Admissibilité CRFPA 2019 : inégalités et injustices

Publié le 24/10/2019 Vu 34 965 fois 16
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Les résultats d'admissibilité du CRFPA 2019 ont été publiés le 21 octobre. Ils suscitent quelques légitimes incompréhensions...

Les résultats d'admissibilité du CRFPA 2019 ont été publiés le 21 octobre. Ils suscitent quelques légiti

Admissibilité CRFPA 2019 : inégalités et injustices

Hélas, alors que la réforme de l'examen d'entrée au CRFPA pour en faire devenir un examen national se justifiait, à titre principal, pour en faire un examen plus égalitaire et, à titre secondaire, pour qu'il y ait moins d'avocats, le moins que l'on puisse dire c'est que le cru 2019 est non seulement décevant mais également inquiétant.

Tout d'abord, je tiens à me présenter une nouvelle fois, puisque mes échanges de ces derniers jours ont semblé conduire mes interlocuteurs à s'interroger. Je suis Directeur des Etudes de Sup Barreau. Je suis également Maître de conférences des Universités, en poste à l'Université de Picardie Jules Verne. Je suis également un avocat omis et j'anime de nombreux groupes de discussion consacrés au CRFPA (V. nota "actualités CRFPA"). D'ailleurs, à chaque fois que j'envoie un mail, l'adresse elle-même adresse à quel titre je contacte mes interlocuteurs, mais ça c'est un autre problème. 

Ensuite, depuis lundi, l'incompréhension de nombreux étudiants - et la mienne - monte. Déjà, alors que les résultats devaient être publiés le 21 octobre, ils l'ont été dans 2 IEJ dès le vendredi avant d'être retirés, puis dans un autre le dimanche au soir. Ensuite, mais cela fera l'objet d'un autre billet, l'épreuve du GrandO dont le coefficient atteste qu'il s'agit d'une épreuve à la mort subite obéit à des modalités différentes selon les IEJ. Ainsi, un commentaire d'arrêt est posé à l'Université de Paris V ou à l'Université d'Aix-Marseille, à Paris 1, le sujet ressemble à une plaidoirie en débutant par "soutenez que...", à Nanterre, le candidat choisit lui-même à une question "faut-il..." s'il défend la positive ou la négative. Même les modalités de tirage au sort de l'ordre de passage des candidats diffèrent. A Nanterre, le tirage a lieu le jour de la première épreuve, dans d'autres IEJ c'est à l'issue des résultats d'admissibilité. 

Par ailleurs s'agissant des résultats et leur pseudo-homogénéité. Sup Barreau propose les mêmes supports dans ses 4 campus et les résultats sont disparates. En pénal, j'ai supervisé et enseigné dans les 4 campus, il est étrange de constater certaines notes. Alors, bien évidemment, je pourrais me gargariser de constater que l'ensemble de mes pénalistes sudistes ont validé, mais ce serait injurier mes étudiants nordistes dont les copies reflétaient souvent un niveau équivalent... Puisque l'examen est national, la correction devrait être nationale, les copies croisées d'un IEJ à l'autre...

Enfin, il reste le meilleur. Une fois les résultats obtenus, je conseille systématiquement aux étudiants afin de comprendre et de décider de quoi l'année suivante sera faite de demander à consulter leurs copies. Or, le plus souvent, ils ne peuvent le faire qu'à partir de janvier, donc à une période où aucune contestation crédible ne pourra avoir lieu, l'entrée dans les écoles d'avocat ayant alors eu lieu. Plus encore, dans certains IEJ, on refuse de leur communiquer leurs notes. Pour quelle raison ? Cela, on l'ignore...

J'en suis navré mais cela me révolte. Que dire à ces étudiants que je suis qui ont fait un travail acharné. Comment les aider à entamer un processus de cicatrisation si on leur refuse même de comprendre ? Les étudiants craignent, lorsqu'ils contestent, des représailles. Le CNB ne répond pas aux messages sur les réseaux. Les directeurs de Prépa ne prennent jamais leur plume si ce n'est pour dénigrer la concurrence ou prodiguer des conseils sans même connaître l'examen. Les universitaires ? Je dirai simplement que le choix du silence semble être préférable pour garantir et une longue et fastidieuse carrière.

Alors voilà, je suis un petit Maître de conférences, qui dirige une petite Prépa et qui veut juste expliquer demain à Julie, Lucas, Chloé, Juliette, Cyrille, Mathilde, Justine, Marc-Antoine...pourquoi ils n'ont pas réussi alors même que leur niveau est supérieur à celui de nombreux autres admissibles...

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1 Publié par NatRob
26/10/2019 12:54

La seule solution c'est supprimer ces examens professionnels déguisés en concours : c'est déjà fastidieux d'arriver et valider le master2. Avec un master 2 en poche, je pense que nous sommes tous compétents pour assurer le métier d'avocat. Il faut rétablir aussi le statut légal de Juristes. Cela permettra aux diplômés de travailler directement sans être obligés d'être titrés Avocats ou notaires etc... pour se prévaloir de leurs années ardues d'études supérieures, sinon vaut mieux Supprimer carrément les études supérieures à la fac de droit puisque au final, c'est une machine à chômeurs non?

2 Publié par Étudianteparis
26/10/2019 19:03

Pour l'avoir également vécu, je suis entièrement d'accord avec votre article. Cela fait plaisir à lire, on se sent un peu mieux compris. Pour une anecdote me concernant, lors de la consultation de mes copies j'ai pu constater qu'on m'avait attribué la note de 4/20 et de 16/20(il y a toujours une double correction). Un peu choquant.. surtout que je ne pense pas avoir été le seul candidat dans cette situation.

3 Publié par Ruhtra
27/10/2019 06:56

Un complotiste y verrait une manoeuvre des IEJ concernés pour enterrer les prépas: si les résultats sont imprévisibles, quelle que soit la qualité de la préparation dispensée par la prépa, l'étudiant ne verra plus l'intérêt d'investir dans une structure privée: le billet de loterie coûterait bien trop cher.

On ne peut qu'espérer que tout cela se retournera contre les IEJ, et qu'ils perdront le monopole de la présentation au CRFPA. S'ils n'étaient qu'une prépa comme une autre, à l'image de ce qui se passe pour le concours ENM, la situation des étudiants serait bien différente.

4 Publié par Lilap
28/10/2019 21:43

J’ai passé pour la deuxième fois le CRFPA cette année et c’est également un échec. L’an dernier j’ai obtenu la moyenne de 10 aux écrit et 8 au Grand oral. Lors du grand oral j’ai eut le malheur de passer à 13h (heure a laquelle mes examinateurs devaient aller manger). Ils ont passés les 45 min à regarder l’heure en attendant que je termine.

Deuxième essai cette année, 9,5 aux écrits. Ce qui me choque le plus c’est ma note obtenue à la note de synthèse. Je sais pertinemment que j’ai répondu aux attentes de cette épreuve, que je maîtrisait bien. J’attend la consultation des copies.

J’ai l’impression que d’une année à l’autre les correcteurs sont de plus en plus sévères et injustes. Que malgré l’absence de numerus clausus, les IEJ procèdent à une sélection. J’ai pu constater l’an dernier que dans certaines matières malgré avoir citer tous les éléments pour de nombreuses questions je n’avait que la moitié des points. Que dire de plus.

J’ai investie deux ans dans cet examen. Deux années de frais exorbitants (IEJ, prepa privées, loyer d’un appartement à Paris, codes, livres).

Le Bilan: mon temps et plus de 40 000 euros investis pour rien.

Le sentiment d’injustice est terrible, d’autant que j’ai deux masters et j’ai toujours fait parti des meilleurs élèves de mes promos...

Cet examen ne reflète pas le niveau des candidats, il est totalement aléatoire.



5 Publié par In dubio pro reo
13/11/2019 13:17

Je viens de tomber sur votre article et je suis totalement d'accord avec vos propos. Parmi les personnes avec qui j'ai révisé, des bons ont échoué alors que des très mauvais ont réussi les écrits haut la main.

Je trouve ça honteux d'entendre des propos du type "il y a moins de personnes dans notre IEJ, c'est pour ça que je l'ai choisi, le niveau est moins élevé, ils font passer plus de monde". C'est un examen national, le niveau pour réussir devrait être le même partout. A quand des corrections nationalisées avec des correcteurs aveugles sur l'IEJ d'origine du candidat ?

Les inégalités et injustices continuent pendant les oraux. Les oraux de langue tout d'abord : certains exigent des connaissances spécifiques en droit anglo-américain, quand d'autres ne font qu'une discussion générale ou un commentaire de texte. Au sein d'un même IEJ, l'exercice demandé peut être différent en fonction du correcteur. Dans certains IEJ, les sujets sont fournis à l'avance aux étudiants. Tant d'inégalités, on croit rêver ...

Le grand oral ensuite : certains IEJ font des soutenances, d'autres des commentaires de texte, et d'autres des dissertations. Dans certains IEJ, quelque soit la forme du sujet, on attend un oral type soutenance, alors que dans d'autres ce n'est pas le cas. La date de début du grand oral est fixée 10 jours après la publication des résultats de l'admissibilité, mais ils ne débutent qu'aujourd'hui dans certains IEJ.

Tout ceci est affligeant. La nationalisation n'était qu'une mascarade.

6 Publié par Xavier-Bastos
30/11/2019 05:10

Bonjour Professeur, et bonjour à tous,

Je viens également apporter mon témoignage concernant le CRFPA 2019 , ayant également échoué aux épreuves écrites.

Aujourd'hui, mon IEJ ( Montpellier ) a proposé les éléments de correction de l'épreuve de droit des obligations.

L'occasion pour les recalés de consulter leurs copies et d'enfin pouvoir identifier les axes d'amélioration pour une éventuelle présentation à la session 2020. Enfin c'est ce que je croyais.

Je dois avouer que ce moment a été, pour ma part, très désagréable, et pour deux raisons.

La première tout d'abord, ayant pris soin de conserver mes brouillons, j'ai constaté qu'au fur et à mesure des développements réalisés par les professeurs et les avocats présents, j'avais ( a peu de chose près) évoqué tous les grands axes des trois parties de l'épreuve ( je ne rentrerais pas ici dans les détails, vos IEJ proposerons certainement une correction dans les jours à venir).

Ma surprise fut totale, puisque j'ai obtenu la note de 7,25 à l'épreuve. Je m'attendais donc à des développements plus aboutis tant sur le plan formel que sur le plan de la logique juridique. Je me disais même que j'étais forcement passé à côté de quelque chose, parce que pour avoir 7,25 c'est que je m'étais forcément planté quelque part. Il n'en n'est rien

La deuxième raison est liée à la consultation des copies. A l'issue de la correction, chaque étudiant pouvait consulter sa copie et demander à prendre connaissance des commentaires des examinateurs ainsi que d'éventuels conseils pour s'améliorer.

Là encore, désillusion, et le mot est faible. Voici les faits :

- Les copies sont totalement vierges. Rien, absolument rien, on pourrait même se demander si quelqu'un à pris le temps de les lire.

- Avec votre copie, est liée une page blanche avec des commentaires très lapidaires. Pour ma part, le seul commentaire était : Sujet non maîtrisé, (très éclairant comme critique pour un étudiant qui avait terminé son épreuve et évoqué tous les axes importants mentionnés par le correcteur).

- Pour plus de détails une autre feuille, présentée sous forme de tableau mentionne les notions juridiques qu'il fallait aborder avec des croix et des tirets. Là, le professeur présent me dit que je n'ai pas été précis sur certaines notions, notamment les conditions du dol ( question 1 du sujet). Pourtant, lui montrant ma copie qui mettait en valeur l'analyse détaillée de la notion, celui se défile en me disant que ce n'était pas lui le correcteur et que la note est méritée, puisqu'il y a la fameuse double correction. J'y apprends d'ailleurs que le premier examinateur m'avait donné la note de 5/20 et l'autre 9,5/20, étonnant, mais comme l'a bien dit Monsieur le Professeur, "on coupe la poire en deux", bien sur, évidemment.

Mon point s'appuie tout simplement sur le fait que les personnes dans mon cas qui ont échoué souhaitent simplement comprendre les raisons de cet échec et comment s'améliorer, mais visiblement tel n'est pas le but voulu par la commission. Ne pas réussir un examen ne me pose pas de problème, mais faire en sortes d'empêcher volontairement une progression, cela m'est insupportable.

Pour vous en convaincre, deux choses. La première, c'est que les professeurs nous annoncent en préambule qu'ils ne pourront pas nous donner une correction détaillée puisqu'ils sont tenus par la commission à une confidentialité absolue.

Ensuite, lorsque je m'adresse à un professeur pour lui demander comment m'améliorer, celui-ci me répond, avec une grande décontraction la chose suivante : Monsieur, il faut travailler d'avantage. Comme si j'y étais allé en dilettante, pour mon bon plaisir, bref.

Voila donc mon expérience.

Une année de sacrifiée à préparer un examen pour lequel je pensais avoir toutes mes chances.

Encouragé par des avocats avec qui j'avais travaillé en cabinet pendant plusieurs mois qui m'ont donné réellement le goût pour l'avocature je suis absolument scandalisé par cette opacité qui laisse tellement d'étudiants au bord de la route, sans avoir aucun moyen de s'améliorer pour la session suivante.

Je peux vous le dire, cette correction et cette consultation de copie ne m'ont absolument servi à rien. Et malheureusement pour ma part, vu l'aléa qui devient bien trop important, je renonce à me présenter à la session suivante ( bien qu'il me reste encore deux essais), je ne souhaite plus participer à cette mascarade et surtout à ce concours déguisé.

C'est assez paradoxale, puisque ce sont les avocats avec qui j'ai eu la chance de travailler qui m'ont donné l'envie de le devenir à mon tour, et c'est cet examen qui m'en aura définitvement dissuadé.

En espérant que vous serez plus courageux et vaillant que moi.

Bonne chance à vous.






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Blog de Mikaël Benillouche

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