I. EXPOSÉ DU LITIGE
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Le 7 juin 2016, un couple est démarché à son domicile par la société ISOLEO FRANCE, qui le convainc d’acquérir une isolation thermique par laine de verre des combles de son domicile, le renforcement de la charpente et de l'étanchéité ainsi que la pose, l'installation et la mise en service de 12 panneaux photovoltaïques.
L’ensemble est vendu pour la somme de 23.900€ et acquis au moyen d’un crédit à la consommation, signé auprès de la SA COFIDIS, au taux débiteur de 4,55 % sur 10 ans.
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Le 13 juillet 2016, ISOLEO FRANCE procède aux travaux, mais ne remet pas le Consuel aux acquéreurs, ni ne fait raccorder leur installation photovoltaïque !
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Face à la carence d’ISOLEO FRANCE (qui fera l’objet d’une liquidation judiciaire), un procès s’ensuite devant le Tribunal d'instance d’ORANGE, aux fins d'obtenir l’annulation de la vente et du crédit, et d’être remboursé de ce dernier. Mais par jugement du 20 février 2018, le Tribunal déboute le couple de ses demandes.
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Le couple interjette appel le 19 mars 2018 et bien leur en a pris, car ils obtiennent l’infirmation du jugement.
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II.  MOTIVATION DE L’ARRÊT D’APPEL
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A. Sur l'application des dispositions du code de la consommation
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Une fois n’est pas coutume, COFIDIS a tenté de faire croire aux juges que le contrat signé par les acquéreurs était purement commercial, au motif que le but recherché lors de l'acquisition de la centrale photovoltaïque tendait à la revente de l'intégralité de l'électricité produite.
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Or, les acquéreurs-emprunteurs sont de simples consommateurs. Pour preuve, l’objet du contrat portant sur l'acquisition de :
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- un générateur photovoltaïque d'une puissance de 3Kwc ce qui correspond à une puissance égale à la moyenne nationale de consommation des ménages
- travaux d'isolation thermique tendant à la pose de laine de verre et au renforcement de la charpente et de l'étanchéité.
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En quoi un tel contrat serait-il de nature commerciale ? il l’aurait été si le contrat de crédit stipulait que l’acquisition était destinée à une activité professionnelle.
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De fait, COFIDIS s’est vue débouter, à juste titre, de ses demandes.
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   B. Nullité du contrat de vente
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Le bon de commande souffre d’une grave carence, faute de ne comporter aucune mention du délai de livraison, sans que cette carence puisse être comblée par l'article 4 des conditions générales selon lequel « le délai de livraison prévu au recto du présent contrat est donné à titre indicatif et ne peut dépasser une limite de 200 jours à compter de la prise d'effet du contrat ».
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En l'absence de fixation d'une date précise de livraison dans le contrat souscrit, à laquelle les conditions générales renvoyaient d'ailleurs, la nullité du contrat de vente est encourue.
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Elle l’est d’autant plus que le bordereau de rétractation est irrégulier, qui ne visait que la date de signature de la commande comme point de départ du délai de rétractation alors que la loi nouvelle permet également de se rétracter à compter du délai de livraison des biens.
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Par conséquent, les irrégularités du bon de commande étant établies, l'annulation du contrat de vente est justifiée et le jugement sera infirmé.
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    C. Nullité subséquente du contrat de crédit
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En droit, l'annulation du contrat de crédit subséquente au contrat principal de vente entraîne en principe la remise en état antérieur devant se matérialiser par la restitution par l'emprunteur des fonds prêtés, l'établissement de crédit devant restituer les mensualités réglées au titre du prêt.
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D.  Faute de la banque dans le déblocage des fonds
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Les emprunteurs reprochent à COFIDIS d’avoir commis une double de nature à la priver de son droit au remboursement des sommes prêtées, faute d’avoir vérifié la régularité du contrat de vente et son exécution complète, avant le déblocage des fonds.
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Pour sa part, la banque oppose la signature d'une attestation de livraison dont le contenu a été reproduit de manière manuscrite par l'acquéreur et qui était dépourvu d'une quelconque ambiguïté en ce qu'il visait l'acceptation sans réserve de la livraison des marchandises ainsi que l'exécution de tous les travaux et prestations qui devaient être effectués.
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Selon les juges d’appel, le certificat de livraison était suffisant pour permettre à la banque de s'assurer de l'exécution de l'intégralité de l'opération financée. De fait, aucun reproche ne peut lui être fait sur ce point.
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En revanche, le contrat de vente ayant été signé dans le cadre d'un démarchage à domicile, il appartient au prêteur de vérifier la régularité du contrat de vente avant de procéder au déblocage des fonds.
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Or, comme il a été démontré le bon de commande était irrégulier en ce qu'il ne mentionnait aucun délai de livraison et que le bordereau de rétractation n'était pas conforme aux exigences légales s'agissant de l'exercice des modalités de ce droit. En procédant à la remise des fonds en dépit des irrégularités apparentes du contrat de vente, COFIDIS a ainsi commis une faute de nature à la priver de son droit à la restitution du capital restant dû en dépit de l'attestation de fin de travaux régulièrement signée par l'acquéreur.
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E. Sur le préjudice à démontrer
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Il est désormais de jurisprudence constante que la seule faute du prêteur est insuffisante pour le priver de sa créance de restitution et qu'il appartient à l'emprunteur de rapporter la preuve d'un préjudice actuel et certain.
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Dans cette affaire, le préjudice est simple : l'installation photovoltaïque n’est pas raccordée au réseau et n'a jamais été mise en état de fonctionnement.
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Pour preuve, les acquéreurs avait mis en en demeure ISOLEO FRANCE par courrier recommandé avec accusé de réception le 16 décembre 2016, lequel somme la société de leur délivrer l’attestation du CONSUEL et de régler les frais de raccordement au réseau public. Les acquéreurs produisent également un constat d'huissier confirmant leurs affirmations.
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Consciente de la réalité des éléments, COFIDIS tente d’avancer que l'opération de raccordement au réseau n'était pas incluse dans le contrat de vente !
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L’argument est absurde étant donné que le bon de commande stipulait expressément que le vendeur se chargeait d’obtenir l’attestation de conformité du CONSUEL et de régler les frais de raccordement à ERDF !
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Aussi, il était évident que les arguments de COFIDIS ont été rejetés par la Cour d’appel.
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ISOLEO FRANCE étant en faillite, elle ne peut donc s’exécuter et remplir ses devoirs, si bien que le préjudice des acquéreurs-emprunteurs est parfaitement caractérisé et qu’ils ont été exonérés de devoir rembourser le crédit, de 23.900 euros à COFIDIS.
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En somme, la carence du vendeur en faillite exonère de rembourser le crédit affecté !
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Je reste à votre disposition :
MAIL :Â gregory.rouland@outlook.fr
tél: 06.89.49.07.92
Avocat au Barreau de PARIS