La séparation des pouvoirs : principes et application
Rappelons en préambule que seul le syndicat des copropriétaires a la qualité juridique d’employeur et non le syndic lui-même (article 31 du décret N°67-223 du 17 mars 1967).
Aux termes de ce même article le syndic engage et congédie le personnel employé par le syndicat et fixe les conditions de son travail suivant les usages locaux et les textes en vigueur (al. 1er), l’assemblée générale étant seule compétente pour fixer le nombre et la catégorie des emplois
Toutefois, et en dépit d'une répartition apparemment bien établie entre les deux organes du syndicat, l'étendue de la latitude dont dispose le syndic n’est pas si tranchée comme le montre l’abondant contentieux dans ce domaine
La question est de savoir jusqu'où peut aller syndic dans la gestion du licenciement, sans pour autant empiéter sur les droits de l'assemblée générale.
« Sur le papier », les termes du décret du 17 mars 1967 ne laissent pas de place au doute : le syndic a la possibilité de procéder au licenciement des salariés du syndicat sans avoir à consulter auparavant l'assemblée générale (CA Paris, 19 févr. 1997 : JurisData n° 1997-020261 ; RD imm. 1997, p. 620).
Il a même pu être jugé que le syndic était en droit de congédier une concierge en dépit de l'opposition des copropriétaires qui s'était exprimée en assemblée générale (Cass. 3e civ., 9 oct. 1969 : Bull. civ. 1969, III, n° 631 ; JCP G 1970, II, 16193 note E.-J. Guillot ; D. 1970, p. 202, note F. Givord ; AJPI 1970, p. 544).
Ceci étant les praticiens semblent suivre une ligne médiane en sollicitant, si ce n'est l'accord de l'assemblée générale, du moins son avis, préalablement à la prise de décision. Dans une optique similaire, un avis préalable du conseil syndical serait le bienvenu (même s'il n'a pas de portée obligatoire).
Compte tenu du caractère non négligeable des incidences pécuniaires (indemnité de licenciement, dommages-intérêts, ...), il n’est pas effectivement inutile de demander le point de vue du syndicat qui pourrait engager la responsabilité du syndic pour le garantir de tout ou partie des sommes qu'il serait amené à verser dans le cadre d'une condamnation pour licenciement abusif.
De son côté, une réponse ministérielle a énoncé que « rien ne s'oppose à ce que l'assemblée générale puisse donner, à propos de l'engagement ou du congédiement du concierge, certaines directives au syndic, ni à celui-ci de les solliciter, s'il l'estime nécessaire.
Je précise qu’un vote formel de l’assemblée sur le licenciement entacherait la procédure. En effet, aux termes de l’article L1232-2 du code du travail précise que « L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable ». Nous en reparlerons.
Clauses du règlement de copropriété contraires au décret du 17/03/1967
Les praticiens sont parfois confrontés à une clause du règlement de copropriété en vertu de laquelle le licenciement d'un salarié doit être autorisé par l'assemblée générale.
La Cour de cassation, réunie en assemblée plénière (Cass. ass. plén., 5 mars 2010 : JurisData n° 2010-002068 ; Bull. civ. ass. plén. 2010, n° 1 ; JCP G 2010, p. 1132, note D. Corrignan-Carsin ; Rev. loyers 2010, p. 286, obs. L. Guégan)., a retenu que si le licenciement d'un salarié du syndicat des copropriétaires entrait dans les pouvoirs propres du syndic, ce dernier devait néanmoins, lors de la procédure de licenciement, respecter le règlement de copropriété qui avait instauré une procédure d'autorisation préalable avant le licenciement du personnel du syndicat, laquelle n'avait pas été remise en cause, ni arguée de nullité par l'employeur comme contraire aux règles de la copropriété.
Une lecture attentive des règlements de copropriété s’impose avant d'entamer toute démarche envers le salarié !
Cet arrêt, qui rejoint l’article de mon blog consacré aux dispositions du règlement de copropriété réputées nulles et non écrites, pose un important problème de fond.
Comme nous l’avons vu, en matière sociale, la procédure impose en effet que l’employeur doit convoquer le salarié à un entretien préalable avant toute décision.
Or, si le syndic doit solliciter le vote de l’assemblée avant d’entamer la procédure, il sera dans l’impossibilité de respecter la procédure imposée par le code de travail avec le risque de voir déclarer un licenciement sans cause réelle et sérieuse !
Evolution législative
Depuis la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009, l'assemblée générale des copropriétaires décide à la majorité qualifiée la suppression du poste de concierge ou de gardien, sous réserve qu'elle ne porte pas atteinte à la destination de l'immeuble ou aux modalités de jouissance des parties privatives de l'immeuble (L. 1965, art. 26 f).
Dans ce cadre, il appartiendra au syndic d'engager la procédure de licenciement (conformément aux dispositions impératives, prévues par le Code du travail et la convention collective, sous peine d'engager sa responsabilité envers le syndicat) sans avoir à demander l'aval de l'assemblée, cette démarche n'étant que la conséquence de la décision prise par les copropriétaires en assemblée.