉ DES FAITS
Le 14 janvier 2016, un couple signe avec la société SVH ENERGIE (venant aux droits de la société GSE INTEGRATION), un bon de commande portant sur la fourniture et l’installation d’un kit photovoltaïque dénommé « pack GSE sur mesure » devant être raccordé au réseau ENEDIS, pour la somme de 34.790€. Pour financer cette acquisition, il est convenu de contracter un crédit auprès de SYGMA BANQUE (rachetée par BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ou CETELEM).
Le 23 mars 2016, SVH ENERGIE entreprend les travaux, mais ne met pas en service les panneaux photovoltaïques. Aussi, les acquéreurs adressent deux réclamations à la venderesse.
Faute pour cette dernière de faire le nécessaire, un procès s’ensuit devant le Tribunal d’instance d’Uzès. Ce dernier ordonne la nullité du contrat de vente et du contrat de crédit, puis condamner BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à rembourser les emprunteurs des sommes prélevées sur leur compte bancaire.
La société SVH ENERGIE interjette appel, mais en vain.
II. POSITION DE LA COUR D’APPEL DE NÎMES
A. COMPÉTENCE DU JUGE JUDICIAIRE : LA POSITION ERRONÉE DE LA BANQUE
Selon la banque, seul le juge du Tribunal de commerce était compétent pour connaître de l’affaire, au motif que l’intention des acquéreurs était d’utiliser la centrale photovoltaïque à des fins commerciales, puisqu’ils revendent l’électricité produite et en tirent un profit.
Or, le couple a acquis une installation photovoltaïque, afin de produire de l’électricité, ce qui constitue une activité civile. La vente et non la revente, après transformation et non après achat, de l’électricité obtenue n’est pas davantage un acte de commerce au sens des articles L.110-1 et L.110-2 du Code de commerce. Par ailleurs, le couple n’exerce pas d’activités commerçantes et l’installation photovoltaïque n’a pas vocation à servir à l’exercice d’une activité commerciale.
Mieux encore ni le bon de commande, ni le contrat de crédit ne préciser que l’électricité à produire est destinée à être vendue, partiellement ou totalement.
Si les époux ont vendu l’intégralité de leur production d’électricité à EDF, les revenus procédés sont dérisoires (allant de 100 à 150€ par mois)… et l’acquisition était d’abord destiné à financer le crédit contracté et couvrir l’ensemble des mensualités de ce dernier, puis de réduire par compensation, après amortissement de cette acquisition, leur propre dépense d’énergie domestique.
De fait, le couple n’entendait pas dégager un profit important destiné à leur procurer des ressources mais de contribuer à l’auto-financement de l’installation qui devait ensuite, simplement au terme d’une longue période de treize années, être productrice de revenus destinés à compenser les dépenses énergétiques de consommation personnelle d’électricité par les acquéreurs, de sorte que la vente de l’électricité produite revêt une dimension essentiellement personnelle exclusive de toute activité professionnelle.
Par conséquent, le juge civil était bien compétent pour connaître du litige.
B. ANNULATION DU CONTRAT DE VENTE
Le bon de commande est défaillant à plusieurs titres : un prix global et sans détail des matériels vendus, des matériels sans marque, aucun délai d’exécution.
De même, les modalités d'exercice du droit de rétractation sont faites par un simple renvoi aux conditions générales et avec ambiguïté, faute de permettre à l’acheteur de déterminer avec certitude si son délai de rétractation court à compter du jour de la signature ou de la réception du produit…
De plus, il n'est pas distingué si la réception s'entend de la livraison ou de l'installation du produit vendu.
Par conséquent, le bon de commande encourt la nullité.
C. CONDAMNATION DE SVH ENERGIE A REMBOURSER LES EMPRUNTEURS
Les emprunteurs ont tenté de reprocher à la banque d’avoir commis des fautes contractuelles pour échapper à la restitution du crédit, mais en vain.
En effet, la Cour d’appel a reproché à la banque d’avoir débloqué le crédit sans vérifier la validité du contrat de vente et à l’appui d’un certificat de livraison insuffisant pour permettre de s'assurer que la prestation avait été menée à son terme.
Cependant, la Cour d’appel reproche aux emprunteurs, en raison d’une jurisprudence nouvelle, de ne pas démontrer que la double faute de la banque leur a causé un préjudice.
De fait, la Cour d’appel refuse d’exonérer les emprunteurs de rembourser le crédit.
Cependant, SVH ENERGIE étant une société en parfaite santé financière (au jour de la rédaction de cet article), la Cour d’appel l’a condamné à rembourser le prix de vente, soit 34.790€ aux acquéreurs, à charge pour eux de rembourser la banque, déduction faite des sommes prélevées sur leur compte bancaire.
Aussi, la décision est parfaitement louable et légitime.
III. QUE RETENIR DE CETTE AFFAIRE ?
Il est acquis que la faute du prêteur n'est pas suffisante pour le priver de sa créance de restitution et qu'il appartient à l'emprunteur de rapporter la preuve d'un préjudice actuel et certain.
La preuve d’un préjudice est aisée, lorsque l’installation n’est pas achevée, en panne, fuyarde, etc.
De même, il n’y a rien à craindre si on ne peut pas démontrer un préjudice, dès lors que la société venderesse est in bonis, c’est-à-dire qu’elle est en activité et loin de déposer le bilan.
Aussi, la jurisprudence peut sembler sévère, mais un peu de bon sens permet de s’y conformer et d’éviter, lorsqu’on est victime d’une société non respectueuse des règles d’ordre public, de devoir payer une installation ruineuse.
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Avocat au Barreau de PARIS