Mon fils, ma bataille,
Je sais enfin de ce que tu as...le syndrome de NESCAV ! Tu as toujours été très original de toutes façons, mais de là à choisir un truc qui touche une dizaine de familles en France et 400 à travers le monde, c'est quand même tout à fait spécial...
Plus de deux années d'attentes, de recherches, d'examens, d'angoisses et de nuits blanches se sont écoulées. A tes 1 an déjà, ta maman et moi avions compris que quelquechose n'allait pas. En pleine pandémie, je t'avais imposé aux urgences de l'Institut Rotschild, ton RDV allait être déplacé et le verdict était tombé : les deux nerfs optiques sont atrophiés. Tu es donc mal-voyant ! Tu as un handicap. C'est étrange, ces deux mots me mettaient mal à l'aise avant. Merci de m'avoir fait grandir. Comme tout papa un peu nul, j'ai sombré quelques jours avant juste de me souvenir que mon rôle c'était d'être là pour toi. On a alors discuté et je suis devenu ce roc insubmersible (qui pleure parfois) et on a commencé le combat. Tu as été admis au CAMSP de Versailles où vit ta maman puis au SIAM de Voisins-le-Bretonneux et tes soins se sont organisés sur place, à la crèche où tu vas deux jours par semaine et chez ta maman. Il y a aussi les soins en libéral où nous cavalons à gauche et à droite.
Tous ces professionnels se sont habitués à tes fous rires, à ta volonté farouche de rire partout tout le temps. Ils ont beaucoup d'affection pour toi. Assister aux séances de psychomotricité, d'orthoptie, d'ergothérapie, d'orthophonie est toujours un moment agréable...en kiné on rigole moins, toi comme moi mon fils. Mais ça nous fait du bien, c'est grâce à ces sééances que tu t'es levé et que mercredi dernier, pour la première fois, je t'ai vu sur un vélo. Mon Dieu, ce que c'était émouvant...
L'année dernière, nous avons pris la décision que tu fasses ta rentrée à l'école maternelle comme les autres enfants...à trois ans. Elle n'était pas gentille la première directrice qui parlait de toi devant toi à la troisième personne. Elle ne voulait pas de toi dans son école. Heureusement, nous avons trouvé une autre école avec un directeur qui nous a dit qu'il aurait de la chance de t'accueillir. On a aussi eu les amis qui désertaient parce que je n'étais pas suffisamment disponible ou que ta compagnie était trop chronophage pour moi. Peu importe, tu vois bien, il y en a de nouveaux et puis certains anciens reviennent...
Mon fils, je ne laisserais jamais personne t'opposer à un enfant "normal". Tu es un enfant extraordinaire. La place qui n'est pas occupée par la vue dans ton cerveau l'est par d'autres sens. Ton goût pour la musique, ta douceur et ta sensibilité font de toi le fils que j'ai toujours rêvé d'avoir...
Bon maintenant que l'on sait on fait quoi ? A court terme, on ne change rien, mais ta surveillance en neuro-pédiatrie va s'intensifier. A l'avenir, tu risques de stagner voire de régresser. Franchement, je n'y crois pas du tout. Tu es sur le point de marcher, tu casses tout à la maison donc tu vas marcher et on va surveiller cette histoire de rigidité des membres inférieurs. Ensuite, avec ta maman on a réussi à contacter d'autres familles qui sont touchées par ce syndrome, on va se constituer en association. Une fois créée, je vais essayer de la faire connaître et de médiatiser un peu ce syndrome. Il n'y a pas de traitement tu sais et la recherche en France est balbutiante. Alors, on va essayer de t'inclure dans l'étude du seul médecin qui semble s'être spécialisée. La suite, on verra...
A moyen terme, ton projet éducatif va évoluer. Avec ta maman, nous sommes d'accord (oui ça arrive pour les choses importantes), pas d'internat ! On te trouvera le meilleur endroit pour que tu te développes harmonieusement.
Pour le reste, on a essayé beaucoup de choses toi et moi, notamment la kinésiologie... . J'ai aussi tourné le dos au Grand Patron de rage puis suis revenu vers lui. En avril, nous allons voir tes grands-parents en Israël, on ira au Mur des Lamentations avec ton oncle Serge, ton pépé dont tu portes le nom et moi et le Grand Patron va nous entendre c'est sûr.
Mon fils, j'ai peur que tu ne sois pas autonome quand je partirais...alors on va tout faire pour que tu le sois rapidement.
Pour finir, je vais te confier un petit secret. Tu sais la nuit quand tu t'endors dans mes bras ta main serrée contre la mienne, j'ai compris que c'était toi qui essayais de me rassurer.
Je t'aime mon fils. Maintenant qu'on connaît le nom de ton syndrome, on va lui casser sa gueule...la guerre est déclarée !!!
Papa